Le combustible nucléaire TRISO: histoire et perspectives

Le combustible nucléaire TRISO (Tri-Structural Isotropic) est un type de combustible avancé composé de minuscules particules d’uranium enfermées dans des couches protectrices en carbure de silicium et en nitrure de bore, qui servent de première barrière de confinement pour retenir les produits de fission. Utilisé principalement dans les réacteurs à haute température (HTR), ce combustible présente des avantages significatifs en termes de sûreté et de performance.

Historique

Le développement du combustible TRISO a débuté dans les années 1960, principalement aux États-Unis et en Allemagne (1). À l’origine, la technologie était conçue pour être utilisée dans les réacteurs à boulets de graphite (Pebble Bed Reactors, PBR) et les réacteurs à éléments combustibles prismatiques (Prismatic Block Reactors, PBR) (2). Depuis lors, le combustible TRISO a été testé et utilisé dans plusieurs projets de réacteurs à haute température à travers le monde.

Composition du combustible TRISO

Le combustible TRISO est composé de trois couches de matériaux différents qui entourent une particule d’uranium (3) :

  • Une couche de carbone pyrolytique (PyC) : Cette première couche de protection offre une résistance mécanique et une barrière contre la corrosion.
  • Une couche de carbure de silicium (SiC) : Cette couche intermédiaire sert de barrière contre la fission des produits et les gaz, tout en offrant une résistance mécanique et une résistance à la corrosion.
  • Une couche externe de carbone pyrolytique (PyC) : Cette dernière couche de protection sert de barrière mécanique et de confinement des produits de fission.

Les particules ont ainsi l’aspect de billes de 1 millimètre d’épaisseur environ. Elles sont ensuite compactées dans une poudre de graphite, formant ainsi des « compacts » de particules de 2,5 centimètres de hauteur et 1,2 centimètre de diamètre.

Les avantages du combustible TRISO

Ces trois couches confèrent au combustible TRISO plusieurs avantages par rapport aux combustibles nucléaires conventionnels :

  • Sûreté améliorée : La structure multicouche du combustible TRISO permet de confiner efficacement les produits de fission et les gaz, ce qui réduit considérablement les risques de libération de radioactivité en cas d’accident (4). Résistance à la corrosion : Les couches en carbure de silicium et en carbone pyrolytique offrent une résistance à la corrosion, ce qui prolonge la durée de vie du combustible et réduit les risques de défaillance du combustible (5). Le Department of Energy américain va jusqu’à considérer les particules Triso comme « The most robust fuel on earth », ces particules permettant de contenir plus de 99.99% des produits de fission, y compris en cas accidentel.
  • Tolérance à la chaleur : Le combustible TRISO peut résister à des températures extrêmement élevées, jusqu’à 1 600 degrés Celsius (6). Cette tolérance à la chaleur permet aux réacteurs HTR de fonctionner à des températures plus élevées, ce qui améliore leur rendement thermodynamique et leur efficacité énergétique.
  • Réduction des déchets nucléaires : Le combustible TRISO offre une utilisation plus efficace de l’uranium et une meilleure gestion du cycle du combustible, ce qui peut réduire le volume des déchets nucléaires produits (7).

Statistiques et faits sur la technologie TRISO

Selon l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA), plusieurs projets de réacteurs nucléaires utilisant la technologie TRISO sont en cours de développement ou en exploitation dans le monde (8). Parmi les projets les plus avancés, on peut citer :

  • Le réacteur à haute température modulaire (HTR-PM) en Chine, qui est en cours de construction et devrait être mis en service d’ici 2023 (9).
  • Le projet de réacteur à haute température (HTR) d’EDF en France, qui vise une mise en service d’ici 2030 (10).
  • Le réacteur à sels fondus intégral (IMSR) de Terrestrial Energy au Canada, qui utilise également du combustible TRISO et devrait être opérationnel d’ici la fin des années 2020 (11).

Le microréacteur modulaire développé par la startup française Jimmy utiliserait ce combustible.

En outre, plusieurs entreprises et organisations de recherche, telles que l’Oak Ridge National Laboratory (ORNL) aux États-Unis, mènent des travaux de recherche et développement pour améliorer la technologie TRISO et explorer de nouvelles applications potentielles (12).

Conclusion

La technologie du combustible nucléaire TRISO offre des avantages significatifs en termes de sûreté, de performance et de réduction des déchets nucléaires. Alors que les réacteurs à haute température gagnent en popularité et que de nouveaux projets de réacteurs utilisant le combustible TRISO sont en cours de développement, cette technologie semble prometteuse pour l’avenir de l’énergie nucléaire.

Les défis à relever pour le déploiement à grande échelle de la technologie TRISO comprennent la mise en place d’une chaîne d’approvisionnement en combustible, la régulation et la certification des nouveaux réacteurs, ainsi que l’acceptation publique. Néanmoins, si ces défis sont relevés avec succès, le combustible TRISO pourrait jouer un rôle clé dans la transition énergétique mondiale vers des sources d’énergie plus sûres et durables.

[Article à réviser]

Sources :

  • (1) World Nuclear Association, « Advanced Nuclear Power Reactors, » 2021.
  • (2) Forsberg, C. W., « High-temperature, gas-cooled reactors, » The American Nuclear Society, 2011.
  • (3) B. J. Merrill, « TRISO Fuel Performance: Modeling and Analysis, » Idaho National Laboratory, 2019.
  • (4) Serco Assurance, « Coated Particle Fuel Technology, » 2006.
  • (5) J. W. Moll, « TRISO Coated Fuel Particle Properties and Design Considerations, » 2008.
  • (6) Verfondern, K. & Nabielek, H., « Status of coated particle fuel development in Germany, » Nuclear Engineering and Design, 2008.
  • (7) World Nuclear Association, « Nuclear Fuel Cycle Overview, » 2021.
  • (8) IAEA, « Advanced Reactors Information System (ARIS), » 2021.
  • (9) World Nuclear News, « China’s HTR-PM reactor achieves first criticality, » 2021.
  • (10) EDF, « The High-Temperature Reactor (HTR) project, » 2021.
  • (11) Terrestrial Energy, « Integral Molten Salt Reactor (IMSR), » 2021.
  • (12) Oak Ridge National Laboratory, « TRISO Fuel Research, » 2021.
  • https://doseequivalentbanana.home.blog/2020/08/10/triso-et-reacteurs-a-haute-temperature/
  • https://www.jimmy-energy.eu/combustible
  • https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0022311520302464