Production d’hydrogène par électrolyse de l’eau
L’électrolyse de l’eau est un procédé chimique consistant à séparer les atomes d’hydrogène et d’oxygène de la molécule d’eau grâce à de l’électricité.
Que diriez vous d’un carburant illimité qui pourrait remplacer le pétrole et ne rejetterait que … de l’eau ? Une belle promesse non ? Ne serait-ce pas encore mieux si ce miracle n’avait besoin, pour être produit … que d’eau ? (et de l’électricité, évidemment.) C’est bien celle de l’hydrogène produit par électrolyse, ou « hydrogène vert« . Ce mode de production d’hydrogène est à la fois le plus populaire et le moins utilisé (4% de la production mondiale).
Le principe de l’électrolyse de l’eau
L’électrolyse est un procédé électrochimique par lequel on va venir créer une réaction grâce à un courant électrique. Cella qui nous intéresse ici consiste à transformer de l’eau en dihydrogène (et en oxygène). La première a été réalisée le 2 mai 1800 par William Nicholson et Sir Anthony Carlisle. Ces derniers ont fait une expérience simple : ils ont plongé deux électrodes produisant un courant électrique dans l’eau, et observé que des bulles se formaient autour de chaque électrode (le gaz recueilli au niveau de la cathode sera du dihydrogène et le gaz recueilli autour de l’anode sera du dioxygène).(rq: selon certains, l’électrolyse de l’eau aurait été découverte en 1789)
Il y a principalement 3 éléments :
- Un électrolyte (l’espace qui va transmettre les électrons d’une électrode à l’autre).
- Deux électrodes.
La principale différence entre les différents types d’électrolyse reposera sur
- les conditions de chaleur et de pression
- les matériaux utilisés
Les réactions chimiques
A la cathode va se produire une réaction chimique de réduction qui va libérer du dihydrogène:
2H2O => O2 + 4H+ +4e–
A l’anode va se produire une réaction chimique d’oxydation, qui va venir produire du dioxygène pur:
2H2O+4e– => H2 + OH–
Pour que ces réactions se produisent, il faut une différence de potentiel électrique entre les deux bornes: il est évident que 2H2O resteraient stables sinon.
C’est le principe contraire à la pile à combustible.
Le rôle de l’électrolyte
L’électrolyte va avoir la difficile tâche de laisser passer le courant électrique (les électrons) sans que les gaz produits au niveau des électrodes ne se contaminent. C’est vraiment là qu’est le coeur des différences entre les procédés d’électrolyse de l’eau (PEM, alcalin, oxydes solides). Par exemple, l’électrolyse alcaline utilise un liquide alcalin, ce qui permet d’avoir un système relativement peu cher, mais qui n’est pas très flexible, ni spatialement (le liquide bouge, il n’aime dont pas trop être déplacé), ni pour le courant (il supporte mal les variations). A l’inverse, l’électrolyse PEM est flexible, mais ses électrolyses et l’électrolyte (une membrane, souvent composée de Naflon) coutent très cher.
Calculer le rendement de l’électrolyse
L’efficience de chaque procédé est évaluée selon le rendement de Faraday, ou rendement faradique, qui est égal au rendement réel divisé par le rendement théorique. En effet, en réalité il y a toujours de multiples pertes (notamment d’énergie, avec la chaleur qui s’échappe).
Pour calculer la masse produite lors d’une électrolyse, on utilise les lois de Faraday, qui s’écrivent comme suit :
m = (Q/F) x (M/z)
m est évidemment la masse, Q est la charge électrique, F est la constante de Faraday (96 485 coulombs par mole), M est la masse molaire de la substance et z est la valence de la substance.
Les différentes sortes d’électrolyses de l’eau
Il y a plusieurs types d’électrolyseurs.
L’électrolyse alcaline
L’électrolyse alcaline utilise une solution d’hydroxyde de potassium (KOH, aussi appelée potasse) comme électrolyte. Elle se déroule à température moyenne (80°C à 160 °C) et à pression modérée (3 à 30 bars).
C’est la méthode la plus utilisée, parce qu’elle demande le moins d’investissements, ses matériaux étant ordinaires.
Elle a rendement de 60 à 70% ou 68 à 77%. Son problème est qu’elle supporte mal l’intermittence, elle n’est donc en soi pas adaptée au stockage de l’éolien et du solaire (sauf, si j’ai bien compris, avec la solution de Lhyfe).
Pour aller plus loin :
L’électrolyse PEM (Membrane échangeuse de protons)
L’électrolyse PEM (Proton Exchange Membrane) utilise une membrane solide comme électrolyte.
Elle a un rendement de 62 à 77%
Elle demande des investissements plus conséquents (les électrolyseurs sont 2 fois plus chers), utilisant des métaux nobles (de la platine surtout) pour les catalyseurs. On les utilise notamment pour produire de l’oxygène dans certains sous-marins nucléaires. Ces électrolyseurs sont aussi plus adaptés aux sources d’énergie intermittentes (solaire, éolien).
C’est sensiblement la même chose qu’une pile à combustible (la PEMFC, « Proton Exchange Membrane Fuel Cell« ). Cela veut notamment dire que les efforts de recherche dans le domaine sont doublement utiles.
Cette technologie fonctionne, normalement, à une température modérée (70 à 80°C). Des recherches expérimentent cette technologie à 130-180°C.
Pour aller plus loin :
L’électrolyse à haute température
Des technologies proposent de se passer des catalyseurs nobles de l’électrolyse PEM en fonctionnant à hautes températures. Paradoxalement, cela diminuerait radicalement les coûts d’investissement et de fonctionnement.
C’est par exemple le cas de l’électrolyse SOEC (Solid Oxide Electrolysis Cell). En augmentant la température de l’électrolyse à entre 700 et 1000 °C, on est capable d’améliorer radicalement l’efficacité: le processus atteindrait un rendement de 90%.
« Les projections technico-économiques pour les très grosses unités permettent d’envisager un coût de l’ordre de 2€/kg, ce qui est inférieur aux autres technologies d’électrolyse et qui se rapproche du coût de l’hydrogène produit actuellement par vaporéformage d’hydrocarbures … les émissions de CO2 en moins. »
Vers la production massive d’hydrogène décarboné
Les unités seraient, en plus, réversibles, c’est-à-dire qu’elles pourraient faire office de piles à combustibles et être ainsi idéales pour le stockage d’énergies intermittentes.
Pour aller plus loin :
- « L’électrolyse à haute température : la révolution du CEA«
- « Genvia: industrialiser des électrolyseurs à oxyde solide à haute performance »
L’électrolyse à membrane échangeuse d’anions
L’électrolye à membrane échangeuse d’anions (AEM, anion exchange membrane) permettrait de combiner les avantages de
- l’électrolyse alcaline en utilisant un environnement basique, peu agressif pour les matériaux, permettant l’utilisation de métaux classiques comme électrodes ;
- l’électrolyse PEM en utilisant une membrane permettant un design compact.
Les projets Gen-Hy et Enapter sont notamment situés sur cette technologie. Cette dernière est toutefois encore expérimentale.
Pour aller plus loin, vous pouvez lire notre article sur l’électrolyse à membrane échangeuse d’anions.
Entreprises et projets autour de l’électrolyse de l’eau
J’ai présenté plusieurs entreprises portant sur l’électrolyse de l’eau :
Synthèse (en cours)
Voici quelques synthèses, glanées dans quelques ouvrages très intéressants:
Pour aller plus loin
- Notre article sur l’histoire de l’électrolyse
- M. Carmo, D.L. Fritz, J. Mergel, D. Stolten, A comprehensive review on PEM water electrolysis, Int. J. Hydrogen Energy 38 (2013) 4901-4934
- Olivier, P., Bourasseau, C. & Bouamama, P. B. Low-temperature electrolysis system modelling: A review. Renew. Sustain. Energy Rev. 78, 280–300 (2017).
- Ferrero, D., Lanzini, A., Santarelli, M. & Leone, P. A comparative assessment on hydrogen production from low- and high-temperature electrolysis. Int. J. Hydrogen Energy 38, 3523–3536 (2013).
- Rashid, M. M., Mesfer, M. K. Al, Naseem, H. & Danish, M. Hydrogen Production by Water Electrolysis: A Review of Alkaline Water Electrolysis, PEM Water Electrolysis and High Temperature Water Electrolysis. Int. J. Eng. Adv. Technol. 2249–8958 (2015).
- Schalenbach, M., Zeradjanin, A. R., Kasian, O., Cherevko, S. & Mayrhofer, K. J. J. A perspective on low-temperature water electrolysis—Challenges in alkaline and acidic technology. Int. J. Electrochem. Sci. 13, 1173–1226 (2018).
Cet article fait partie de notre dossier “Hydrogène, autonomie et transition énergétique“.