H2Pro est une startup israélienne développant des électrolyseurs à très haut rendement (95%) en utilisant une technologie originale: E-TAC. Contrairement aux électrolyses classiques, les deux demi-réactions, hydrogen evolution reaction et oxygen evolution reaction, sont séparées. Cela permet de se passer de membrane, ce qui réduit d’autant le prix de l’installation. Le prix de l’hydrogène produit pourrait descendre en dessous de 1€/kg, ce qui le rendrait plus compétitif que les autres modes de production d’hydrogène.

La technologie d’électrolyse E-TAC de H2Pro

L’électrolyse E-TAC consiste à séparer les deux demi-réactions de l’électrrolyse. E-TAC signifie cette séparation: E pour Electrochemical et TAC pour Thermally-Activated Chemical. Elle est présentée dans un articule publié dans la prestigieuse revue Nature Energy: Dotan, H., Landman, A., Sheehan, S.W. et al. Decoupled hydrogen and oxygen evolution by a two-step electrochemical–chemical cycle for efficient overall water splitting. Nat Energy 4, 786–795 (2019). https://doi.org/10.1038/s41560-019-0462-7

La première réaction est celle de l’hydrogène (hydrogen evolution reaction, HER):

4 H20 + 4 e- => 4 0H- + 2 H2

( Ni(OH)2 + OH- => NiOOH + H2O + e- ) x4

C’est l’étape électrochimique. La réaction à la cathode est celle qui se produit habituellement dans l’électrolyse de l’eau. Elle se produite néanmoins à 25°C (la température est plus élevée pour l’électrolyse alcaline, 50-80°C) et vous noterez que l’anode, en nickel, est altérée par la réaction.

La seconde réaction, celle de l’oxygène (oxygen evolution reaction, OER), va restaurer l’anode. En chauffant la solution à 95°C, l’anode est réduite (=désoxydée) et l’oxygène est libéré:

4 NiOOH + 2 H2O => 4 Ni(OH) + O2

Notez que la réaction est purement thermique, il n’y a pas de courant impliqué.

La cathode peut avoir la même composition que pour les électrolyses alcalines (=peu cher). Dans leur test, H2Pro utilise de l’acier inoxydable plaqué de nickel. L’anode, au contraire, demande une adaptation. Ils ont utilisé des anodes Ni(OH)2. L’efficacité serait de 95%, nécessitant 42kWh pour produite 1kg d’hydrogène. La seule autre technologie à avoir un tel rendement est l’électrolyse haute température, développée par Genvia. En outre, le procédé peut fonctionner à haute pression. Les entrepreneurs estiment que le prix de l’hydrogène produit pourrait descendre en dessous de 1€/kg.

Avancement et financement de H2Pro

Progression de H2Pro

H2Pro a été fondée en 2019 à Caesarea, en Israël par Talmon Marco, qui avait déjà monté et vendu deux entreprises dans les télécommunications pour 1,1Md$. La startup utilise des recherches issues du Technion, Israel Institute of Technology. Elle a gagné le New Energy Challenge de Shell en 2020.

Ils ont annoncé avoir fini leur première usine de production, permettant de produire 600MW d’électroliseurs par an le 27 mars 2022.

Tours de financement de H2Pro

  • En mars 2021, H2Pro a levé 22 millions de dollars dans un tour d’investissement de série A2 mené par Breakthrough Energy Ventures (BEV), sa filiale européenne, IN Venture et Sumitomo Corporation CVC.
  • La cloture d’un tour de financement de série B à 75M$ a été annoncée le 15 février 2022. Le tour a été mené par Temasek and Horizons Ventures. Parmi les nouveaux investisseurs, il y aurait également ArcelorMittal, Yara Growth Ventures et Companhia Siderugica Nacional.

FAQ

Combien d’argent a levé H2Pro ?

H2Pro a levé 107.2 millions de dollars au total.

Où se situe H2Pro ?

H2Pro est localisé à Caesarea, en Israël.

Quel est le rendement de H2Pro ?

En théorie, le rendement de H2Pro est supérieur à 95%, ce qui lui permet d’égaler l’électrolyse haute température, sans les problèmes liés aux conditions extrêmes (>700°C) de cette dernière.

H2SYS est une startup créée par 6 chercheurs du CNRS en 2017, développant des solutions d’hybridation entre piles à combustible (à hydrogène) et systèmes de stockage électrique.

L’hybridation consiste à associer deux sources énergétiques de nature différente. Elle pose plusieurs challenges, comme le fait de réussir à dimensionner correctement ces sources ou le contrôle des flux d’énergie.

Produits: systèmes de piles à combustible à hydrogène

H2SYS propose:

  • Aircell: Des piles à combustible PEM d’une puissance nominale de 500, 1000 ou 3000W. Le dihydrogène consommé, 65g/kWh, doit être pur à 99.95% et à une pression de 5 à 9 bars. Elles peuvent démarrer en moins de 5 secondes et fonctionnent entre 5 et 45°C.
  • Boxhy: Des groupes électrogènes à hydrogène allant jusqu’à 8kVa, conçus pour être transportables, à destination des chantiers.
  • Thytan: Des groupes électrogène à hydrogène de 50 à 130 kVa. Leur durée de vie est de 15 000h de fonctionnement.
  • Mothys: un « banc d’essai didactique » (= un outil avec une baterie, une pile à combustible et des convertisseurs pour l’enseignement). Il peut notamment se combiner à un réservoir à hydrures et un débitmètre hydrogène.

Services : accompagnement autour de l’électricité à partir d’hydrogène

H2SYS propose également des services d’ingénierie autour de ses technologies:

  • L’intégration de solutions hydrogène pour les machines et véhicules à hydrogène
  • « Prolongateur d’autonomie » (Range Extender) pour véhicules: un système combinant une pile à combustible Aircell combinée à un réservoir d’hydrogène et l’accompagnement pour l’implémenter.
  • Des modules hybrides sur mesure.

Identité

H2SYS, signifiant « de l’hydrogène au système », est une société créée à Belfort (90) en septembre 2017 (Siren 831 801 840). Elle a été lauréate 2022 du prix Start-Up du grand cabinet EY. Elle est dirigé par Sebastien Faivre. L’entreprise est issue de chercheurs ayant participé au FCLAB, un projet porté par le CNRS et plusieurs universités qui a permis de concevoir un « système à pile à hydrogène hybridé à un élément de stockage électrique, embarquant des cartes électroniques intégrant un contrôle intelligent des flux d’énergie. » (source)


Gen-Hy est une entreprise française développant des membranes échangeuses d’anion (AEM, anion exchange membrane).


Histoire de Gen-Hy

Gen-Hy est une filiale de la société FlexFuel Energy Development, société de décalaminage de moteur par injection d’hydrogène. Elle a été lancée le 8 avril 2019 suite à 5 ans de recherche en partenariat avec des laboratoires français et l’appui de la DGA (Direction Générale de l’Armement). Ce programme, Hy Motor, permettait d’appliquer cette technologie de décalaminage aux moteurs de navire grande puissance.

Elle est dirigée par Sebastien Le Pollès.

Une première unité de production d’une valeur de 2.5 millions d’euros, pouvant produire jusqu’à 480m² de membranes par an, ainsi que des « stacks » (ensembles de membranes et d’électrodes).

L’entreprise a annoncé en mai 2022 va investir 15 millions d’euros dans une usine de 8000m² à Montbéliard dans le Doubs. Celle-ci produirait des électrolyseurs complets d’une puissance entre 50kW et 4MW, devenant le 5e producteur français après McPhy, Elogen, John Cockerill et Genvia. Les dossiers de demande de subvention sont en cours.

Les membranes échangeuses d’anion Gen-Hy

La technologie des membranes échangeuses d’anion consiste à produire de l’hydrogène par électrolyse de l’eau grâce à une solution de potasse, qui va imbiber une membrane étanche au gaz. Cet électrolyte permet

Leur performance atteindrait plus de 85%, soit 4.25kWh par Nm3 d’H2 produit, sans consommer de métaux rares.

[Réserve: d’après ce que j’ai lu, les rendements d’électrolyse basse température, PEM ou alcaline, sont plutôt autour de 55-60% et l’article scientifique que j’ai lu présente la technologie AEM comme moins efficace que ces dernières. Ce taux semble donc à vérifier.]

Il prévoit d’emmener le prix de l’hydrogène jusqu’entre 4 à 7 euros du kilogramme.

Les produits commercialisés par Gen-Hy :  Hy-Cube

Gen-Hy commercialise ses membranes, mais aussi des unités de production modulaires sous forme de containers: le  Hy-Cube. Le modèle de 20 pieds de long pourrait produire 210kg d’hydrogène par jour, pouvant atteindre 270kg avec une option.

[Rq: il y a un problème d’unités dans leur présentation « The HY-CUBE® system is capable of producing up to 30 megawatts of highly pure hydrogen gas annually. » : le MW est une unité de puissance, pas un volume de production ou une quantité d’énergie]

L’ensemble serait coordonné par un logiciel développé par Ineris.

Enapter est une entreprise européenne concevant de électrolyseurs à membrane échangeuse d’anions (AEM, anion exchange membrane). Elle est côtée à la bourse et valorisée 483 millions d’euros (aujourd’hui).


Histoire d’enapter

Enapter a été fondée en 2017 par Sebastian-Justus Schmidt, ancien directeur d’une société de logiciels après avoir racheté une société italienne: ACTA, spécialisée dans la recherche et développement de piles à combustible et d’électrolyseurs AEM. Ses cofondateurs sont son fils Jan-Justus et Vaitea Cowan, une personne l’ayant aidé à concevoir une résidence énergétiquement indépendante, notamment grâce à l’hydrogène (la « Phi Suea House »).

Ils ont ouvert un bureau à Berlin en 2019, ainsi qu’un nouveau site de production en Italie. L’entreprise entre en bourse en 2020. En 2021, elle a 165 employés. Elle est lauréate du Earthshot Prize Award en 2021.

Les électrolyseurs Enapter

Enapter propose actuellement deux produits reposant sur la technologie AEM:

  • L’électroliseur AEM 4.0
  • L’AEM multicore.

Electrolyseur AEM 4.0

Leur électrolyseur AEM est modulaire, se présentant sous la forme d’un parallèlépipède de 63.5cm de long faisant 38kg et pouvant produire 0.5nm3 par heure (soit 1,0785kg/j) pour 2.4kWh. Le gaz aurait une pureté de 99.9% (ou 99.999% avec une option) et sortirait à 35 bars.

AEM multicore

L’AEM multicore est un assemblage se présentant sous la forme d’un container de 12.2m de long et contenant 420 modules AEM. Il peut (logiquement), produire 210 Nm3/h, soit 450kg/jour.

Le système de gestion énergétique

Les électrolyseurs seraient contrôlables à distance et librés avec des logiciels de gestion de la production énergétique (système de gestion énergétique, ou EMS, Energy management systems en anglais).

Le dispositif serait notamment adapté pour une autoconsommation résidientielle et des micro-réseaux d’énergie renouvelable. Il combine des modules de communication IOT pour produire l’information, une plateforme de télémétrie pour les recevoir, un « intelligent gateway » pour connecter les appareils sur un réseau local et envoyer les données vers le cloud d’Enapter; puis des logiciels pour analyser et présenter les données.

Pour aller plus loin:

  • https://www.rechargenews.com/energy-transition/exclusive-enapter-eyes-83-cost-reduction-for-its-unique-aem-hydrogen-electrolysers-by-2025/2-1-1256489

Airthium est une startup greentech – deeptech développant trois solutions tournant autour d’un moteur de Stirling, une sorte de pompe à chaleur réversible :

  • La production de chaleur industrielle jusqu’à 550 °C à partir d’électricité, à un prix à terme compétitif comparé au gaz naturel.
  • Un système de stockage saisonnier d’électricité permettant de combler les périodes creuses de production éolienne et solaire combinant
    • le stockage à court terme d’électricité dans des sels fondus (sous forme de chaleur) ce qui, grâce au moteur de Stirling, permettrait un stockage utilisant des matériaux communs avec un rendement de 70 %.
    • la production d’ammoniac, qui peut être ensuite transformé en chaleur grâce à un brûleur, puis en électricité grâce au moteur de Stirling.

Ce dernier permettrait de fiabiliser un système électrique reposant sur l’éolien et le solaire.

L’entreprise Airthium

Airthium a été fondée en mars 2016 par Andreï Klochko et Franck Lahaye. La naissance d’Airthium est racontée par l’interview donné par Andreï Klochko pour l’École polytechnique:

« L’idée d’Airthium a germé en 2008 lorsque j’ai eu connaissance d’une technologie au croisement de la mécanique des fluides et de l’électromagnétisme, mais ce n’est qu’à l’issue de ma thèse au Laboratoire de Physique des Plasmas de l’X que j’ai pu l’appliquer au stockage de l’énergie en travaillant sur la conception d’un nouveau type de compresseur de gaz. En 2014, lorsque nous avons été successivement lauréats du prix Gérondeau – Safran et du Concours mondial de l’innovation de Bpifrance, j’ai compris que notre projet avait convaincu et j’ai mesuré tout son potentiel.  Je m’y suis alors consacré à temps plein et Airthium a officiellement été créée en mars 2016 »

https://www.polytechnique.edu/fondation/actualites/toutes-les-actualites/airthium-la-start-qui-revolutionne-le-stockage-de-lenergie

L’entreprise a été incubée par le prestigieux Y Combinator en 2017. Elle a levé 500k€ auprès de plusieurs investisseurs, dont Y Combinator.

Hébergée jusqu’en 2019 à l’École Polytechnique, la startup était jusqu’à récemment installée dans le Campus Innovation d’Air Liquide, avant de déménager ce mois d’Octobre pour un local dédié à Villebon-sur-Yvette (91).

Elle a levé ~1.3 millions d’euros en crowdfunding en 2021 et lève actuellement un second tour de table, à nouveau en crowdfunding (source: interview).

Elle a levé 3M€ en mars 2024, dans une levée menée par daphni aux côtés d’Eren Groupe S.A. et Polytechnique Ventures.

Sur le plan industriel, ils prévoient un prototype de 1kW en 2023, un démonstrateur de pompe à chaleur dès l’année suivante et un modèle industriel de 1MW en 2025. (https://airthium.com/about_us)

Ensuite, des pompes à chaleur de plus grande ampleur (20MW) seraient disponibles en 2028. Le stockage saisonnier d’énergie est prévu pour 2030 à petite échelle (50MW) et 2035 à grande échelle (1GW).

L’équipe d’Airthium à côté de son moteur Stirling Crédits: Airthium

Questions et réponses

– Sur le principe de la solution Airthium

  • Discover The Greentech (DTG) : Si j’ai bien compris, vous proposez une pompe à chaleur industrielle pouvant capter la chaleur entre 100 et 500°C ou la chaleur atmosphérique à partir de -50°C et vous restituez à la chaleur désirée, c’est bien cela ? Quelle est la différence entre la chaleur que vous ne pouvez capter qu’à partir de 100°C et la chaleur atmosphérique ?
  • Airthium : Effectivement notre pompe à chaleur peut capter la chaleur fatale (chaleur produite par un procédé mais qui n’est pas valorisée) ou atmosphérique et la restituer à la température désirée (jusqu’à 550°C). Nous sommes capable de capteur la chaleur à partir de -50°C jusqu’à 550°C, il n’y a pas de différence de fond entre la chaleur atmosphérique et celle à 550°C.
    Selon les températures de captation et restitution la pompe à chaleur fonctionne différemment : le fluide de travail peut changer (eau entre 20°C et 80°C, huile jusqu’à 250°C et sels fondus pour atteindre 550°C), mais c’est surtout le COP (coefficient de performance) qui est impacté.
    Le COP caractérise l’efficacité de la pompe à chaleur, une résistance possède un COP de 1 (1 joule d’électricité = 1 joule de chaleur), l’avantage de la pompe à chaleur est de posséder un COP supérieur à 1. Dans notre cas, en allant de 20°C à 200°C nous avons un COP de 1.9, mais si l’on va de 100°C à 200°C notre COP est de 2.7.
  • DTG : Est-ce que vous pouvez expliquer en quelques mots le fonctionnement d’une pompe à chaleur ? En quoi est-ce plus efficace d’une résistance ? Un profane penserait qu’un 1 joule d’énergie électrique donnerait un 1 joule de chaleur, c’est plus compliqué que cela ?
  • Airthium : L’efficacité supérieure à 1 de la pompe à chaleur peut paraitre étonnante mais elle est tout à fait fondée sur des principes thermodynamiques. Le travail de la pompe à chaleur est en fait de déplacer des calories de la source froide vers la source chaude. L’électricité ne sert donc pas directement à créer de la chaleur mais à déplacer les calories. C’est par ce biais qu’elle peut être plus efficace qu’une résistance. Elles sont d’ailleurs déjà largement employées dans les habitations et l’industrie.
  • DTG : Comment est transmise la chaleur ? Air, liquide, métal ?
  • Airthium : La chaleur est captée au niveau du procédé froid par un échangeur de chaleur, qui la transmet à un fluide (eau, huile, sels fondus) ce dernier est envoyé vers notre pompe à chaleur. A l’intérieur il va interagir avec de l’hélium gazeux qui va permettre le déplacement des calories de la source froide vers la source chaude. On récupère alors un autre fluide (eau, huile, sels fondus) qui a été chauffé par la pompe à chaleur, celui-ci est envoyé vers l’échangeur de chaleur côté chaud pour réchauffer le procédé chaud.

– Sur les utilisations :

  • DTG : Je vois que vous parlez d’utiliser votre chaleur pour le ciment. Or, il me semblait que, pour retirer le carbone du calcaire, il fallait le chauffer à extrêmement hautes températures (>1450°C). Est-ce que vous allez aussi haut ? Même question pour le verre et le métal, pour quel processus et comment est-ce que votre procédé peut-être utilisé ?
  • Airthium : Notre pompe à chaleur peut être employée dans les domaines du ciment, du métal et du verre mais cela ne veut pas dire qu’elle sert directement au processus principal (fonte des métaux ou verre par exemple). Ces industries ont besoin de températures modérément élevées pour d’autres applications, le séchage, le traitement thermique, le maintien en température… C’est sur ce genre de processus que nous pouvons intervenir.

– Sur le système de stockage d’énergie :

[Ici nous allons notamment discuter du schéma de leur système de stockage saisonnier]

  • DTG : J’ai un peu du mal à comprendre votre schéma: pourquoi produire de l’ammoniac ? Prendre la chaleur de l’eau ? Le « Airthium Stirling Engine » est-il dépendant de ces deux procédés spécifiques ? Ou est-ce qu’il s’agit d’exemples d’utilisation ?
  • Airthium : Le moteur de Stirling Airthium est la machine que nous construisons, celle-ci peut à la fois être employée comme pompe à chaleur et comme moteur de Stirling. Le moteur de Stirling est une machine thermique qui peut produire de la chaleur à partir d’électricité (mode pompe à chaleur, COP jusqu’à 3.5) ou de l’électricité à partir de chaleur (mode moteur, rendement thermique>électrique jusqu’à 50%). Nous prévoyons de commencer par produire des pompes à chaleur afin de développer notre technologie et fiabiliser le système avant de nous lancer sur le marché du stockage d’énergie (qui demande un investissement en capital conséquent).
    Notre système de stockage fonctionne de manière hybride : pour le stockage journalier nous utilisons des sels fondus ou du sable comme stockage purement thermique, mais notre avantage principal est le stockage saisonnier (très longue durée), pour lequel nous avons besoin de l’ammoniac (NH3).
    Avec un parc énergétique qui repose sur les renouvelables il existe un risque (quelques fois par an) de baisse importante de la production (plus/peu de soleil et de vent en même temps). Il faut donc palier à ce manque par des capacités de stockage.
    L’ammoniac est un carburant de synthèse, dont la combustion ne génère pas de CO2 et quinze fois moins onéreux à stocker que l’hydrogène. Lors des surplus de production renouvelable nous produisons l’ammoniac à partir d’électricité puis on le stocke dans des réservoirs de grande capacité sous forme liquide (il est facile à stocker et il existe déjà toute une industrie qui maitrise cette technologie). On peut faire le parallèle avec les réserves de gaz naturel qui sont aujourd’hui utilisées. Lorsque la demande dépasse la production, l’ammoniac est brûlé (dans un brûleur développé pour limiter les émissions de NOx) pour réchauffer les sels fondus, qui sont ensuite envoyés vers le moteur de Stirling pour générer de l’électricité.
  • DTG : Est-ce que vous pouvez préciser les grandes lignes de ce système ? Quel serait son rendement ? Quel serait le support du stockage (liquide, gaz?) ? Est-ce que la stabilité du système demande un entretien particulier (maintien de condition de températures / de pression / autre) ?
  • Airthium : Le rendement aller/retour du stockage journalier thermique avoisinera 70% (contre 80-90% pour les batteries lithium-ion, qui se déchargent plus rapidement, utilisent des terres rares, sont onéreuses et présentent un risque d’emballement thermique). Le fluide (sel fondu ou sable) sera stocké dans des cuves isolées thermiquement permettant de minimiser la déperdition de chaleur. Le sel fondu demande un maintien en température minimal afin de ne pas se solidifier. Celui-ci sera garanti par la température minimale des réservoirs, nettement plus élevée que la température de solidification, et lorsque le solaire et le vent feront défaut, par la combustion d’ammoniac..
    Comme évoqué précédemment le support de stockage saisonnier est de l’ammoniac liquide (-33°C sous 1atm) avec un rendement aller/retour électrique proche de 30%. Ses conditions de stockage sont très proches du propane. Le stockage d’ammoniac est déjà une industrie établie et mature, sur laquelle nous pouvons nous appuyer.

Discussion avec le CEO, Andreï Klochko

J’ai ensuite pu discuter avec le CEO d’Airthium, Andreï Klochko, pour approfondir quelques points, principalement autour de la solution de stockage d’énergie. J’ai noté entre [ ] les passages que j’ai repris ou synthétisés.

Le principe du système de stockage d’énergie long terme

  • DTG : La solution de stockage journalier utiliserait donc des matériaux très disponibles pour une efficacité de 70% ? C’est très intéressant, qu’est-ce qui empêche cette solution d’être plus durable ?
  • Andreï Klochko : C’est-à-dire, de stocker plus de 40 heures ?
  • DTG : Oui voilà ..
  • Andreï Klochko : C’est juste trop cher. […] Les stockages d’énergie saisonniers compensent un manque de solaire et d’éolien qui […], 2 à 4 semaines par an, [..] peuvent baisser significativement sur de très grands territoires en même temps. Que ce soit toute la France ou toute l’Europe. Pour ces moments-là, on devra garder des centrales [, actuellement surtout à gaz, qui devront, en plus] rentabiliser leurs coûts fixes avec seulement 1 mois de vente d’énergie. Donc soit, elles vendent leur énergie très cher, soit elles sont subventionnées. [Pour le stockage], tout est histoire de prix au kWh. [Les batteries] lithium-ion, c’est 200$ au kWh en capital […], avec le sel fondu c’est 60$ le kWh et pour l’ammoniac, c’est quelque chose comme 2$ le kWh. Le problème, c’est que ces 2$, c’est un optimum. Si on n’utilise que de l’ammoniac, alors l’équipement de production d’ammoniac coûte trop cher et, à cause du rendement (30%), il faudra un champ solaire [ou éolien] trop gros ; si on ne met que du sel fondu, […] ça coûte trop cher. L’optimum, pour atteindre ces 2$, c’est d’utiliser un mix des deux.

En d’autres termes, le stockage au sels fondus permettrait de lisser la production d’électricité à court terme pour limiter les besoins en puissance de la fabrication d’ammoniac. Le grand avantage de l’ammoniac est qu’il ne coute pas cher à stocker. Au moment de la baisse de production, l’ammoniac est brûlé et transformé en électricité grâce à leur moteur Stirling, par un procédé limitant les émissions d’oxydes d’azote (NOx).

Ensuite se pose la question de la puissance du moteur de Stirling. En effet, il va être utilisé pour lisser la production d’électricité destinée à la production d’ammoniac toute l’année, puis, un mois dans l’année, devoir brûler toute ou une large partie de l’ammoniac stocké.

« L’ammoniac est fabriqué au compte-goutte toute l’année et brûlé un mois dans l’année. Donc il y a une asymétrie de puissance. Si jamais on a 1GW de puissance de sortie, alors le champ solaire fera de 3 à 5 GW crête […] et le brûleur fera quelque chose comme 2GW thermique, mais les centrales de Haber-Bosch + les électrolyseurs feront quelque chose comme 600 MW. [A titre de comparaison, si on ne dépendait que de l’ammoniac, il faudrait au moins 3 GW d’électrolyseurs, en plus d’un champ solaire plus de 2 fois plus grand. Tous ces nombres dépendent bien sûr fortement du cas considéré.] »

Limiter les NOx

Utiliser, en fin de chaine, la combinaison d’un brûleur et du moteur de Stirling est aussi un avantage permettant de limiter les NOx:

  • DTG : Dans votre interview pour l’X, vous parliez de transformer des combustibles renouvelables en électricité. Est-ce que votre solution est plus efficace en cela qu’un système classique (à turbine) ?
  • Andreï Klochko : L’avantage, c’est qu’elle est mutualisée [= le moteur stirling de Stirling est utilisé à la fois dans le stockage court terme par pompage de chaleur, et dans le stockage saisonnier par ammoniac]. [Une force de notre solution,] est qu’il y a une combinaison de petits avantages [qui s’additionnent en un gros avantage]. On aurait pu brûler l’ammoniac dans une turbine, mais ça [n’est pas intéressant], parce que cela produit plein de NOx. Nous on compense ça en ayant un brûleur externe, [appareils qui peuvent être optimisés pour émettre nativement (avant filtration) moins de NOx, ce qui facilite la filtration].

L’arbitrage entre engrais et électricité

  • DTG : Quel est l’arbitrage entre utiliser l’ammoniac produit pour regénérer de l’électricité et l’utiliser pour faire des engrais ?
  • Andreï Klochko : Les deux fonctionnent. Les premières fois que le système sera installé, il sera encore cher, donc il sera installé dans des îles ou en Alaska [par exemple], dans des endroits [reculés]. Plus on va en installer, plus les coûts unitaires vont baisser et au bout d’un moment on sera assez peu chers pour produire les engrais aussi. […] C’est d’ailleurs pour ça qu’on a la proposition de valeur pompe à chaleur avant, pour baisser à fond les coûts du moteur de Stirling et pouvoir l’industrialiser [suivant en cela l’exemple de l’industrie automobile].

L’approvisionnement en eau

Andreï m’a aussi un peu expliqué le bas du schéma du système de stockage Airthium. Le système de stockage d’énergie utilise de l’eau en cycle fermé et est exposé au gel s’il utilise de l’air/eau trop froid (ce qui peut être problématique dans les pays très froids). Pour y parer est prévu un stockage d’eau pour le refroidissement. Il y aurait également des tours de refroidissement, le système diffusant tout de même de la chaleur, surtout par temps chaud. Concernant le besoin d’eau pour la synthèse d’ammoniac, une grande partie est récupérée lors de la combustion d’ammoniac, par condensation de l’eau contenu dans le flux sortant du brûleur.

L’hydrogène est parfois accusé d’être un outil fantastique de greenwashing. En effet, il passe pour un gaz propre, parce qu’il permet de remplacer des usages polluants alors que son utilisation n’émet pas de CO2. Néanmoins, sa production est actuellement très carbonée: 96% de sa production mondiale est polluante, produite à partir de charbon, de pétrole ou de méthane. C’est néanmoins un gaz qui porte d’immenses promesses, notamment grace à la pyrogazéification, qui permettrait de le produire proprement à moindre cout.

Cette accusation pourrait toutefois être parfaitement fondée concernant le projet dont nous allons parler ici : Hystra. Leur site est très transparent, la plupart des données que nous allons utiliser ici en viennent.

Le projet Hystra: de l’hydrogène brun pour le Japon

Le projet hystra consiste à produire de l’hydrogène par gazéification du charbon avec CCS en Australie, puis de l’envoyer sous forme liquide au Japon.

La production d’hydrogène à partir de charbon

La première étape serait la production d’hydrogène au AGL Loy Yang Complex de la vallée du Latrobe. Le démonstrateur a été construit et opéré par J-Power Group et a commencé sa production d’hydrogène le 23 janvier 2021. Il aurait réussi à produire un hydrogène pur à 99.999% le 25 février 2021.

Le procédé mobiliserait 2 tonnes de charbon par jour pour produire 100nM3 d’hydrogène (ou de syngas) par heure. Le gaz serait ensuite transporté par camion au port d’Hastings, à 150km de là.

Selon leur présentation, le CO2 produit lors de la gazéification serait capté, puis aurait vocation à être séquestré dans le sol (CCS = Carbone Capture and Storage). Si c’était le cas, cela donnerait une chose au procédé d’être bas carbone (mais nous allons voir qu’on peut en douter).

Liquéfaction du dihydrogène et expédition au Japon

Le mode le plus compact d’hydrogène actuellement est sous forme liquide. Néanmoins, c’est un procédé très couteux et difficile: il faut faire descendre le gaz à -253°C, soit à peine 10°C au dessus du zéro absolu. Il faut, ensuite, le maintenir à cette température en empêchant la molécule, extrêmement petite, de fuir.

Le transporteur semble devoir être spécifiquement adapté à ce type de transport. Cette technologie, inspirée par les transporteurs de gaz naturel liquéfié, mobiliserait 3 entreprises: Shell, Kawasaki et Iwatani. Le cargo ferait 116 m de long pour 19m de large, un tonnage brut de 8000 tonnes et une capacité de 1,25 millions de litres. L’équipage ferait au plus 25 personnes. Le volume qui peut être ransporté est très limité au regard de la taille du cargo, qui semble n’être conçu que pour transporter le précieux gaz. Il faudra donc compter un aller retour, puisqu’il va probablement revenir à vide (à confirmer).

Le premier de ces navire a été le « Suiso Frontier ». Il aurait été le premier navire au monde à être classifié comme transporteur d’hydrogène liquéfié, après son enregistrement aux autorités japonaises. Conçu au Japon, il est arrivé en Australie le 21 janvier 2022. Malgré un incident le 25 janvier 2022 concernant les systèmes de valves solenoides, il a commencé son premier voyage rempli d’hydrogène liquide vers le Japon le 25 février 2022. (Hystra)

Réception du gaz au port de Kobé

Le trajet d’environ 9000km durerait 16 jours. Il serait enfin, l’hydrogène liquéfié sera débarqué au port de Kobé, au sud du Japon grâce à des terminaux spécifiques.

Des émissions de CO2 terrifiantes

La production d’hydrogène par gazéification du charbon produit environ 20kg de CO2 par kg d’H2 produit. C’est deux fois plus qu’avec le vaporéformage de méthane, le principal mode de production de dihydrogène.

Sans CCUS, un procédé dramatiquement polluant

Sans capture de carbone, le procédé serait dramatiquement polluant. En effet, de base, vous avez la pollution du procédé de production multipliée par les pertes du transport (si vous produisez 1 avec 20, mais que vous en perdez la moitié ensuite, il vous faut au final 40 pour faire 1). A cela s’ajoute le transport d’H2 en camion sur 150km (et la compression ayant été nécessaire, au moins 50 bars). Et encore, c’est sans compter les émissions annexes, comme l’extraction et le transport du charbon, ainsi que la production de tout le matériel mobilisé.

Bref, quelque chose d’assez catastrophique.

Avec CCUS : un bilan discutable

La capture de carbone pourrait largement améliorer ce bilan, en captant plus de 90% du CO2 produit lors de la gazéification. Il ne resterait en princique que les sources de CO2 liées au transport: les camions transportant l’H2 jusqu’au premier terminal, puis celles du navire, ainsi que celles associées à l’équipage.

Néanmoins la CCS n’est pas magique, il y a besoin d’énergie pour la faire fonctionner. D’où vient-elle, sachant que l’électricité australienne vient dans une large mesure du charbon …

Comme nous l’avons dit, je n’ai trouvé aucune mention claire de la présence de CCUS. En outre, il ne me semble même pas que le stockage géologique de CO2 soit une technologie prouvée sur le long terme.

Haffner Energy est une entreprise commercialisant un procédé de production d’hydrogène par thermolyse de biomasse.

L’histoire de la société

Le projet est le résultat d’une ambition constante et ancienne de deux frères, Marc et Philippe Haffner. Ils avaient en effet lancé en 1993 l’entreprise Soten qui aurait déjà visé à transformer de la biomasse en énergie.

La voie de la production d’hydrogène

Vers 2010, la société commença à étudier de nouvelles méthodes de gazéification de biomasse et ils réalisèrent que cela pouvait être une piste intéressante pour produire de l’hydrogène. En 2015, ils avaient déjà déposé 10 brevets sur cette technologie, baptisée HYNOCA. Ils créèrent alors Haffner Energy comme maison mère de Soten, cette dernière étant dédiée au développement de Hynoca. (site haffner-energy)

Haffner Energy: l’introduction en bourse sur euronext growth Paris

La société a réussi son introduction en bourse sur le marché Euronext Growth à début février 2022, augmentant son capital de 66,7 millions d’euros. Les actions ont été proposées dans une fourchette entre 8,00 € à 9,50 € par action.

La grande innovation de Haffner Energy: les modules HYNOCA

Le principal atout de Haffner Energy est actuellement le procédé Hynoca. Le coeur de ce dernier est composé de deux parties centrales : la thermolyse (rq: une pyrolyse / pyrogazéification sans oxygène si j’ai bien compris) en l’absence d’oxygène et d’air à 500°C, qui co-produit du biochar, puis le réformage / vapocraquage du gaz produit. Il semble que ce procédé libère aussi un syngaz qu’ils appellent « hypergaz », qui aurait une teneur énergétique particulièrement élevée (Pouvoir calorifique inférieur > 9MJ/m3). Ensuite, on retrouve les procédés classiques (réduction catalytique ou Water Gas Shift, puis purification).

Hynoca serait vendu sous forme de modules traduisant cette succession d’étapes : un premier étage de thermolyse, un espace de raccordement, puis une unité de vapocraquage. Au dessus, l’unité de purification extrait l’hydrogène pur. Un module de 40 pieds (= 16 mètres) produirait 15 à 30kg/h de dihydrogène.

Ses coûts de production d’hydrogène seraient compétitifs, « coûts de production d’hydrogène très compétitifs, compris entre 1,5 et 3 €/kg
(À 30 bars de pression avec un fonctionnement de 8 200 heures par an) ». Un kg d’hydrogène produit par ce procédé capterait à travers la production de biochar, l’équivalent de 16kg de CO2, ce qui donnerait au procédé une empreinte carbone négative : – 12kg net ! (site haffnerenergy-finance)

[Réserve : je dois encore approfondir la différence entre thermolyse et pyrogazéification, les deux procédés semblent très similaires]


McPhy est une entreprise française fondée en 2008 ayant d’abord développé une solution de stockage d’hydrogène par hydrure de magnésium, mais s’orientant davantage vers la production d’électrolyseurs et de stations à hydrogène.


Histoire de McPhy

McPhy Energy a été fondée à La Motte Fanjas en 2008. Initialement, elle développait un système de stockage d’hydrogène sous forme d’hydrures métalliques en partenariat avec le CEA et le CNRS. Le premier réservoir, d’une capacité de 1kg d’H2 a été livré le 29 mars 2010 au CEA-Liten.

Elle s’est néanmoins réorienté vers les électrolyseurs et les stations à hydrogène. En 2013, la startup acquiert Piel, un concepteur d’électrolyseurs alcalins. En 2014, elle installe une usine de production d’électrolyseurs en Toscane. Elle lance une offre d’électrolyseurs PEM en 2017.

La jeune entreprise est introduite en bourse en 2014 et EDF en achète 21.7% en 2018. Elle augmente son capital de 6.9M€ en 2019, puis de 180 millions d’euros en 2020, parmis lesquels 30 et 15 millions d’euros viennent respectivement de Chart International Holdings et Technip Energies.

Actualités de projets

  • Le 20 mai 2021, McPhy annonça pré-selectionner le site de Belfort, « au cœur de l’écosystème hydrogène européen et de la Vallée de l’Energie », pour installer sa « Giga Factory ». Cette usine devrait permettre de passer la production d’électrolyseurs alcalins à l’échelle, ce qui pourrait radicalement diminuer leur coût unitaire. La capacité de production visée est 1GW/an. Son déploiement représenterait 30 à 40Mn€ est néanmoins « conditionné notamment à l’obtention d’un financement dans le cadre de l’IPCEI«  (Résultats financiers 2021).
  • Le 22 juin 2021, ils ont annoncé l’installation d’un nouveau site industriel à Grenoble permettant de passer leur capacité de production de stations à hydrogène de 20 à 150 unités par ans. Elle devait être opérationnelle en mars 2022.
  • Le 7 septembre 2021, ils ont annoncé fournir les stations à hydrogène pour le projet R-Hynoca, en partenariat avec R-GDS (énergie strasbourgeoise) et Haffner Energy.
  • Le 30 septembre 2021, McPhy a signé un accord avec Enel Green Power pour la fourniture d’un électrolyseur alcalin pressurisé de 4 MW de la gamme Augmented McLyzer en à Carlentini, en Italie, pour fournir un système Power-to-Gas.
  • Le 30 septembre 2021, ils ont signé un mémorandum d’accord de recherche pour accélérer l’innovation autour de la recherche avec General Eletric, GRT Gaz, l’Ineris et le réseau des universités de technologie françaises (UTBM, UTC et UTT).
  • Le 21 décembre 2021, un consortium de 13 entreprises dont McPhy a été sélectrionné pour porter le projet GreenH2Atlantic à Sines (Portugal). L’entreprise française concevra et fournira un électrolyseur « Augmented McLyzer » de 100MW, avec une capacité de production de 41 tonnes H2/jour.
  • Le 17 janvier 2022, la startup a signé un contrat avec Eiffage Énergie Systèmes – Clemessy pour équiper un site belfortain d’un électrolyseur de 1MW et d’une station de recharge à hydrogène 350 bars (800kg/j) desinée à ravitailler une flotte de bus à hydrogène, le réseau « Optymo ».
  • Le 25 avril 2022, McPhy a annoncé un accord avec Hype (qui commercialise actuellement essentiellement des taxi à hydrogène) dans lequel l’entreprise souscrivait à 12M€ d’obligations convertible et concluait un accord cadre prévoyant le déploiement d’au moins 100 stations à hydrogène, dont 50% seraient attribués à McPhy et 15 à 25MW d’électrolyseurs alcalins. Un premier électrolyseur de 2MW et une stations à hydrogène sont déjà décidés pour la région parisienne.

Produits commercialisés par McPhy

Des électrolyseurs pour produire de l’hydrogène

L’entreprise se prévaut d’une avance « dans l’électrolyse alcaline pressurisée« . Elle propose trois gammes:

  • Piel, de 0.4 à 10 Nm3/h et de 1 à 8 bar
  • McLyzer
    • « Small line »: 20 Nm3/h à 30 bar
    • McLyzer 100-30, 100Nm3/h à 30 bar, avec une puissance de 0.5MW
    • McLyzer 200-30, 200Nm3/h à 30 bar, avec une puissance de 1MW
    • McLyzer 400-30, 400Nm3/h à 30 bar, avec une puissance de 2MW
    • McLyzer 800-30, 800Nm3/h à 30 bar, avec une puissance de 4MW. C’est le « core-module » de l’Augmenter McLyzer
  • Augmented McLyzer
    • Il s’agit d’une gamme sur mesure conçue pour des installations à grande échelle pour l’industrie, comme la raffinerie, la chimie, la sidérurgie, etc.

Selon McPhy, « environ 5,5 kWh sont nécessaires pour produire 1m3 de gaz ». A un autre moment, il donnent le chiffre de 4.5kWh/Nm3 (Pour le Mclyzer small line). Le dihydrogène a une masse volumique de 0.08988g/L à des conditions normales de température et de pression. On aurait donc 4.5kWh pour 89.88gH2, soit 50.06kWh/kgH2 (et 61.19kWh/kgH2 pour 5.5kWh/Nm3). Il est intéressant de regarder le rendement de leur technologie.

Stations de recharge d’hydrogène

Leurs stations à hydrogène font en principe 10m² au sol, sont « plug&play » (= faciles à installer) et peuvent être combinés avec des électrolyseurs.

  • Le starterkit : la station McFilling 20-350, délivrant 20kgH2/jour à 350bars,
  • Les stations à hydrogène de taille large
    • McFilling 350 : 200 à plus de 1300kgH2/jour à 350bars pouvant délivrer plus de 100kg en une heure.
    • McFilling 700: 200 à 800 kgH2/jour à 700 bars pouvant délivrer plus de 100kg en trois heures.
    • McFilling Dual Pressure: 200 à 800 kgH2/jour à 350 et 700 bars pouvant délivrer plus de 100kg en trois heures.
  • Les stations « Augmented McFilling » destinées au transport lourd, à partir de 2 tonnes d’hydrogène par jour.

Autres articles intéressants:

  • Un article présentant la technologie de stockage par hydrures de magnésium développée en 2010: http://www.enerzine.com/la-solution-de-stockage-dhydrogene-sous-forme-solide/8477-2010-04

Hydrogenics était une entreprise développant des électrolyseurs et piles à combustibles, notamment pour des solutions de « power to gas ». Elle a été rachetée par Cummings et Air Liquide en septembre 2019.


L’histoire de Hydrogenics

En 1988 est né Traduction Militech Translation, qui est devenu en 1990 Hydrogenics. Elle développe les technologies de pile à combustible depuis 1995.

Elle acquiert respectivement EnKAT GmbH et Greenlight Power Technologies (pile à combustible) et Stuart Energy (électrolyseurs alcalins) en 2002, 2003 et 2004. L’entreprise a développé un partenariat avec une entreprise de télécommunications, Commscope en 2010. Cette dernière a notamment investit 8.5 millions de dollars.

Elle a développé de nombreux projets, notamment des démonstrateurs de power-to-gas et des stations à hydrogène.

L’entreprise a été acquise par Cummings à 81.4% et par Air Liquide à 18.6% le 9 septembre 2019 pour un total de 290Mn$.

Les produits autour de l’hydrogène

Actuellement, le site « http://www.hydrogenics.com » renvoie vers le site de Cummings. Toutefois, en parcourant l’archive du site, on peut retrouver ce que proposait l’entreprise. On le retrouve sur cette page:

  • Electrolyseurs PEM et alcalins pour applications industrielles et stations de recharge.
  • Piles à combustibles pour véhicules à hydrogène (bus de transit urbains, des flottes commerciales, des utilitaires ou des chariots élévateurs)
  • Piles à combustible pour applications stationnaires
  • « Power-to-Gas »

On apprend pas mal de choses intéressantes en lisant leurs fiches produits.

Des électrolyseurs alcalins ou PEM

Commençons par le modèle « HySTAT™10 – INDOOR« . Il s’agit d’un électrolyseur alcalin produisant entre 4 et 10 Nm3/h (= « normo-mètres » et non « nanomètres »), ce qui correspondrait à 8.6 à 21.5 kg/ jour. La pression de sortie serait de 10bars (30 en option). Sans « HPS » (Hydrogen Purification System) la pureté serait de 99.9% contre 99.998% avec. Il y aurait même une option pour aller au-delà de 99.999%. Il consommerait 4.9 kWh/Nm3 et sa puissance serait de 140KW.

On voit immédiatement apparaitre la problématique de la pureté de l’hydrogène: certaines applications comme l’électronique demandent qu’elle soit extrême: < 2ppm !

HySTAT™60 – OUTDOOR pourrait, quant à lui, produire 24 à 60Nm3/h, soit 52 à 130kg par jour. Sa puissance maximale serait 515KW.

Les deux semblent se présenter sous la forme d’un container, d’un volume de l’ordre de 15 tonnes. Certains modèles peuvent être combinés à un compresseur pouvant compresser le gaz à 150 ou 200 bar.

Solutions « power to gas »

Ils ont visiblement lancé de nombreux projets « power to gas ». On observe que beaucoup prévoient d’utiliser des moteurs à combustion pour produire de l’électricité et non des piles à combustibles, qui ont pourtant un rendement plusieurs fois supérieur …

  • Galice, Espagne: un HySTAT60 serait couplé à 24 éoliennes pour que l’hydrogène soit stocké, puis brulé par un moteur à combustion pour produire de l’énergie. J’imagine pour absorber les pics de production ?
  • Port Talbot, Pays de Galles. 20kW de solaire / éolien alimenteraient un HySTAT10, un système de stockage, une pile à combustible HyPM 12kW.
  • Meckl-Vorpommern, Allemagne. Utilise une ferme éolienne de 140MW pour alimenter 1MW d’électrolyseurs, couplé à un système de compression et stockage. L’électricité est produite par un moteur à combustion.
  • Stuttgart, Allemagne. Un HySTAT60 récupèrerait le CO2 d’une centrale à biogaz pour méthaniser l’hydrogène. Je ne comprends pas: ca fait une boucle, les pertes d’efficiences en moins. Ils utilisent de l’électricité pour faire de l’H2, pour le méthanifier, puis en faire de l’électricité.
  • Falkenhagen, Allemagne. Une installation de 2MW d’électrolyseurs (6 HySTAT60) et un compresseur aurait pour objet d’absorber les surplus d’énergie et injecterait l’H2 dans les canalisations de gaz.
  • Puglia, Italie. 1MW d’électrolyseur produirait 200Nm3 d’hydrogène, qui pourrait être stocké dans un stockage d’ « hydrogène solide » (= sans doute des hydrures d’hydrogène) de 39MWh.
  • Herten, Allemagne. Un système de piles à combustible de 50kW et un HySTAT30 pour absorber le surplus d’énergie.

Ils proposent également des stations de recharge d’hydrogène et on fait une vingtaine de projets, mais je ne détaille pas.

Ballard Power Systems, une entreprise canadienne, est un des grands acteurs de la production de piles à combustibles à membrane échangeuse de protons (PEMFC). Elle se spécialise dans la production de PAC forte puissance, destinée à la mobilité lourde (bus, trains, bâteaux …).


Histoire de Ballard Power Systems

Ballard Power Systems a été fondée en 1979 par Geoffrey Ballard, Keith Prater et Paul Howard pour concevoir des batteries au lithium de grande capacité. Toutefois, ils se sont réorienté en 1983 vers le développement de piles à combustibles à membranes échangeuses de proton. Après la conception d’une pile de 5kW en 1990, les choses s’accélèrent avec une joint venture entre Ballard, General Motors et le ministère de l’énergie des Etats-Unis en 1991, le développement [début ou fin ?] d’une pile de 90kW pour les bus à hydrogène en 1992, puis un partenariat avec Daimler-Benz, ainsi que l’introduction en bourse en 1993.

En 1997, l’entreprise fonde avec Daimler et Ford une joint venture, l’ Automotive Fuel Cell Cooperation (AFCC), pour développer des piles à combustibles adaptées aux automobiles. A partir de 1998 ont débuté plusieurs tests de bus à hydrogène alimentés grâce aux piles à combustible Ballard:

  • Trois bus à Vancouver et Chicago en 1998.
  • 30 bus à hydrogène sur une dizaine de cités européennes, plus 3 à Perth (Australie) et 3 à Beijing (Chine).

En 2008, Ballard vend ses parts de l’AFCC à Daimler et Ford, se focalisant sur la conception de piles à combustible pour la mobilité lourde.

En 2018, Weichai Power a acquis, dans le cadre d’une coopération stratégique, 19.9% de Ballard Power Systems pour 163 millions de dollars. Les deux entreprises ont également conclu une joint venture possédée à 51% par Weichai pour alimenter le marché chinois en PAC. (source)

Produits de Ballard Power Systems

Ballard Power Systems développe des piles à combustibles PEMFC destinées à la mobilité lourde allant de 30kW à 200kW.

Au total, Ballard aurait produit 850MW de PEMFC.

Ballard Power Systems en pratique

Lorsqu’on étudie les applications de l’hydrogène, Ballard est sans doute l’un des noms qui revient le plus. Ils équipent plusieurs lignes de bus à hydrogène: des bus Solaris, Eldorado (Californie), Van Hool, Wrightbus et New Flyer. Ils ont conclu d’autres partenariats, par exemple avec Siemens et CRRC (Chine) pour développer des PAC de 200kW adaptées au transport sur rail, ainsi qu’avec ABB, pour développer une PEMFC d’1MW adaptée aux applications marines. (source)

Parmi les autres entreprises sur l’hydrogène dont nous avons parlé, on peut compter:

  • Hyvia : une joint-venture entre Renault Group et Plug Power pour développer des véhicules lourds à hydrogène et des stations à hydrogène.
  • Le groupe Renault: l’un des principaux constructeurs automobiles, qui développe des utilitaires à hydrogène.
  • Genvia : une joint-venture entre le Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA) Liten, Schlumberger, Vicat, Vinci Construction et la région Occitanie pour développer un électrolyseur haute température réversible.

Hyvia est une joint-venture rassemblant Renault Group (automobile) et Plug Power (spécialiste de l’hydrogène) pour développer des véhicules lourds à hydrogène et des stations à hydrogène.


L’un des principaux intérêts de l’hydrogène est de permettre d’électrifier des usages pour lesquels les moyens « directs » (batterie pour le stockage et résistance pour la chaleur) ne fonctionnent pas. L’un de ces secteurs est (ou pourrait être) la mobilité lourde, pour laquelle le poids des batteries serait trop important pour être viable. On voit donc se développer des projets de mobilité lourde à hydrogène.

C’est dans cet axe que se situe Hyvia.

Les produits Hyvia : poids-lourds et stations hydrogène

Fondée par Renault Group et Plug Power Inc. (solutions hydrogène) le 3 juin 2021, la coentreprise (joint-venture) développe des camio,s à hydrogène, des bus à hydrogène et des solutions clé-en-main (station hydrogène).

L’entreprise a développé les prototypes de trois véhicules en 2021:

  • Renault Master Van H2-TECH : Un fourgon pouvant charger 12 m³ de marchandises et une autonomie allant jusqu’à 500 km.
  • Renault Master City Bus H2-TECH : un minibus urbain pouvant transporter 15 passagers, équipé d’une pile à combustible de 30kW, d’une batterie de 33kWh et de 2 réservoirs d’1.5kg d’H2 à 700bars (ce qui donnerait une autonomie d’environ 300 km).
  • Renault Master Châssis Cabine H2-TECH : Un poids-lourd (chassis) (pouvant tracter un container de 19 m³) équipé pile à combustible de 30kW, d’une batterie de 33kWh et d’un réservoir de 4.5kg d’H2 à 350 bars (ce qui donnerait une autonomie de 250km).

L’entreprise développe également une station de recharge.

Hyvia : une activité française à destination de l’Europe

Son activité serait entièrement située en France: la R&D et le siège social seraient à Villiers Saint-Frédéric, l’assemblage des piles à combustible et de la station de recharge à hydrogène se ferait à Flins, les moteurs électriques seront produits à Cléon, l’usine de production des Renault Master est à Batilly et l’usine PVI (Renault Vehicle Innovation) à Gretz Amainvilliers se chargerait d’intégrer la pile à combustible au véhicule.

David Holderbach, CEO de HYVIA, ambitionne de prendre « 30 % de part de marché des véhicules utilitaires légers à hydrogène en Europe à 2030. » (Hyvia)


Pour aller plus loin:

  • https://fr.media.renaultgroup.com/actualites/hyvia-la-nouvelle-voie-vers-la-mobilite-hydrogene-verte-1eea-e3532.html
  • https://fr.media.renaultgroup.com/actualites/renault-group-et-plug-power-creent-hyvia-coentreprise-dediee-a-la-mobilite-hydrogene-3f46-e3532.html

Hysilabs est une start-up développant un procédé permettant de transporter l’hydrogène sous forme liquide, ce qui résoudrait l’un des principaux problèmes de l’hydrogène: son transport et stockage.


L’une des plus grandes difficultés de l’hydrogène est son stockage. Dans des conditions « normales », 1kg d’hydrogène occupe 11 000 litres … De plus, le dihydrogène est la plus petite molécule ET elle est très corrosive pour l’acier. Bref, un casse-tête infernal.

Actuellement, pour le transporter, on utilise surtout la compression (350-700 bars pour la mobilité hydrogène) ce qui consomme beaucoup d’énergie (>10% du potentiel énergétique de l’hydrogène transporté), demande des réservoirs spécifiques très lourds et emporte des risques. Plus rarement, on utilise, la liquéfaction, qui est plus dense, mais doit être maintenue en dessous de -253°C et consomme énormément d’énergie (>20%). Ces difficultés rendent impératives le développement d’alternatives.

Technologie Hysilabs

Fondée par Pierre-Emmanuel Casanova et Vincent Lôme en 2015 à Aix-en-Provence, HySiLabs propose de stocker l’hydrogène dans une solution de silicium (nommée « HydroSil) sous forme d’hydrures. Contrairement à McPhy et aux concepteurs du Powerpaste, HySiLabs a choisi les hydrures de silicium et non les hydrures de magnésium.

Ce procédé serait

  • Non carboné
  • Inoffensif pour l’environnement (ce qui le distingue notamment de l’ammoniac NH3)
  • stable, pouvant contenir l’hydrogène plusieurs jours ou mois et être beaucoup réutilisé.

Leurs concurrents seraient Hydrogenious et Chiyoda, mais le vecteur proposé par ces derniers serait carboné et toxique (Source: Les Echos, à vérifier).

HydroSil pourrait transporter 8.7% de sa masse en hydrogène. Un camion pourrait ainsi transporter 7 fois plus d’H2 qu’un camion d’hydrogène sous haute pression à 200 bars.

Histoire et financement

L’entreprise a levé 2 millions d’euros et été lauréate du prix EDF Pulse catégorie Smart City en 2018. Elle aurait également reçu 4 millions d’euros de la Commissions européenne. Anticipant une levée plus importante, elle projetait en 2020 l’installation d’une usine à Fos. Cette levée semble encore en cours, prévue pour 2022. Ils prévoient d’enregistrer Hydrosyl au REACH en 2023 et de l’utiliser pour la première fois (pour alimenter un bâteau à hydrogène) en 2024. (Source)

Pour aller plus loin, vous pouvez consulter notre article sur le stockage d’hydrogène.

Le Commissariat à l’Energie Atomique a publié en mai 2012 un dossier de presse présentant les technologies de l’hydrogène recherchées par cet organisme nommé « Les technologies de l’hydrogène au CEA« .

Je vous en fais ici une courte synthèse.

Production d’hydrogène

A l’époque, la France consommait 900 000 tonnes d’hydrogène, principalement pour la chimie et le raffinage, essentiellement produit par vaporéformage du méthane, dont le cout avoisinait les 1,5 €/kg d’H2 à la production et qui libère environ 10kg de CO2 par kg d’hydrogène produit. Les procédés bas carbone résultent de « la décomposition de la biomasse ou de l’eau ». Le CEA n’étudiait pas la première (ils font sans doute référence à la pyrogazéification ?) car « celle-ci est prioritairement dédiée à la production de biocarburants ». Ils se concentraient sur l’électrolyse.

Les émissions de celle-ci dépend de l’origine de l’électricité utilisée. Ainsi, par kg d’H2 produit, les émissions de CO2 sont de 20kg avec le mix européen, 5kg avec le mix français et 0.3kg avec une énergie d’origine 100% nucléaire et renouvelable. Elle coutait entre 5 et 30€/kg H2 produit. Son prix aurait pu descendre à 3€/kgH2 avec des économies d’échelle importantes et une électricité à 40€/MWh.

Ils annoncent l’arrêt d’une technologies d’électrolyse, celle des « cycles thermochimiques » (aujourd’hui abandonnée par un peu tout le monde).

L’institut privilégie l’électrolyse haute température, fonctionnant entre 700 et 800°C (mais n’ayant besoin que de monter initialement à 200°C, la réaction étant exothermique), estimant pouvoir atteindre un rendement de 3kWh pour 90g H2, contre 5kWh pour les électrolyseurs classiques équivalents (PEM et alcaline), sachant que l’électricité représenterait 80% de ce cout. Ils avaient déjà réussi à mettre au point en 2011 un prototype avec un rendement de 77% à 700°C et un taux de dégradation de 2% pour 1000 heures. Cette technologie a été prouvée en 2021 et est en cours d’industrialisation par Genvia.

Le CEA serait partenaire du projet PUSHY, piloté par McPhy, couplant de l’électrolyse avec des centrales de micro-hydraulique. L’objectif était de « capter des marchés solvables pour l’hydrogène vert, à un tarif compétitif, ce qui permettra de déployer sur le territoire un premier maillage d’infrastructures hydrogène rentables. »

Enfin, ils explorent l’idée de combiner CO2 et hydrogène pour créer des hydrocarbures. Ce serait « particulièrement intéressant dans le cas où l’on dispose de l’électrolyse à haute température ».

L’hydrogène comme carburant

Le CEA travaille également sur les piles à combustibles (PAC, ou Fuel Cell, FC). Elle privilégie les piles à membranes échangeuses de protons (Proton exchange membrane fuel cell, PEMFC) et les piles à oxydes solides (Solid oxide fuel cell, SOFC). Les premières sont utilisées dans la mobilité hydrogène et les seconds seraient plus intéressantes « pour les applications stationnaires de cogénération ».

Il y aurait plusieurs exemples montrant que les PAC pourraient être concurrencielles sur des marchés de niche:

  • L’alimentation des zones non raccordées à un réseau électrique, ce que propose Axane, une filiale d’Air Liquide à destination des relais télécoms isolés.
  • Le programme ENE-FARM au Japon, qui consiste à installer 70 000 micro-unités de cogénérations.
  • Hypulsion, coentreprise entre Air Liquide et Plug Power, cible le marché des chariots élévateurs, pour lesquels « l’utilisation de piles à combustible est concurrentielle par rapport aux batteries électriques »

Usages mobilité : les piles à membrane échangeuse de proton (PEMFC)

Le CEA a travaillé avec PSA Peugeot Citroën, aboutissant en 2009 à un prototype de voiture à hydrogène FISYPAC (« 307 Epure »). La PAC développée par le CEA aurait été très compacte (1.4kW/kg et 2.1kW/L). Les batteries sont importantes pour ces applications de transport, les variations d’intensité trop fortes, notamment au démarrage, réduisant leur durabilité. Les axes d’amélioration des PEMFC sont:

  • L’optimisation des assemblages membrane-électrodes (AME). Le platine des catalyseurs représenterait 25% du prix de la PAC, l’un des enjeux est donc d’obtenir les mêmes performances avec moins de ce métal. La membrane est actuellement réalisée en Nafion, qui ne supporte pas les températures supérieures à 80°C, or aller au delà pourrait améliorer les performances. Les chercheurs travaillent donc sur des membranes tolérant des températures plus élevés.
  • Diminution du volume des plaques bipolaires
  • La modélisation / simulation de la pile en condition réelles d’utilisation

Usages stationnaires : les piles à oxyde (SOFC)

Les SOFC ont la particularité d’avoir des rendements et des températures relativement élevés. Elles pourraient même utiliser directement des gaz de synthèse (normalement, on y ajoute des opérations de Water-gas-shift et purification pour le transformer en hydrogène pur utilisable). Les progrès visent essentiellement deux axes :

  • Limiter le coût et la dégradation des SOFC
  • Permettre l’alimentation de la pile avec des gaz variés (gaz naturel ou gaz issu de la biomasse)

Le stockage d’hydrogène

Le problème avec le stockage d’hydrogène est sa densité: à « 1 bar, 20°C, l’hydrogène occupe un volume de 333 litres/kWh et, dans les mêmes conditions, l’essence occupe 0,1 litre/kWh. »

Le stockage stationnaire : les hydrures

Pour le stockage stationnaire, le CEA favorise les hydrures métalliques, qui peuvent se charger et décharger d’hydrogène de manière réversible, commedes batteries. La densidé serait de 0.25l/kWh. L’absorption libère de la chaleur et la désorption en demande. Le CEA travaille avec McPhy sur le sujet. Ils ont testé des hydrures de magnésium réagissant « avec l’hydrogène à un peu plus de 300°C pour une pression de 10 bars » et réussi, avec un rendement de 97%.

Le stockage mobile

Le problème des hydrures est leur poids. Toutefois, elles peuvent aussi être utilisé lorsque ce n’est pas un critère rhédibitoire, comme pour les engins agricoles ou les bâteaux. Leur tepmpérature de fonctionnement est moins élevée, devant être compatibles avec les PEMFC. Un prototype de réservoir contenant ~2kg d’H2 a été testé en 2011 pour les tracteurs.

Le stockage sous forme de gaz sous presion est une voie mature. Le CEA a développé des réservoirs hyperbare pouvant résister à une pression de 700 bars en conservant une durée de vie supérieure à 15 000 cycles de remplissages, son étanchéité et sa résistance. « Avec cette technologie, l’hydrogène occupe un volume de 0,47 litre/kWh. »

Le stockage liquide est attractif, pouvant atteindre une densité de 0,38 litre/kWh, mais pose des problèmes importants : « la liquéfaction est très gourmande en énergie et la sécurité des réservoirs est plus difficile à assurer (phénomène de boil-off2 et fragilité des réservoirs). »

Genvia est une entreprise créée par le CEA, Schlumberger et leurs partenaires pour industrialiser la technologie de production d’hydrogène d’électrolyse à oxyde solide haute performance (= électrolyse haute température) développée par le CEA.


Le Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA) Liten de Grenoble a développé une technologie d’électrolyse à oxyde solide haute performance (= électrolyse haute température) pouvant atteindre une efficacité de 99%.

Voici le site internet de l’entreprise.

Une électrolyse à oxyde solide innovante

Genvia va exploiter une technologie de production d’hydrogène par électrolyse à oxyde solide / haute température qui atteindrait un rendement de 99% et pourrait fonctionner à la fois comme électrolyseur et comme pile à combustible (ce qui en ferait un appareil idéal pour gérer les variations de courant). L’objectif serait de proposer des électrolyseurs permettant de produire de l’hydrogène vert à 2€ le kilogramme.

Nous l’avons déjà présentée dans notre article sur l’électrolyse haute température.

Genvia en pratique

Avoir une belle technologie, c’est bien, mais encore faut-il l’industrialiser et la commercialiser. Genvia rassemble justement parmi ses fondateurs des organisations importantes qui pourront répondre à ces challenges.

Les fondateurs

La société Genvia, née le 1er mars 2021, a été fondée par plusieurs organisations :

Les dirigeants de Genvia

L’équipe de Genvia

C’est Florence Lambert qui, après avoir dirigé le CEA Liten de Grenoble (qui a élaboré la technologie), a pris la tête du projet Genvia.

Elle sera accompagnée de

Le conseil d’administration

Le conseil d’administration, pour sa part, sera constitué de :

  • François Jacq, Administrateur général du CEA et Philippe Stohr, directeur des énergies du CEA
  • Ashok Belani, vice-président exécutif des nouvelles énergies, et Olivier Peyret, président de la France, Schlumberger
  • Guy Sidos, président et directeur général, Vicat
  • Pascal Baylocq président de Geostock (VINCI Construction)
  • Stéphane Péré, directeur général AREC Occitanie

Les installations: Genvia à Bézier

L’entreprise va d’abord installer une ligne pilote dans une usine Schlumberger à Béziers en 2021. Plus précisément, l’entreprise se situe :

Plaine Saint-Pierre, CS 10620, Avenue Joseph Lazare

34535 Béziers Cedex

Elle prévoit de développer une gigafactory de production d’électrolyseurs à Bézier en 2025, ce qui amènerait près de 500 embauches d’ici 2030.

Les actualités de Genvia

Lors d’une visite à l’usine de Bézier le 16 novembre 2021, Emannuel Macron a annoncé un soutien public à hauteur de 200 millions d’euros par le biais d’un « Important Projet d’Intérêt Commun Européen » (IPCEI). Au total, le plan « France 2030 » allouerait 2 milliards d’euros seraient consacrés, globalement, à la filière hydrogène, en plus des 7 milliards annoncés par Brunos Le Maire en 2020.


Pour aller plus loin

Le rapport de l’IEA « Future of hydrogen » est une synthèse extraordinaire des données pratiques sur les perspectives de la production et de l’utilisation d’hydrogène.


Beaucoup de choses sont dites sur l’hydrogène, mais cela reste souvent très ponctuel: telle nouvelle application, telle possibilité … Au contraire, l’IEA nous propose dans son rapport « Future of hydrogen » une synthèse monumentale tournée vers l’action pratique.

J’adore ce genre de travaux parce que, même si on peut les critiquer, on apprend énormément en les lisant. Le rapport faisant tout de même 200 page, je vais vous en présenter l’essentiel.

Le rapport aborde plusieurs sujets :

  • La production d’hydrogène, qu’elle soit dédiée ou comme coproduit.
  • Les challenges et solutions pour stocker et transporter l’hydrogène.
  • Les utilisations actuelles et potentielles de l’hydrogène.
  • Les perspectives d’actions publiques à court et moyen termes.

IEA, « Future of hydrogen », 2019, https://www.iea.org/reports/the-future-of-hydrogen

Production d’hydrogène

L’IEA nous propose un état des lieux de la production d’hydrogène. Il distingue la production dédiée d’hydrogène, c’est-à-dire dont c’est l’objectif premier, de la production où l’hydrogène est un coproduit.

Ce qu’il y a de fantastique dans ce bilan, c’est que les auteurs vont dans le détail et montrent, par exemple, que l’intérêt des différents procédés varie en fonction du lieu de la localisation.

Production spécifique d’hydrogène

La production « spécifique » d’hydrogène (cad pas comme un produit secondaire) est en 2019 d’environ 70 million de tonnes. Elle est principalement produite par vaporéformage du méthane (SMR) ou gazéification du charbon.

[NdA: Vous pouvez également consulter notre article sur la production d’hydrogène]

Les principales sources

Actuellement, l’hydrogène est quasi-exclusivement produit à partir de carburants fossiles avec des procédés produisant énormément de gaz à effets de serre.

76% de la production serait produite à partir de gaz naturel et 23% de la production viendrait du charbon, presqu’exclusivement par la Chine

L’électrolyse ne représenterait que 0.1% de la production dédiée, principalement à destination de marchés requérant un H2 de haute pureté, comme l’électronique les polysilicones.

Les procédés de production d’hydrogène

Il y aurait plusieurs manières d’extraire l’hydrogène des énergies fossiles.

Il y aurait le réformage, qui pourrait se faire de 3 façons:

  • Le vaporéformage (méthane et, beaucoup plus rarement, pétrole liquide et naphte), utilisant de la vapeur comme oxydant et source d’hydrogène. Le vaporéformage de méthane (Steam Methan Reforming = SMR) est de très loin le principal mode de production d’H2.
  • L’oxydation partielle (charbon ou pétrole lourd), utilisant l’oxygène de l’air comme oxydant.
  • Une combinaison des deux appelé « authothermal reforming » (ATR)

La gasification permet de produire de l’HE à partir de charbon ou de biomasse.

La production d’hydrogène libère 10 kg de CO2 pour un kg H2 produit à partir de méthane et 19kg à partir de charbon. Globalement, la production d’hydrogène émet 830 millions de tonnes de CO2 par an et mobilise 6% du total de gaz naturel et 2% du charbon utilisés dans le monde. Notez que ces émissions sont en partie (130 MtCO2) capturées et utilisées dans la production de fertilisant à base d’urée. Ce CO2 serait néanmoins de nouveau libéré lors de l’application. (p.38)

Enfin, il y a évidemment l’électrolyse de l’eau, qui produit de l’hydrogène à partir d’eau et d’électricité. Il y en a plusieurs types : électrolyse alcaline, électrolyse PEM et SOEC (Solid Oxyd Electrolyzer cell). Si toute la production actuelle de l’hydrogène se faisait par électrolyse, elle consommerait 3 600 TWh, soit plus que la consommation totale de l’Union Européenne. (p.43)

p.44

De nombreux projets d’électrolyseurs de haute capacité (>10MW) sont en train d’être développés. (p.45)

Une piste de production est la séparation du méthane (methane splitting). Développée depuis les années 90, elle ne produit pas de CO2, mais du carbone solide (dit carbone noir, « Carbon black »), utilisé notamment pour faire des pneus, dans l’impression et les plastiques. (p.41)

En outre, la production de H2, notamment en SMR et SOEC, pourrait profiter de la chaleur produite par des réacteurs nucléaires. (p.46)

Prix de la production spécifique d’hydrogène

Prix de l’électrolyse

Actuellement, la principale variable du prix de l’électrolyse de l’eau est le prix de l’électricité et l’échelle. En effet, les simples économies d’échelle pourraient diviser son coût/kg par trois.

Le cout de production d’un kg d’H2 par électrolyse diminuerait à 1.6$ avec un prix du MWh de 20$ et à 2.1$ avec un prix du MWh de 40$. A 60$ le MWh, il irait vers 2.6$. (p.47) Le prix pourrait descendre en dessous de 1.6$/kg dans certaines régions où les ENr sont particulièrement productives, comme la Patagonie et le Moyen-Orient.

Le prix de la capture de carbone (Carbon Capture Utilisation and Storage)

La capture de carbone permet de récupérer plus de 90% du CO2 et pourrait être une piste de production d’H2 décarboné très intéressante.

On retrouve l’argument développé par William J.Nuttall et Adetokunboh T.Bakenne dans Fossil Fuel Hydrogen, Technical, Economic and Environmental Potential (éditions Springer, 143 pages)

CCUS en vaporéformage de méthane

La capture de carbone permet de récupérer 90% ou plus du CO2 produit. Voici par exemple pour le vaporéformage de méthane:

p.40

Des usines de SMR représentant 0.5MtH2/an sont déjà équipé de CCUS.

Pour les usines de production « marchande » (c’est à dire dont la production d’hydrogène n’est pas intégrée à la production de méthanol ou d’ammoniaque), la capture du CO2 au moment du gas de synthèse permet de récupérer 60% du CO2 et représente un prix 53$/tCO2 capturée.

La capture au niveau du gaz d’émission (flue gas) augmente la réduction à >90% mais représente 80$/tCO2 capturée pour la production marchande et 90-115$/tCO2 pour la production intégrée (ammoniaque, urée, méthanol).

Voici l’estimation du prix du SMR avec et sans CCUS selon la région :

p.42

[NdA: La CCUS ne représenterait, ainsi, pas une hausse énorme du prix de production de l’H2 (+50%). Cette différence pourrait être rapidement comblée avec une augmentation du prix du carbone.]

L’ATR permet une CCUS à moindre coût, les émissions étant plus concentrées.

Comme nous l’avons, vu le vaporéformage du méthane avec CCUS ne coute pas très cher, descendant à 1.5$/kg H2 produit. C’est ainsi une des voies de production « bas carbone » les moins chères. (p.42)

[NdA : C’est néanmoins très dépendant du prix du gaz, qui devrait augmenter à un moment ou à un autre.]

CCUS en gazéification du charbon

En Chine, la production d’H2 coute 1.5$ à partir de charbon avec CCUS, contre 1.8$ en SMR sans CCUS et 2.3$ avec. (p.51)

Comparaison globale
p.52

L’auteur estime que, pour que le vaporéformage de méthane soit plus avantageaux avec la CCUS, il faudrait que le prix du carbone dépasse 50$/tonne. (p.97)

L’hydrogène coproduit ou fatal

L’hydrogène coproduit par électrolyse dans le cadre de la production de chlorine et de soude caustique représente 2% du total.

0.5MtH2 sont simplement évacués dans l’air et 22MtH2 sont utilisés pour des application à faible valeur ajoutée, comme la chaleur. (p.174)

Stocker et transporter l’hydrogène

Le dihydrogène est à la fois minuscule (il passe à travers l’acier) et immense (il a une densité, à température ambiante, de 0.089g/l : il fait 11 000l pour accueillir 1kg). Son stockage et son transport sont un des principaux problèmes.

Actuellement, l’hydrogène est consommé sur site (85%) ou transporté par des camions ou des pipeline (15%).

Le stockage de l’hydrogène

[NdA: Vous pouvez également consulter notre article sur le stockage d’hydrogène]

Les différents états physiques

Le stockage sous forme liquide est très difficile : il faut le refroidir à -253°C. Cela représente 25 à 35% de l’énergie transportée … (p.74)

Le stockage chimique

L’hydrogène peut être transformé en une autre matière, plus pratique à utiliser et à transporter. Il y en a principalement 4:

  • L’ammoniaque. C’est l’une des principales utilisations de l’H2 (pour faire des engrais) et est beaucoup plus dense et facile à liquéfier (-33°C au lieu de -252) que l’hydrogène. Il est néanmoins très toxique. Il pourrait être utilisé comme carburant, mais cela peut produire du peroxyde d’azote. Cela requiert entre 7 et 18% de l’énergie contenu dans l’hydrogène. La perte est comparable si on veut en extraire l’hydrogène. (p.75)
  • Méthane synthétique
  • Diesel ou kerosène synthétique
  • Méthanol synthétique, qui a une densité énergétique 80% à l’hydrogène liquide.

Je ne vois pas trop comment les hydrocarbures seraient « bas carbone », vu que le CO2 se retrouve au final dans l’atmosphère. Les prix sont détailles p.60 et suivant. Je ne détaille pas.

Il y a aussi des liquid organic hydrogen carriers (LOHC). Il y a par exemple le methylcyclohexane, utilisant du toluene comme « molécule porteuse » (carrier molecule). Le toluene coute 400-900$/tonne, il faut plus de 15 tonnes pour transporter 1 tonne d’hydrogène et on en produit actuellement que 22 millions de tonnes. C’est en outre très toxique. Le dibenzyltoluene n’est pas toxique, mais beaucoup plus cher. La conversion consommerait environ 35-40% de l’énergie de l’hydrogène. (p.75-76)

Le stockage mécanique

Pour le stockage de grande ampleur, on envisage le stockage géologique, du reste déjà utilisé pour le gaz naturel :

  • les mines de sel. Utilisées depuis les années 70 pour le stockage d’hydrogène, ce stockage coute moins de 0.6$/kg H2 et a une efficience d’environ 98%. (p.69)
  • d’anciens gisements d’hydrocarbure. Ils sont plus grands que les carvernes de sel, mais elles sont aussi plus poreuses et il y a un risque de pollution du dihydrogène. (p.69)
  • aquifères. Leur efficacité n’est pas démontrée.

Le transport

Le graal : le circuit préexistant de gaz

Le transport idéal serait de pouvoir faire passer le dihydrogène dans le circuit de gaz. La proportion de H2 que les canalisation pourraient retenir varie. Le prix du transport serait d’environ 0.4$/kg, essentiellement en raison de stations d’injections ainsi que de coûts opérationnels plus importants (p.74).

Toutefois, le principal problème est que séparer, en bout de course, l’H2 du méthane serait hors de prix : entre 3 et 6$/kg d’H2 ! En somme l’H2 transporté serait destiné à être brûlé. Cela pose aussi problème pour les industriels qui utilisent le méthane comme matière première. (p.72)

Les différents types de transport

Il y a déjà 5000km de pipeline d’hydrogène (contre 3 millions pour le gaz naturel). L’une des grosses difficultés est, outre le besoin d’investissements élevés, le soutien gouvernemental et le besoin de grands travaux, qui peuvent poser des difficultés politiques.

Une autre option est le transport par bateaux.

Les transports en fonction de la distance

p.78

La liquéfaction ou le transport sous forme d’ammoniaque ou de LOHC serait plus adaptée pour les distances au-delà de 1500 km. En deça, le transport en pipeline serait plus intéressant.

[NdA : il semble y avoir un gros souci avec ces graphiques. D’abord, le prix du transport par pipeline n’est pas fonction de la distance, mais des infrastructures existantes. Plus vous utilisez la structure, plus elle est rentable. En outre, le prix de la reconversion n’est pas inclus ! C’est pourtant le principal problème de l’ammoniaque et des LOHC. En somme, il est probable que le transport par pipeline soit toujours le plus intéressant pour les longues distances … sauf s’il y a la mer au milieu évidemment.]

La distribution locale se ferait par camion ou par pipeline. (p.79) Le prix au format gazeux serait d’environ 1.8$ pour 500km.

Voici une étude pratique pour le Japon, entre deux productions d’hydrogène par électrolyse :

p.82

Ainsi, importer sous forme d’ammoniaque d’Australie serait encore moins cher, même si le transport représenterait environ 30% du prix total.

L’IEA estime que délivrer l’hydrogène aux stations de recharge européenne devrait couter 7.5 à 9$/kgH2, en se basant sur un prix de production initial d’environ 3$/kgH2. (p.84)

Utilisation d’hydrogène

La demande d’hydrogène pur est de 74Mt par an et celle d’hydrogène en mixture de gaz est de 45Mt. (p.177) Elle est

Je ne parlerai pas des carburants synthétiques, qui ne sont pas, à mon sens, bas carbone (que le carbone ait été utilisé une ou deux fois ne change rien, au final il y a bien un rejet) et me semblent logiquement absurdes (on réforme du méthane pour refaire du méthane ? WTF ?), en tout cas au stade où on en est.

L’hydrogène dans l’industrie

L’hydrogène est aujourd’hui quasi-exclusivement utilisé en tant que matière, dans l’industrie : 33% dans la raffinerie de produits pétroliers, 27% dans la production d’ammoniaque, 11% dans la production de méthanol et 3% dans production d’acier (3%) pour les 4 principales applications. (p.89)

De manière générale, la demande est vouée à largement augmenter d’ici 2030 : +7% pour la raffinerie, +31% pour la production de produits chimiques, *2 pour la production d’acier …

Hydrotraitement et hydrocraquage

La raffinerie mobilise chaque année 38MtH2, soit 33% de la demande totale. (p.91)

L’hydrotraitement consiste à retirer les impuretés du pétrole et, surtout, le sulfure. Cet usage tend à augmenter, le taux de souffre autorisé diminuant constamment. (p.92)

L’hydrocraquage consiste à améliorer les pétroles de mauvaise qualité (lourd, sables bitumineux) en un produit pétrolier d’une valeur plus élevée. (p.92)

A l’échelle mondiale, la quasi-totalité de l’hydrogène utilisé dans les raffinerie

  • Est un coproduit du raffinage (36%)
  • Vient du réformage de méthane (38%) ou du charbon (2%) sur le site lui-même. (p.93)

Industrie chimique

Chaque année, plus de 31MtH2 d’hydrogène est utilisé comme matière première pour créer de l’ammoniaque et plus de 12MtH2 pour produire du méthanol. Enfin, 2MtH2 sont utilisés par d’autres procédés, comme la production de péroxide d’hydrogène ou de cyclohexane. (p.99)

La production d’acier

L’hydrogène est utilisé dans la production d’acier dans 2 procédés :

  • la réduction directe du fer (« Direct Reduction of Iron – Electric arc furnace », DRI-EAF) représente 7% de la production d’acier et consiste à utiliser un mélange d’hydrogène et de monoxyde de carbone comme agent réducteur.
  • le (« blast furnace-basic oxygen furnace », BF-BOF), représentant 90% de la production d’acier, coproduit de l’hydrogène au milieu d’autres gaz (on appelle l’ensemble « work-arising gases » ou WAG) (14MtH2/an), qu’il réutilise en partie (9MtH2/an). Ce procédé est donc globalement producteur d’hydrogène en fait (mais il est difficile à utiliser).

C’est la première voie qui consomme 4MtH2/an de la production dédiée. Cett quantité devrait doubler d’ici 2030.

Cela pourrait augmenter radicalement si sont développés des modes de production DRI-EAF utilisant exclusivement de l’hydrogène. C’est par exemple ce que teste le projet HYBRIT en Suède (p.111).

La production de hautes températures

Une utilisation industrielle de l’hydrogène pourrait être la production de hautes températures (>400°C). Outre les secteurs de la chimie et de l’acier, cela représente des émissions de 1.1GtCO2, soit 3% des émissions globales de l’énergie. (p.117)

Les éléments proposés semblent très hypothétiques, je passe.

L’hydrogène dans les transports, bâtiment et énergie

Si ce sont des utilisations marginales aujourd’hui, l’hydrogène pourrait aussi être utilisé comme énergie dans plusieurs contextes.

Les transports H2

Transport routier

Il y avait en 2018, 11200 voitures à hydrogène (Fuell Cell Electric Vehicule, FCEV) en circulation, contre 5.1 millions de voitures électriques à batteries (Battery Electric Vehicule, BEV). Cet écart se retrouve dans le nombre de stations de recharge : 381 en 2018 pour l’hydrogène, contre 144 000 chargeurs rapides, 395 000 chargeurs lents et 4.7 millions de bornes de recharge privées. (p.126-7)

L’un des obstacles pour les FCEV est le prix élevé des piles à combustibles et des réservoirs en raison des faibles volumes produits. Le prix d’une pile à combustible est d’environ 230$/kW. Cela devrait rapidement descendre à 180$. Les seules économies d’échelle devraient faire tomber ce coût à 75$/kW. (p.131)

Le réservoir coûte également cher, devant tenir des pression de 350 ou 700 bars. Il coute 23$/kWh à l’échelle de 10 000 unités, mais cela descend à entre 14 et 18 $/kWh à 500 000 unités par an. La compression coute 6 (350 bars) ou 15% (700bars) du contenu énergétique de l’hydrogène. (p.132)

L’un des plus gros obstacles est le prix des stations de ravitaillement, coutant 0.6-2 millions $ à 700 bars et 0.15-1.6 millions à 350 bars. Il faudrait un investissement de 35 à 45 milliards pour servir seulement 5% de la flotte de voitures en hydrogène. Une piste serait de se focaliser sur le développement de stations pour des flottes « captives » (comme les camions et véhicules de déplacement sur des sites industriels, les bus et flottes de taxis) pour résoudre le problème de la sous-utilisation.

A long terme, les FCEV deviendraient plus intéressants que les BEV à partir de 400 – 500 km d’autonomie. Plus l’autonomie augmente, plus les FCEV sont intéressants.

Pour les poids lourds, même avec les prix actuels des piles à combustibles, les FCEV seraient plus intéressant que les BEV pour les trajets de plus de 600km si l’hydrogène peut être délivré à moins de 7$/kWh. (p.137)

Bâteaux, trains et avions à hydrogène

Le transport maritime mobilise 5 de la demande globale de pétrole et transporte, en volume, 90% des biens. Utiliser de l’ammoniaque comme carburant demanderait une modification des moteurs. Pour être viable, il faudrait des prix du CO2 entre 40 et 230$/tCO2. Pour que l’hydrogène soit viable, il faudrait des prix du CO2 encore 35-45$ plus élevés. Les bateaux à hydrogène ne sont pas encore développés. (p.141)

Si le train est le mode de transport le plus électrifié, il reste des lignes qui ne le sont pas. Même en France et en Allemagne, 20% du flux et la moitié du réseau ne sont pas électrifiés. Des trains à hydrogène permettraient de remplacer ceux à diesel. Cette piste est déjà lancée, notamment en Allemagne, en Autriche, au Royaume-Uni et au Japon. (p.142)

S’agissant des avions à hydrogène, il n’y aurait pas encore de projet viable.

L’hydrogène comme source de chaleur pour les bâtiments

Le chauffage (espace, eau, cuisson) représente 22% de l’utilisation finale d’énergie. Cela représenterait 2017 Mtoe en 2017, dont 620Mtoe venant du gaz naturel. Un des pistes les plus simples serait de méler une portion d’hydrogène au gaz naturel, ce qu’envisage le projet GRHYD en France et HyDeploy au Royaume-Uni. (p.144) Toutefois cela pourrait augmenter le prix du gaz de 3 à 15% ce qui pourrait faire se tourner beaucoup vers les pompes à chaleur électriques.

L’hypothèse d’un chauffage 100% hydrogène supposerait des prix finaux de 1.5-3$/kgH2. (p.148) [NdA: Dans l’hypothèse où on adapte les infrastructures, les chaudières, les équipements et la sécurité …]

L’hydrogène et la production d’énergie

Le projet ENE-FARM au Japon propose d’installer des millions d’unités de piles à combustible couplées à du vaporéformage. Il y a aujourd’hui 276 000 de ces unités de micro co-génération. (p.153)

Le principal intérêt de piles à combustible stationnaire est pour proposer une alimentation électrique de soutien, en cas de problème, ou bien pour les zones ne disposant pas d’un réseau électrique. C’est notamment le cas de nombreuses stations de télécommunication. (p.154)

De l’ammoniaque pourrait aussi être utilisé en combustion combinée (« co-firing ») dans les centrales à charbon. Néanmoins utiliser du NO3 comme carburant fait craindre les émissions d’oxydes d’azotes (NOx). (p.155)

C’est l’un des grands intérêts de l’hydrogène : il pourrait être utilisé comme stockage d’électricité à grande échelle et à long terme. Le stockage en caverne de sels est particulièrement intéressant. Le problème est le rendement : convertir l’électricité en hydrogène, puis l’hydrogène en électricité, fait perdre 60% de l’énergie initiale, contre 15% pour une batterie lithium-ion. Ces dernières ne sont néanmoins pas viables à grande échelle et long terme, demandant énormément de matériaux par kWh et se déchargeant naturellement. (p.158)

Perspectives d’action

L’IEA a identifié 4 axes pour développer l’hydrogène :

  1. Des écosystèmes industriels cotiers.
  2. L’infrastructure de gaz existante
  3. Des circuits de transports à hydrogène (flottes, frêt …)
  4. Des routes commerciales

Chaque aspect ne serait intéressant que pour certaines région (ex: l’Amérique du Nord et l’Europe pour le second point). Les auteurs rappelle qu’il n’y a pas de modèle unique de politique publique. Chaque mesure doit être spécifiquement adaptée à son contexte et à ses cibles.

Ecosystèmes industriels cotiers

Une large part de la demande existante pour de l’hydrogène est dans des zones cotières. On trouve ainsi déjà des pipeline d’hydrogène aux Etats-Unis (dans le Golf du Mexique) et en Flandre. C’est aussi l’endroit idéal pour développer l’hydrogène dans les transport (bâteaux, route). (p.177 et s.)

L’infrastructure de gaz existante

Il s’agit de mélanger de l’hydrogène au réseau de gaz. On vaporéforme du gaz pour produire de l’hydrogène pour remplacer du gaz … Déjà commencer par entièrement décarboner la production d’H2 serait un bon premier pas non ? Avant d’envisager ce genre de gaspillages …

Les auteurs présentent l’idée de le séparer, en bout de course, du gaz naturel comme viable, mais le prix qu’ils évoquaient dans la partie dédiée semblait assez délirant (3-6$/kgH2 soit plus que le prix de production prévu …).

Circuits de transports à hydrogène

La première étape pour résoudre le problème de stations de recharge est de développer des circuits, pour des flottes et des poids lourds, ce qui permettrait de viabiliser facilement une première infrastructure.

Des routes commerciales

Il faudrait commencer à développer les capacité de commerce de l’hydrogène et notamment développer les infrastructures, bâteaux, standards et entreprises. Certaines régions ont en effet un plus grand potentiel de production d’H2, notamment grâce à des EnR plus généreuses (zones très ensoleillées, beaucoup de vent), que d’autres.

L’IEA estime par exemple que l’Afrique et le Chili pourraient produire respectivement 500MtH2/an et 160MtH2/an à moins de 2$/kgH2. Le Moyen-Orient pourrait également produire d’énormes quantités d’hydrogène à 1.3$/kgH2 en SMR avec CCUS (Carbon Capture Utilisation and Storage).

L’article « Le stockage de l’hydrogène et les problèmes qui s’y rattachent » de Schmitt et Joinville publié en 1975 étudie les perspectives du stockage d’hydrogène pour une mobilité hydrogène. Ses auteurs concluent que la piste la plus intéressante serait celle du stockage sous forme d’hydrures métalliques.


Peu après le premier choc pétrolier, l’épuisement des ressources en combustibles fossibles est devenue évidente. Ce serait l’hydrogène qui semblerait, à long terme, être le meilleur candidat pour remplacer les carburants fossiles.

C’est dans cette perspective que Schmitt et Joinville ont étudié les différents moyens de stockage de l’hydrogène dans la perspective d’une mobilité hydrogène.

Cet article semble être issu du Congrès national de la Société des Eletriciens, des Electroniciens et des radioélectriciens (SEE) s’étant déroulé à Biarritz du 30 septembre au 4 octobre 1975.

Les carburants du futur

L’auteur compare 4 combustibles de synthèse : le méthane (CH4), le méthanol (CH3OH), l’ammoniac (NH3) et l’hydrogène (H2).

Le méthanol serait une piste intéressante à court et moyen terme (probablement en raison de son point d’ébullition élevé (65°C), de sa bonne densité d’énergie volumique et de son faible prix), mais ce serait l’hydrogène la piste la plus intéressante à long terme (sans doute parce que le premier est toxique, polluant et lié aux ressources fossiles).

Crédits : Schmitt et Joinville 1975, « Le stockage de l’hydrogène et les problèmes qui s’y rattachent »

Les moyens de stockage de l’hydrogène

L’hydrogène comprimé

La difficulté pour le stockage d’hydrogène gazeux comprimé serait le poids et le volume du récipient. Les réservoirs classiques ne pourraient comporter que .. 1.6% de leur poids (0.9kg pour un réservoir de 56kg de 50 litres comprimés à 200 bars). L’utilisation d’alliages peut faire monter ce pourcentage à 2,2% et devrait atteindre 3%.

Il y aurait, en outre un risque notable en cas d’accident.

L’hydrogène liquide

Maintenir l’hydrogène dans son état liquide (<-253°C) supposerait de pratiquer l’évaporation contrôlée, qui suppose ne perte d’au moins 0,5 à 1% de l’hydrogène par jour.

La liquéfaction elle-même demanderait beaucoup d’énergie. Il y a 3 phases : la purification, la transformation ortho-para et la liquéfaction proprement dite.

La seconde étape suppose de changer la proportion d’isomères de l’hydrogène. Dans sa forme gazeuse, il y a 75% d’H2 dit « ortho », alors que dans sa forme liquide il n’y en a que 0.2%. Passer de cette forme à l’autre (« para ») libère beaucoup de chaleur.

Au total, la liquéfaction demande théoriquement 3.88 kWh/kg de dihydrogène, mais cela revient en pratique à 14 kWh/kg. Cela pourrait être diminué à 10 kWh/kg, mais cela resterait encore 30% de l’énergie contenue dans l’hydrogène (34 kWh/kg).

Stockage en hydrures

Les hydrures métalliques, comme TiH2, incluant de l’hydrogène se caractérisent notamment par la réversibilité de la réaction. La décomposition de l’hydrure est endothermique.

Extraire l’hydrogène de l’hydrure demande simplement de le chauffer au-dessus de sa température de décomposition ou bien de diminuer la pression en dessous de la pression d’équilibre. Voici des exemples d’hydrures:

Crédits : Schmitt et Joinville 1975, « Le stockage de l’hydrogène et les problèmes qui s’y rattachent »

Voici leur comparaison entre les différents types de stockage :

Crédits : Schmitt et Joinville 1975, « Le stockage de l’hydrogène et les problèmes qui s’y rattachent »

Les auteurs observe que la capacité massique est rédhibitoire pour la forme gazeuse et que l’évaporation et l’instabilité rendent non viable la forme liquide hors aéronautique/spatial. Ils concluent que c’est le stockage sous forme d’hydrures qui serait le plus intéressant.

L’hydrogène comme carburant

Le problème des véhicules électrique serait l’autonomie et la capacité d’accélération.

La combustion d’hydrogène ne serait pas intéressante, n’ayant un rendement que de 10 à 20%. Utiliser une pile à combustible aurait un rendement de 40 à 60%. Néanmoins, la puissance massique serait faible (10-15 kg/kW, contre 0.5-2 pour les moteurs thermiques) et leur production ne serait pas encore industrialisée.

Toutefois ces obstables devraient être levés par les améliorations technologiques. Même alors, les piles à combustibles seraient encore 5 fois moins puissants que les moteurs thermiques. Il faudrait, pour le compenser, hybrider le dispositif par une batterie. [On notera la sagacité des auteurs oO]

Véhicule électrique fonctionnant à l’hydrogène

Les auteurs font une estimation des caractéristiques que pourrait avoir, en pratique, un véhicule à hydrogène. Voici les poids qu’ils utilisent pour leur projection :

Ce véhicule serait capable de rouler à 80km/h et une autonomie de 375 km.

Ce système de stockage aurait une densité globale d’énergie 7 à 8 fois plus élevées que les batteries de l’époque.

Il faudrait garder à l’esprit plusieurs aspects du système de stockage :

  • l’hydrure doit pouvoir libérer son hydrogène à une pression suffisante pour alimenter la pile.
  • Il faut disposer d’assez de chaleur pour décomposer l’hydrure. Cela impliquerait qu’il faut un système de démarrage annexe.
  • Le destockage doit être assez rapide pour répondre aux besoin d’alimentation du moteur.

Le réservoir aurait un volume de 60 litres et contiendrait 3kg d’hydrogène.

Conclusion

L’hydrogène serait appelé à « prendre le pas sur les autres combustibles synthétiques dans un avenir assez peu éloigné ». Le stocker sous forme d’hydrures serait la meilleure solution pour les automobiles. Pour le transformer en énergie motrice, l’optimal serait une pile à combustible avec un moteur électrique.

Toutefois, il faudrait encore d’importantes recherches avant d’arriver à une solution viable.


On voit les progrès qui ont été faits dans le stockage d’hydrogène gazeux (200-300 bars à l’époque, 700 aujourd’hui) et que la piste des hydrures enthousiasmait déjà les chercheurs à l’époque.

J’ai beaucoup aimé cet article, qui montre de manière extrêmement synthétique l’état de l’art d’il y a 45 ans.


Pour aller plus loin

Vous pouvez consulter :

Le CEA a récemment développé l’électrolyse à haute température, proposant un rendement incroyable : 99% ! Ils sont maintenant en train de l’industrialiser avec plusieurs partenaires à travers l’entreprise jointe Genvia.


Le dihydrogène est considéré comme une partie importante de la transition énergétique, notamment pour remplacer le pétrole comme carburant des véhicules. En effet : ce gaz ne produit, quand il est utilisé, que de l’eau et n’a besoin, pour être produit, que d’eau.

C’est un parfait vecteur énergétique.

Enfin, parfait … pas tout à fait. Il a en effet un rendement assez médiocre : de l’ordre de 25-30% de l’électrolyse au moteur électrique selon l’ADEME (contre 80% pour l’électricité en batterie). De plus, il est actuellement surtout produit par vaporéformage du méthane, qui libère 10kg de CO2 pour 1kg d’hydrogène, sans même compter l’énergie nécessaire …

Une innovation récente du CEA pourrait néanmoins changer beaucoup de choses : l’électrolyse à haute température.

L’électrolyse à haute température : intérêt

L’électrolyse haute température atteint un rendement de 99% en pouvoir calorifique supérieur (PCS), contre de l’ordre de 72% pour l’électrolyse alcaline ou 80% pour la PEM.

L’idée est que

  • il y a besoin de moins d’énergie pour casser une molécule de vapeur d’eau que pour casser une molécule d’eau liquide.
  • la chaleur de l’environnement augmente la part de l’énergie électrique pouvant être remplacée par l’énergie thermique.

De plus, l’opération est réversible: l’électrolyseur peut devenir une pile à combustible.

Enfin, cette technologie peut aussi électrolyser du dioxyde de carbone, ce qui produirait un mélange H2 / CO, qui pourrait être transformé en différentes molécules d’intérêt.

L’électrolyse à haute température : principe

Les matériaux

Comme toujours avec l’électrolyse, vous avez deux électrodes et un électrolyte (qui permet le « dialogue » entre les premières). L’électrolyte est ici « une membrane solide, dense et étanche au gaz. Celle que nous développons est à base de céramique (de l’oxyde de zirconium stabilisé à l’oxyde d’yttrium, la zircone yttriée). » (Julie Mougin, cheffe du service composants et système Hydrogène au CEA-Liten)

L’électrode « à hydrogène » est composée de cermet (matériau composite métal-céramique), de nickel et de zircone yttriée.

L’électrode « à oxygène » est composée d’un matériau céramique « de structure perovskite ».

La réaction

Le système part d’une eau chauffée (par cogénération on suppose) à 150°C (ce qui est « assez courant sur de nombreux sites industriels, les stations d’incinération ou la géothermie« ).

Celle-ci va être chauffée à 700°C par un système assez complexe. En somme, une fois le système à un certain équilibre, le point « thermo-neutre », la température est stable : la chaleur produite par la cellule en sortie est récupérée pour chauffer la vapeur d’eau en entrée et, ainsi, compenser la perte thermique de l’électrolyse, qui est une réaction légèrement endothermique (= qui « perd » de la chaleur »).

Genvia : le projet industriel

Pour exploiter cette nouvelle technologie, Genvia a été créée le 1er mars 2021 par :

  • CEA;
  • Schlumberger New Energy;
  • leurs partenaires (Vinci Construction; Vicat ; Agence Régionale Energie Climat (AREC) Occitanie).

L’entreprise sera présidée par Florence Lambert, ancienne directrice du CEA-Liten à Grenoble. Une « Gigafactory » sera implantée à Béziers et le centre de transfert technologique sera basé au CEA-Grenoble.

Ils estiment développer des démonstrateurs de 300KW en 2022. En 2030, l’entreprise devrait produire des unitées de plusieurs centaines de MW en 2030. L’hydrogène qu’ils produiraient couterait moins de 2€/kg.

J’en parle plus dans l’article dédié à Genvia.


Pour aller plus loin

https://www.youtube.com/watch?v=aOMsY2q5jnk

Le LZ 129 Hindenburg, alors le plus grand zeppelin au monde, s’est brusquement embrasé en atterrissant le 6 mai 1937 à Lakehurst, dans le New Jersey (USA). Son ballon était en effet rempli de dihydrogène, un gaz très inflammable. Cet accident a sonné le glas de l’age des zeppelins et a été un traumatisme qui pèse encore aujourd’hui sur les consciences. C’est un frein pour la mobilité hydrogène.


Après diverses expérimentations au XIXe siècle, on a réussi au début du XXe siècle à créer des ballons dirigeables, aussi appelés zeppelins, pouvant voler sur de longues distances et transporter d’importantes charges. Le principe était de remplir ces ballons avec un gaz plus léger que l’air et, de même que les bâteaux reposent sur l’eau, laisser l’air porter naturellement ces vaisseaux aériens. La révolution n’était pas négligeable: le transport aérien était encore balbutiant et, si vous vouliez aller aux Etats-Unis, vous deviez prendre le bâteau. Les zeppelins étaient beaucoup plus rapides. C’était leur âge d’or, mais il ne durera pas …

On pouvait utiliser de l’hélium, mais il était très cher et produit par les américains. L’hydrogène, au contraire était à un prix raisonnable et disponible en Allemagne. De plus, il a une portance supérieure à l’hélium. C’est la démarche qui a été retenu par les allemands. Financé par la Luftschiffbau Zeppelin, le LZ 129 Hindenburg, alors le plus grand ballon dirigeable du monde, est inauguré le 4 mars 1936.

Le colossal LZ 129 ‘Hindenburg’

Le LZ 129 ‘Hindenburg’ faisait 246,7 mètres de long, 46.8 mètres de large et 44.7 mètres de haut. C’est, encore aujourd’hui, l’engin le plus volumineux qui ait volé. Propulsé par 4 moteurs diesel Daimler-Benz, il transportait 88 000 litres de gazole, 4 500 d’huile de graissage et 40 000 d’eau pour les ballasts. Il était équipé de 6 moteurs, produits par Mercedes, d’une puissance de 1300 chevaux.

Surnommé (très à propos) « le Titanic des airs », le Hindenburg pouvait emporter une centaine de voyageurs. L’intérieur était luxueux, on était loin d’un vol low cost: il fallait payer environ 400$ … de l’époque. Cela représenterait $7,305.94 aujourd’hui …

Il a été inauguré le 4 mars 1936 à Friedrichshafen en Allemagne, pour un vol vers Rio de Janeiro. Il permettait de traverser l’Atlantique deux fois plus vite qu’en bateau, à une époque où le transport (civil, de masse) par avion n’existait pas encore. C’était un peu le concorde de l’époque … Le vol inaugural n’a pas rencontré de difficultés.

Le crash du Hindenburg le 6 mai 1937

Le 6 mai 1937, lors de l’amarrage (= aterrissage) du Hindenburg à Lakehurst, New Jersey, avec environ 100 personnes à bord lorsque, soudainement, il explosa. La scène est terrible: en quelques instant le béhémoth s’enflamme et s’effondre, emportant 34 passagers ou membres d’équipage et une personne au sol. Les survivants à la catastrophe du Hindenburg n’ont pu s’échapper qu’au prix de graves brulures.

Le vaisseau, la fierté du IIIe Reich, a été anéanti en quelques instants. Voilà la très impressionnante vidéo du crash =>

Cet accident a sonné le glas de l’âge des zeppelins et laissé une marque indélébile dans notre esprit : l’hydrogène est dangereux. C’est une des grandes craintes pour l’adoption des véhicules à hydrogène.

La cause de l’incendie due zeppelin géant est longtemps restée mystérieuse, laissant ouverte l’hypothèse criminelle (les gouvernements envisageaient qu’il puisse s’agir d’une réponse au bombardement de Guernica) et même des théories du complot. La réponse est arrivée il y a quelques années :

L’ingénieur aéronautique britannique Jem Stansfield, responsable de la nouvelle étude, et ses collègues ont trouvé que le dirigeable était en fait chargé d’électricité statique après être passé dans un orage, tandis qu’un conduit de gaz cassé est probablement à l’origine de la fuite d’hydrogène dans les puits d’aération. Quand l’équipage au sol a attrapé les cordes d’atterrissage, il a mis l’appareil en contact avec le sol et le feu s’est alors déclaré à l’arrière du Hindenburg, enflammant l’hydrogène.

Grégoire Fleurot, Le mystère du crash du zeppelin Hindenburg résolu, 76 ans après, Slate

L’impact

La catastrophe du dirigeable Hindenburg a marqué très durablement les esprits, ancrant l’image de l’hydrogène comme un gaz très, trop, dangereux.

« L’incendie, en mai 1937, du dirigeable LZ 129 Hindenburg fabriqué par Zeppelin et gonflé à l’hydrogène a laissé des traces dans la mémoire collective. »

Les échos, Avion à hydrogène : de nombreux défis technologiques à relever

Pour aller plus loin

  • Cet article fait partie de notre dossier “Hydrogène, autonomie et transition énergétique« .
  • Vous pouvez également consulter notre article sur l’histoire de l’hydrogène.
  • Si vous voulez plus d’information sur le Zeppelin et son accident, je vous recommande le très complet article de Wikipedia.
  • Un article sur l’élucidation des causes de l’incendie : https://www.independent.co.uk/news/science/hindenburg-mystery-solved-after-76-years-8517996.html
  • Cette vidéo de Simple History vous offre (en anglais) une rétrospective historique plus approfondie sur les zeppelins en général:

Lorsqu’on parle d’hydrogène en écologie, c’est toujours en ayant en tête l’hydrogène vert, venant d’une électrolyse alimentée par un énergie bas carbone. Dans cet article, nous vous présenterons néanmoins un livre, dans lequel les auteurs vantent les mérites de l’hydrogène fossile associé à des dispositifs de captation carbone:

Fossil Fuel Hydrogen, Technical, Economic and Environmental Potential, de William J.Nuttall et Adetokunboh T.Bakenne, éditions Springer, 143 pages

Je reprends les points importants à mesure qu’ils sont présentés dans l’ouvrage.

Plusieurs points m’interrogent: ils présentent la CCUS comme une technologie mature, ce qu’elle n’est pas (du tout), ils ne distinguent pas gazéification du charbon (procédé mature bien connu) de la pyrogazéification de biomasse (procédé qui doit encore passer à l’échelle) et les prix annoncés pour chaque procédé me semble assez aberrants (la fourchette haute du SMR avec CCUS est moins élevée que celle du SMS sans …). Le livre n’en reste pas moins intéressant, montrant la perspective du sujet qu’on beaucoup de scientifiques / industriels.

Chapitre 1. Production et utilisation d’hydrogène

Les auteurs ont analysé plusieurs sources publiées entre 2004 et 2013 pourtant sur la production / consommation mondiales et en déduisent, globalement …

[je noterait l’unité, le million de tonnes métriques, MT]

La consommation de dihydrogène

Le principal consommateur est la production d’ammoniaque (27MT), beaucoup utilisée pour les engrais. Viennent ensuite les raffineries, pour l’ « hydrocraquage » (« hydrocracking », 7 MT) et l’ hydrotraitement (« hydrotreating », 10.5 MT).

Plus marginaux on utilise aussi du H2 dans les piles à combustible (2 MT), pour le métal (1 MT), le verre et la céramique (0,5 MT), l’alimentation (0,5 MT), l’électronique (0,5 MT), les plastiques (0,5 MT) et les médicaments (0,5 MT).

Notez qu’il contredit un peu (les ordres de grandeur restent les mêmes) cette répartition dans la figure 1.5 (p.6) :

Fossil Fuel Hydrogen, Technical, Economic and Environmental Potential, p.6

Désulphuriser le pétrole: l’hydrotraitement

Le souffre causant des dégats importants (santé, pluies acides …), le pétrole ne peut pas en contenir beaucoup. Pour le désulfuriser on utilise de grandes quantités d’hydrogène, qui va venir réagir avec le souffre pour former du sulfure d’hydrogène (H2S), qu’on peut aisément séparer du pétrole. C’est ce qu’on appelle l’ « hydrotraitement«  (hydrotreating). (p.1)

Notez que des pistes existent pour remplacer ce procédé par la desulphurisation oxydative ou bien l’utilisation d’eau supercritique. (p.38) Je ne détaille pas.

« Craquer » le pétrole lourd: l’hydrocraquage

La diminution des réserves de pétrole encourage l’extraction de pétroles plus lourds, de plus faible qualité. Il faut les casser en molécules plus petites avant de les utiliser. Pour cela, on emploie de l’hydrogène, c’est lhydrocraquage (hydrocracking)

Pour la production de dihydrogène

La principale source est le gaz naturel (23MT), suivie par la naphte (15MT), le charbon (9.5MT), puis l’électrolyse par vapeur (1.6MT) et l’électrolyse à température ambiante (0.4MT). (p.1)

En pourcentages, cela donnerait 48% pour le gaz, 18% pour le charbon, 30% pour le pétrole et 4% pour l’électrolyse. (p.3)

L’hydrogène fossile: un impératif à court terme

L’hydrogène fossile, et plus précisément le vaporeformage du méthane, domine actuellement largement la production d’hydrogène et le restera nécessairement à court ou moyen terme.

Ce serait, du reste, une première solution viable pour diminuer les émissions du transport. En effet, alors que les moteurs à combustion libèreraient 1250 (gasoil) ou 1300 (diesel) grammes de CO2 par kWh, une pile à combustible alimentée par de l’hydrogène venant de gaz naturel n’en produirait que 800 (200 si l’hydrogène avait été conçu à l’aide d’énergie éolienne). [Rq : Ces chiffres proviennent d’un cabinet de conseil. Je n’ai pas du tout confiance.]

Savoir s’il n’est pas possible de rendre l’hydrogène fossile plus environnementalement responsable serait donc une question extrêmement importante.

Considérations marchandes

Le marché de l’hydrogène représenterait plus de 100 milliards $ et atteindrait le double en 2025. 88% de ce marché serait « captif », réalisé par et pour l’industrie pétrochimique. Parmi les 12% restant, les principales entreprises sont : Air Products and Chemicals Inc. (USA), Air Liquide (France), Linde AG (Germany) incorporating BOC Ltd (UK), and Praxair (USA). Le français était en tête avant 2018, date à laquelle Paxair et Linde auraient fusionné et, leur capitalisation dépassant 90 milliards $, ainsi pris la première place.

Globalement (la réalité étant évidemment plus complexe), l’hydrogène fossile serait 3.7 fois moins cher que l’hydrogène vert. Néanmoins, l’utilisation d’un système de capture du carbone diminue ce chiffre à 1.8.

Chapitre 2. Le futur de l’énergie et de la mobilité

Dans ce chapitre, les auteurs présentent les évolutions et les perspectives de la mobilité hydrogène. La partie est très synthétique et intéressante, mais je vais quand même essayer d’aller vite.

Il présente rapidement les différents types de piles à combustibles (DMFC, PAFC, PEMFC, SOFC … je vous renvoie à mon article sur le sujet).

Toyota, après avoir réussi à capturer 2.3% du marché de l’automobile américain grâce à sa Prius, popularisant la voiture hybride, a été le premier constructeur automobile à vendre au public une voiture à hydrogène : la Toyota Mirai. Sa puissance était de 114kW et le réservoir, pouvant contenir environ 5kg d’hydrogène, lui donnait une portée de 310 miles (=498 km). Le prix était de £65,219 en 2018.

Sécurité

Les principaux risques de l’hydrogène sont liés à sa possibilité d’exploser spontanément dans l’air, lorsqu’il représente 18.3 à 59% du volume. La molécule de dihydrogène étant extrêmement petite, empêcher les fuites est un challenge difficile. Ce gaz étant incolore et inodore, ces dernières sont difficiles à repérer.

Il faut en outre rappeler que l’essence n’est pas sans risque et la possibilité d’explosion en cas d’accident est très importante. Au final, si la sécurité des FCEV est un élément important, il est exagéré dans l’opinion public, notamment à cause de l’explosion du Hindenburg.

Recharge

Les FCEV (Fuel Cell Electric Vehicles) ont un impact environnemental « du réservoir aux roues » très faible et peuvent être rechargés de manière similaire aux véhicules à essence actuels en termes de rapidité.

L’autonomie est la capacité à charger rapidement est un facteur différenciant important comparé aux véhicules électriques à batterie (BEV). En Juin 2016, il y a d’ailleurs eu une voiture alimentée à l’hydrogène, « Green GT H2 », qui participa aux 24h du Mans.

On peut se demander comment les urbains rechargeront leurs BEV. Les gouvernements étant en difficulté financière depuis la crise de 2008 auraient du mal à financer des bornes publiques. Au contraire, les infrastructures de recharge d’hydrogène seraient comparables à celles pour l’essence (en termes de financement / business model par exemple je suppose).

Perspectives

Ce seraient néanmoins les transports de longue distance et les flottes de bus qui seraient les secteurs pouvant le mieux / le plus vite être intéressés par l’hydrogène. Ainsi Hyundai aurait annoncé une vente de 1000 camions à hydrogène ayant une portée de 250 miles pour l’entreprise H2 Energy.

S’agissant des trains à hydrogène, ils pourraient être intéressants pour des tronçons inadaptés pour l’électrification. Un train à hydrogène Alstom opère d’ailleurs sur 100km en Allemagne.

Chapitre 3-4. Méthodes de production d’hydrogène

(Oui la question est répartie sur deux chapitres, c’est un problème de construction assez terrible. Heureusement que vous lisez cette synthèse ^^)

Vaporéformage du méthane (SMR)

Il s’agit ici de faire réagir, en chauffant à plus de 700°C, le méthane et la vapeur d’eau : CH4 + H2O → CO + 3H2. Ensuite, on essaye de faire réagir le monoxyde de carbone avec la vapeur d’eau : CO + H2O → CO2 + H2.

Les émissions de CO2 correspondantes seraient causées à 40% par la combustion nécessaire pour chauffer le dispositif et à 60% par la réaction chimique elle-même.

Le prix de production de l’hydrogène par électroyse utilisant l’énergie éolienne serait entre $2.85 et 7.3 par kg de H2, avec une médiane à 4.8$. Pour le vaporéformage de méthane, sans dispositif de capture de carbone, le prix est beaucoup plus bas : entre 0.55$ et 2.04$ avec une médiane à 1.3$. (p.36)

Pour aller plus loin, vous pouvez lire notre article sur la production d’hydrogène par vaporéformage de méthane.

Gasification par oxidation partielle (POX)

La gasification par oxidation partielle (POX) consiste à chauffer très fortement du charbon (800-1200°C) en présence d’oxygène. Ses coûts variables seraient plus faibles que le vaporéformage de méthane (0.83-1.7$/kgH2), mais le dispositif demanderait des investissements plus importants et seules les centrales à grande échelle ont été prises en compte (ce qui biaise un peu).

3 études ont estimé que la capture de carbone augmente d’environ 10-20% le prix (1998 : $0.93 /kgH2 au lieu de $0.78 ; 2002 : $1.02 au lieu de $0.86 ; 2003 : $1.63 au lieu de $1.34). (p.48)

Pour aller plus loin, vous pouvez consulter notre article sur la production d’hydrogène par gazéification

Gasification de biomasse

Comme ce que nous venons de voir, on chauffe très fort de la biomasse. Le coût dépend beaucoup du matériau utilisé et varie entre 1.44 et 2.83$/kgH2 selon les estimations.

Pour aller plus loin, vous pouvez consulter notre article sur la pyrogazéification ou thermolyse de biomasse.

Electrolyse de l ‘eau

L’électrolyse de l’eau peut se faire par la technologie PEM (proton-exchange membranes) ou SOEC (solid oxide electrolysis cells). Le prix varie beaucoup en fonction de l’énergie utilisée, allant de 10.49$/kgH2 pour le solaire à 4.15 $/kgH2 pour le nucléaire.

Pour aller plus loin, vous pouvez consulter notre article sur la production d’hydrogène par électrolyse de l’eau.

Le prix de l’hydrogène

L’auteur propose plusieurs estimations du prix de l’hydrogène. J’ai un peu de mal à m’y retrouver, mais les ordres de grandeur sont très comparables. Voici quelques extraits :

TechnologiePrix (US$) / GJ d’H2Note
Vaporéformage [de méthane?] (>1000MW)5.25-7.26Dépendant du prix du gaz naturel.
Vaporéformage [de méthane?] (<5MW)11.5-40.4
Gasification du charbon5.4-6.8
Gasification de biomasse7.54-32.61Moyenne : 14.31
Pyrolyse de biomasse6.19-14.98
Electrolyse (>1 MW)11-75
Electrolyse (<1 MW)28-133
Source : Fossil Fuel Hydrogen, Technical, Economic and Environmental Potential, p.46
Se réfère à Ekins, P., S. Hawkins, and N. Hughes. 2010. Hydrogen technologies and costs. In Hydrogen energy—Economic and social challenges, 29–57.
TechnologiePrix (US $)/ kg de H2
Vaporéformage de méthane sans capture de carbone1.3 à 3.01
Vaporéformage de méthane avec capture de carbone1.68 à 2.27
Gasification du charbon sans capture de carbone0.83-1.7
Gasification du charbon avec capture de carbone1.02-2.4
Gasification de biomasse1.06-2.3
Pyrolyse de biomasse1.25-2.2
Electrolyse d’eau (PEM)4.1-5.5
Electrolyse d’eau (SOEC)2.8-5.8
Electrolyse d’eau (énergie solaire)5.78-23.2
Electrolyse d’eau (énergie nucléaire)4.15-7
Source : Fossil Fuel Hydrogen, Technical, Economic and Environmental Potential, p.47
Issu d’une revue de nombreux articles par Castro-Dominguez and
Kazantzis (publié en 2018 ?)

Il conclut en comparant le prix moyen de l’électrolyse SOEC à 4.3$/kg à 2.0$ pour l’hydrogène provenant de vaporéformage de méthane avec capture de carbone. (p.49)

Comment rendre l’hydrogène plus vert ?

L’auteur calcule à partir de ces données qu’il faudrait, pour rendre l’hydrogène vert rentable, il faudrait que la tonne de CO2 soit taxée à 400$/tonne, ce qui semble absurde, celle-ci ne dépassant que rarement les 23$ en Europe. Au contaire, il faudrait seulement élever cette somme à 113$ pour rendre la capture de carbone rentable.

Innovations

Une piste est la production par « plasma processing », mais ils ne détaillent pas.

Pour la production classique, il y a plusieurs pistes d’innovations, comme l’utilisation de nouveaux catalystes () ou bien de nouveaux processus pour chauffer le méthane.

Chapitre 5. Capture de carbone, utilisation et stockage

Le marché des émissions européens (emissions trading system, EU-ETS) couvre environ 45% des émissions de l’UE. Cela représentait en 2014, 1868Mt CO2eq, à 97% des centrales et autres installations industrielles et 3% pour l’aviation. La principale source était la combustion de carburant (1218 Mt CO2–eq). Le raffinage et l’industrie chimique représentait 453 Mt CO2–eq.

Le prix du CO2 a été beaucoup plus faible au début que ce que souhaitait le régulateur. Trop de permis furent accordés au début et la crise financière a encore diminué les émissions de CO2.

En 2019, une « Réserve de stabilité du marché » a été créée, ce qui a permis d’augmenter le prix de la tonne de CO2 à 26€ (maximum depuis plus de 10 ans).

L’importance d’élever le prix du CO2

La capture de carbone aurait besoin d’être davantage incitée. Même avec un prix de 20€/t CO2eq, le charbon serait relativemant plus intéressant sans dispositif de capture de carbone (environ 65€/MWh contre 72€/MWh avec). La capture deviendrait légèrement rentable à partir d’environ 40€ /t CO2eq et très largement plus (80€ contre 110€) si la tonne de CO2 vaut 80€. (p.55, citant The Costs of CO2 Capture, Transport and Storage. European Technology Platform for Zero Emission Fossil Fuel Power Plants, January 4, 2019)

Les modes de capture

Le gaz issu d’une centrale à cycle combiné (utilisant du méthane ?) contiendrait 11% de CO2 (comparé à 0.04% dans l’air « normal »), qui reste donc largement « dilué » dans l’azote (qui représente 78% de l’air « normal »). Pour les séparer et comprimer le CO2 à 150 bar, il faudrait 0.11Mwh/ tonne métrique de CO2. Les auteurs expliquent qu’une stratégie consiste à enrichir pré-combustion l’air utilisée en oxygène pour limiter la concentration d’azote, mais ne précisent pas.

La fumée issue du vaporéformage du méthane (SMR) ou de la gasification par oxidation partielle (POX) est beaucoup plus riche en CO2, ce qui rend la capture de carbone beaucoup plus intéressante.

Il y a d’autres modes de capture :

  • Direct Air Capture (DAC): des filtres / produits pour capturer le CO2.
  • Enhanced Natural Sing (ENS): rendre les puits à carbone naturels plus efficaces.
  • Biomasse: utiliser la photosynthèse pour retirer du CO2 de l’air

Utiliser le carbone

Une fois capturé, le carbone peut être utilisé de nombreuses façons:

  • Carburants synthétiques
  • Produits chimiques
  • Plastiques
  • Ciment
  • Transformation alimentaire

On parle de « Carbon capture and utilisation » (CCU) au lieu de « Carbon capture and stockage » (CCS). Alors que le second est une technologie de gestion des déchets, le premier peut être source de valeur et de profits. Les deux devront évidemment se combiner de toute façon.

C’est une perspective d’autant plus intéressante qu’à très long terme il pourrait y avoir de moins en moins de sources de carbone, à mesure que les ressources fossiles s’épuisent. [Rq: l’argument est très falacieux, on en est très loin je pense; notamment pour le gaz et le charbon]

Chapitre 6. Infrastructure hydrogène

La question du stockage et de la distribution d’hydrogène est particulièrement complexe, notamment si on veut le distribuer aux transports. On se retrouve face à un problème :

  • les consommateurs n’achèteront pas de FCEV s’il n’y a pas de stations pour les ravitailler,
  • les constructeurs n’investiront pas pour des voitures que personnes n’achèteraient et
  • les vendeurs de carburants ne vont pas installer des stations pour des véhicules qui n’existent pas. (p.69)

Air Liquide produit, grâce à environ 50 installations, 0.89 millions de tonnes d’hydrogène. C’est le plus gros producteur en Europe. (p.71)

A température / pression atmosphériques, 1Kg d’hydrogène occupe 11 000 litres. Classiquement on le compresse à 700 bars, pour réduire son volume à 23 litres. Il peut être encore plus condensé en étant transformé en liquide, ce qui suppose de le refroidir à -253°C. Le kg n’occupe alors plus qu’un litre.

La détection de fuite est un vrai problème, surtout pour les pipelines, le gaz étant inodore et sans couleur. Le prix de la surveillance sera sans doute supérieure à celle des pipelines de gaz naturel.

Il y a des pipelines de dihydrogène existants, notamment entre Dunkerque, Liège et Rotterdam; et dans le Golfe du Mexique, entre New Orleans et Clearlake.

Je zappe le chapitre 7 (Proposition de transition du gaz naturel à l’hydrogène au Royaume-Uni) dont je ne comprends pas l’intérêt.

Chapitre 8. Production d’hydrogène à petite échelle

C’était le coeur de la proposition de Jérémy Rifkin dans l’Economie hydrogène : un système de production décentralisé, où tout le monde aurait sa pile à combustible. Voyons ce que proposent les auteurs du présent livre.

Ils voient plusieurs difficultés à une mobilité électrique par batterie :

  • Difficultés à charger pour les habitants d’appartements
  • Prix du déploiement d’une infrastructure de charge par les personnes publiques
  • Les stress causés aux grilles électriques
  • Les voitures électriques ont du mal à chauffer l’habitacle (?)

Ils ne proposent aucun élément. Quels investissements pour les unités à petite échelle ? Quelle perte de rendement ? J’avous être un peu atterré …

Chapitre 9. Cryomagnétique de l’hydrogène, une innovation physique

Ils s’étendent ici sur les attributs de l’hydrogène liquide. Il boue à -253°C et se solidifie à -259°C, ce qui suppose une technologie très précise.

Au delà de cela je ne vois pas l’intérêt de cette partie. Je passe.

Chapitre 10. Décarbonation profonde, le rôle de l’hydrogène

La production d’acier est responsable de 6% des émissions de gaz à effets de serre, notamment en raison du processus chimique impliquant une sorte de charbon, la coke.

Les auteurs proposent d’utiliser de l’hydrogène à la place, ce qui réduirait les émissions de GES de 96%. (p.111) Cela semble très hypothétique et ne cadre pas vraiment avec le sujet, je passe.

Chapitre 11.12 : Conclusion

Les auteurs auraient défendu 3 arguments

  • L’hydrogène fossile avec un procédé de capture de carbone est beaucoup moins cher que l’hydrogène venant d’énergies bas-carbones.
  • L’impact environnemental de l’extraction de gaz naturel peut être équivalent ou même meilleur que celui des énergies renouvelables (Solaire, éolien biomasse), notamment pour le transport et l’occupation au sol.
  • Les capacités techniques et financières des compagnies pétrolière (qui sont aussi des compagnies gazières) rendent crédible l’évolution technologique des procédés.

L’hydrogène vert resterait utile à court terme pour absorber les pics de production d’énergies intermittentes.

Leur réflexion montre que les politiques de rejet radical des investissements dans les industries pétrochimiques serait contre-productif, n’incitant pas à améliorer les pratiques existantes.

Que penser de l’hydrogène fossile ?

L’ouvrage est très intéressant : synthétique, il nous permet de nous plonger en quelque pages au coeur de l’industrie de l’hydrogène (et a beaucoup de sources que j’ai hâte de lire).

Peu de preuves

Néanmoins, il souffre d’une construction très hasardeuse (ex: p.38, il parle d’un processus pour remplacer l’hydrogène dans la désulphurisation pour illustrer l’innovation autour du vaporéformage …) et ne prouve, au final pas grand chose. L’essentiel du livre n’a, en fait, rien à voir avec la question centrale : l’hydrogène fossile peut-il être viable écologiquement ?

De plus, il y a pas mal de choses difficiles à exploiter.

Par exemple, il compare les prix avec ou sans dispositif de capture de carbone. La grande question étant : lesquels ? On ne connait pas leur efficacité, on ne peut pas en déduire grand chose. De même, on ne connait pas les détails de chaque comparaison : quelle production de carbone pour chacun ? Quelle énergie a été utilisée ? Etc.

Enfin, il affirme souvent avoir prouvé des choses, alors qu’en fait .. pas vraiment (Voire pas du tout, je n’ai pas vu de comparaison de l’impact environnemental des différentes énergies).

Un livre restant intéressant

Reste que l’idée est très forte : la production d’hydrogène vert ne va pas être multipliée par 25 (voire >100 si on veut une mobilité hydrogène) du jour au lendemain. Leur conclusion sur le risque d’un désinvestissement dans l’industrie pétrolière aussi : cette pratique aurait, si elle est faite trop radicalement, un effet toxique pour l’environnement.

Bref, ce livre est une très belle source d’information (et surtout de sources <3), mais ne permet absolument pas de se faire une idée sur le sujet traité.

Eléments clairement discutables

Au-delà de ces problèmes, il y a tout de même plusieurs choses qui m’ont fait tiquer.

Point de vocabulaire

Les auteurs préfèrent, plutôt que de parler d’hydrogène brun pour celui issu du gaz et du pétrole, ou bleu pour celui venant du gaz, de parler d’hydrogène « mature ». (p.2) Je ne reprendrai pas cette convention, qui me semble porteuse de jugement (l’électrolyse serait « immature » ?) et peu justifiée.

En effet, son postulat de base me semble faux : on parle d’hydrogène brun pour décrire celui d’origine fossile (pétrole / charbon / gaz) et d’hydrogène bleu pour désigner celui qui, bien que venant d’énergies fossiles, a un impact moindre (ex: parce qu’il y a un dispositif de captation carbone).

Pour plus de clarté, j’ai préféré employer le terme d’hydrogène fossile.

Problème de chiffres ?

Le chiffre de production d’hydrogène par électrolyse de 2 MT (présenté dans le figure 1.1) décrit uniquement celui venant d’énergies renouvelables. Le schéma ne précise pas celui n’étant pas alimenté par des énergies renouvelables (et, l’électrolyse ne supportant, à ma connaissance, pas l’intermittence, c’est vraiment un chiffre bizarre). De plus, ils écrivent plus loin :

« Dans la figure 1.1, la proportion d’électrolyse renouvelable est présentée comme étant de 2%, et la figure 1.2 montre que l’ensemble de l’hydrogène venant d’électrolyse serait de 4%. Clairement, la proportion d’hydrogène vert est actuellement très faible. »

p.3

Or, 2 MT représentent bien 4% du total de production (50 MT) … Bref, une petite coquille … (c’est pour cela que je n’ai pas précisé, en présentant les chiffres de production, comment était alimentée l’électrolyse.)

Des sources discutables

La source :

MarketsandMarkets. Hydrogen generation market by geography, by mode of generation & delivery, applications and technology—Global trends & forecasts to 2019 in Hydrogen Generation Market 2014, 1–156. Washington: MarketsandMarkets Inc.

Un cabinet de conseil. Booon …Dans le même genre, les auteurs annoncent :

« In the USA, the Nikola Motor Company has launched the Nikola One hydrogen-fuelled truck offering a range up to 1000 miles with a 20-minute refuel time. »

p.28-29

Leur source ? Le site internet de Nikola Motor Company … Ils auraient pu se méfier, ce constructeur inconnu prétendant avoir une portée 4 fois plus grande que ceux d’un grand constructeur automobile (Hyundai) … D’autant plus que l’entreprise en question n’a pas vraiment une réputation de sincérité.

Michel Gay est un auteur qui a beaucoup publié de livres (Vive le nucléaire heureux; Sous-exposé !) et d’articles (notamment sur contrepoints) sur la question énergétique, surtout le nucléaire.

Il se présente comme un « simple citoyen« , pilote de chasse à la retraite semble-t-il, et est membre de l’Association des écologistes pour le nucléaire (AEPN), de la Fédération environnement durable (FED), et de la Société française d’énergie nucléaire (SFEN).

Michel Gay adresse, dans plusieurs articles de très dures critiques contre les théories faisant de l’hydrogène vert une solution pour décarbonner les transports ou pour servir de stockage d’énergie pour absorber les variations des énergies renouvelables (ENR).

Nous allons les présenter article par article.

L’hydrogène, cet hallucinogène

Michel Gay 2018, « L’hydrogène, cet hallucinogène« , Contrepoints, 4 juin 2018

Fabriquer du dihydrogène est coûteux en énergie. Pour remplacer les sept milliards de tonnes équivalent pétrole (7MdTep) de pétrole et de gaz consommés par an dans le monde par du H2, les seules solutions viables sont l’électrolyse et la thermolyse de l’eau.

Ce ne serait pas viable pour les véhicules, car le réservoir pour parcourir 600km serait 10 plus gros (400 litres contre 42 litres) et 6 fois plus lourd (240kg contre 40kg) que son équivalent à essence. Le prix serait aussi largement plus élevé, l’hydrogène par électrolyse pour faire 100km coutant 17€.

Ce ne serait pas non plus viable en stockage d’électricité, les pertes étant énormes: 50% pour arriver à la bonbonne avec une pression de 700bars, puis 50% au moment de la restitution par la pile à combustible. De plus, le H2 ne pourrait probablement pas être utilisé dans le réseau de gaz naturel, l’atome hydrogène étant beaucoup plus petit que ce dernier.

« Il faut surtout retenir que l’économie hydrogène consomme en amont 75% à 90 % de l’énergie produite par une autre source d’énergie (nucléaire, vent, soleil, biomasse,…) pour n’en livrer que 10 à 25% à l’utilisateur final à un coût durablement élevé. Il faudra vraiment en avoir besoin pour gaspiller autant d’énergie et donc … d’argent. »

Véhicules : l’avenir n’est pas (du tout) à l’hydrogène

Michel Gay 2019, « Véhicules : l’avenir n’est pas (du tout) à l’hydrogène« , Contrepoints, 20 mai 2019

Il faut, pour faire 100km, 1kg d’lhydrogène, 20kWh d’électricité ou bien 7 litres d’essence. L’auteur estime que la recharge représenterait entre 21 et 35€ pour l’électrique, environ 75€ pour l’essence et … plus de 200€ pour de l’hydrogène vert (ce qui n’arrangerait pas le prix prohibitif des Toyota Mirai, Honda Clarity, et Hyundai Nexo).

Il semble clair que l’avenir n’appartient pas à l’hydrogène …

L’hydrogène, l’éternelle illusion

Michel Gay 2020a, « L’hydrogène, l’éternelle illusion« , Contrepoints, 8 janvier 2020

Cela fait depuis les années 1970 qu’on entend que la production d’hydrogène par électrolyse de l’eau serait un miracle. Plus récemment, c’était le propos de L’économie hydrogène de Jeremy Rifkin.

Seulement 4% de la production mondiale d’hydrogène proviendrait de l’électrolyse, mais surtout comme « sous-produit de la préparation électrolytique du chlore et de l’hydroxyde de sodium ! » Le reste venant du vaporéformage de charbon (4%), pétrole (7%) ou gaz naturel méthane (85%). Il serait « utilisé principalement pour la synthèse d’ammoniac (52 %) composant les engrais » et « dans le raffinage du pétrole et la pétrochimie (38 %) pour éliminer le soufre. »

L’hydrogène peut servir de stockage d’énergie, c’est le « Power to gas » (P2G). Il serait notamment possible de le transformer en méthane. Cela coûterait 3 fois plus cher que le gaz naturel, dont le prix devrait, en plus, diminuer.

Pour la mobilité, le rendement serait abyssal : 16% en prenant en compte le processus dans sa globalité.

Utiliser l’hydrogène comme énergie serait en fait une lubie qui apparait et, dès qu’elle se confronte à la réalité, disparaît, engloutissant dans le processus des sommes gigantesques.

« L’utilisation de l’hydrogène suscite depuis 60 ans un engouement inversement proportionnel à sa réussite, notamment dans la mobilité. Les pouvoirs publics ont voulu mettre en avant cette solution avec des subventions conséquentes, peut-être pour faire rêver leurs électeurs. Mais les impitoyables bilans énergétiques et financiers ont toujours été décevants car les lois de la physique ne se soumettent pas aux décisions politiques. »

L’Allemagne sombre dans l’hydrogène… Et Macron applaudit… (Tribune)

Michel Gay 2020, « L’Allemagne sombre dans l’hydrogène… Et Macron applaudit… (Tribune)« , lemondedelenergie.com, 6 juillet 2020

L’Allemagne a choisi d’investir plusieurs milliards d’euros dans l’hydrogène pour en faire un « carburant du futur » pour remplacer les produtis pétroliers.

Il s’agirait de réguler, grâce à l’H2, la production électrique allemande, très dépendante d’énergies intermittentes. C’est la notion de « Power to gas ». [Rq: il me semble que les électrolyseurs ne tolèrent pas l’intermittence, d’où la solution de Lhyfe, qui permet de gérer ce problème. Bref, à creuser.] Celle-ci a toutefois une rentabilité très mauvaise.

L’un des problèmes d’utiliser l’hydrogène dans les voitures serait le prix prohibitif de la technologie.

L’auteur rappelle les données classiques : l’hydrogène est un vecteur énergétique et non une source d’énergie ; il est produit à 96% par vaporeformage.

L’hydrogène serait au final une farce dont le seul « dindin » serait le contribuable. Michel Gay ne mâche pas ses mots:

« Cette politique énergétique de l’Allemagne et de la France soutenue par l’Europe s’apparente à du «  vol en bande organisée » dont le repaire de brigands est à Bruxelles. »

Hydrogène vert : un jeu de dupes

Michel Gay 2020b, « Hydrogène vert : un jeu de dupes« , Contrepoints, 11 octobre 2020

Michel Gay rappelle que l’énergie n’est pas une source d’énergie, mais un vecteur, un moyen de transport de l’énergie. Il rappelle également la différence entre l’hydrogène gris, produit principalement à partir de méthane et très polluant, et l’hydrogène vert.

Une voiture à hydrogène alimentée par le premier ne polluerait pas moins qu’une voiture à essence.

S’agissant des avions, le stockage serait trop difficile :

De plus, pour les avions, il faudrait utiliser l’hydrogène sous forme liquide à moins 253°C, ce qui est encore plus compliqué. L’expérience a déjà été tentée il y a plus de 30 ans, et ce fut un échec sans résultats probants. Mais aujourd’hui, « on » serait beaucoup plus intelligent, même si les lois de la physique n’ont pas changé.

Enfin, pour remplacer l’essence en France avec de l’hydrogène vert, il faudrait … doubler la capacité d’électricité nucléaire …

L’originalité de cet article est surtout dans sa dénonciation du jeu de dupe consistant à promouvoir l’hydrogène-énergie.

C’est donc un jeu de dupes :

– les uns (pro-nucléaires) soutiennent l’hydrogène parce qu’il aura besoin du nucléaire pour produire régulièrement une grande quantité d’électricité nécessaire à sa production ;

– d’autres au contraire (anti-nucléaires) pour le « tuer » en résolvant techniquement et sans considérations économiques le difficile problème du stockage des énergies renouvelables intermittentes (ou fatalement variables de manière erratique…) ;

– d’autres enfin (industriels comme Air Liquide pour l’hydrogène et Total pour le gaz) afin de développer leurs activités sur de juteuses subventions.

Son analyse est pour le moins impactante:

« Chaque partie participe à un jeu de dupes en cherchant égoïstement à promouvoir ses propres intérêts ou ses croyances incompatibles. »

Hydrogène : j’y ai cru !

Michel Gay 2020c, « Hydrogène : j’y ai cru !« , Contrepoints, 28 octobre 2020

Peu après l’annonce par l’Allemagne de son plan hydrogène (« EnergieWende« ), la commission européenne emboite le pas.

Samuel Furfari, ingénieur-chimiste, qui a travaillé 36 ans dans le domaine de l’énergie et de l’environnement à la Commission européenne, déclare dans son livre « L’utopie hydrogène« : « L’hydrogène, j’y ai cru ! »

Il y montre « pourquoi tous les rêves sur l’hydrogène, et sur les biocarburants, sont voués à l’échec parce que fondés sur une idéologie politique ignorant la science.« 

Samuel Furfari se demande si cette illusion collective n’est pas une erreur assumée par certains politiciens cyniques pour couvrir une autre erreur antérieure : celle du développement à marche forcée des énergies renouvelables intermittentes, poussée par l’Allemagne pour favoriser le gaz !

Le retour de la folie hydrogène 

Michel Gay 2021, « Le retour de la folie hydrogène« , Contrepoints, 20 janvier 2021

Le plan de relance du gouvernement de septembre 2020 accordrerait 7 milliards d’euros à la filière hydrogène-énergie d’ici 2030. Michel Gay a donc rappelé pourquoi c’était absurde.

Tout d’abord, le rendement global du H2-énergie, qui est un vecteur énergétique et non une source d’énergie primaire, serait très faible : 50% pour produire et stocker l’hydrogène, puis encore la moitié restituée aux roues. En face, le système batterie aurait un rendement de 75%, soit trois fois plus élevé …

Pour remplacer le pétrole, il faudrait produire 600TWh d’électricité, sachant que notre parc nucléaire en produit 400.

Il y aurait également le problème du stockage, le réservoir d’une voiture à hydrogène demanderait d’être beaucoup plus lourd (3 fois plus) et volumineux (350 litres contre 60) que son équivalent à essence (pour faire 800km).

L’usage du gaz hydrogène en tant qu’énergie est quasiment inexistant au niveau mondial (1 % pour les fusées) car il est difficile à manier, conditionner, transporter, stocker…

Synthèse: Les critiques de Michel Gay

Des critiques classiques

On retrouve les grandes critiques contre l’hydrogène :

  • L’efficience : on perd énormément d’énergie à passer par l’hydrogène, alors qu’on pourrait utiliser directement de l’électricité.
  • Le stockage : l’hydrogène est particulièrement compliqué à stocker et transporter en raison de sa volatilité et de sa capacité à fuiter. Les réservoirs doivent être spécifiques.

Enfin, cette énergie serait plus dangereuse que les carburants classiques.

Quelques réserves

Je ne comprends pas sa critique de l’avion à hydrogène (« L’expérience a déjà été tentée il y a plus de 30 ans, et ce fut un échec sans résultats probants. Mais aujourd’hui, « on » serait beaucoup plus intelligent, même si les lois de la physique n’ont pas changé. ») : si les lois de la physique n’ont pas changées, ce n’est pas le cas de l’ingénierie et des matériaux disponibles.

Reste que, comme vous le constaterez dans notre synthèse sur l’hydrogène (Hydrogène, autonomie et transition énergétique), nous sommes globalement d’accord avec ses critiques.

Pour aller plus loin

Vous pouvez également lire ce que dit J-M.Jancovici sur le sujet, qui émet des critiques très proches contre l’hydrogène-énergie.

Sur Michel Gay: