Les combustibles nucléaires: uranium, cesium, thorium, MOX …

Les combustibles nucléaires doivent permettre de déclencher une réaction nucléaire. Pour cela, ils doivent, en principe, être « fissiles ». On utilise aujourd’hui, pour cela, essentiellement de l’uranium. Une autre piste explorée, encore expérimentale, consiste à utiliser du thorium. Les réserves de combustible sont considérables et ne semblent pas présenter de risque de manque d’approvisionnement. C’est d’autant plus clair que des technologies, déjà très avancées, de réacteurs permettraient même de multiplier le combustible utilisable par 100, en utilisant l’intégralité de l’uranium 238.

I. L’uranium, le principal combustible nucléaire

Aujourd’hui, la plupart des réacteurs fonctionnent essentiellement à l’uranium sous forme de combustible UOX, c’est-à-dire de dioxyde d’uranium.

L’uranium enrichi: le combusible UOX (Uranium diOXyde)

Le combustible utilisé pour la fission est dit « fissile ». Actuellement, tout part de l’uranium. Il est extrait de la roche, dissous et traités jusqu’à ce qu’on obtienne une poudre jaune (le « yellow cake »), composée à 99.3% d’uranium 238, non fissile et seulement à 0.7% d’uranium 235, fissile. Or, on veut que l’uranium 235 représente entre 3 et 5% du total. Pour cela, le « yellow cake » va être transformé en gaz et passé dans une centrifugeuse, qui va permettre de séparer l’uranium « appauvri » qui a perdu tout son uranium 235 et l’uranium « enrichi », qui sera utilisé comme combustible. Enfin, ce dernier est transformé en combustible « UOX ».

Il se présente sous forme de petites pastilles de 7g, qui sont alignées dans des tubes de zirconium. On appelle l’ensemble « crayons de combustible ». En France, ils font 4 mètres. Leur durée de vie est de 3 à 4 ans.

Après un premier usage, il y a 96% de matières réutilisables: de l’uranium 235, 238 et 1% de plutonium, qui peut être réutilisé sous forme de combustible MOX. MOX est l’acronyme de « Mixed uranium and plutonium OXide ». Son principal intérêt est « de recycler potentiellement 96 % des combustibles nucléaires usés, tout en divisant par 5 le volume des déchets de haute activité et par 10 la radiotoxicité des déchets, par rapport à un stockage des combustibles usés sans traitement« . Il est utilisé dans 22 réacteurs français. (SFEN) Lui ne peut, par contre, pas être recyclé pour l’instant. On parle de monorecyclage. L’uranium utilisé (« uranium de retraitement », URT), peut aussi potentiellement être réenrichi. On parle alors du combustible URE. C’est peu pratiqué. Nous développons dans un article dédié le cycle de vie de l’uranium enrichi.

L’uranium peut également être encore plus enrichi, comme dans le combustible HALEU ((High-Assay Low-Enriched Uranium), pouvant contenir jusque 20% d’uranium 235.

II. Le thorium : un combustibles alternatif ?

Le thorium est envisagé pour faire un combustible car, même s’il n’est pas lui-même fissile, il peut, en capturant un neutron dans le réacteur, se transformer en uranium 233, qui lui est fissile. De plus, les déchets sont plus faciles à gérer: les résidus produits contiennent moins d’actinides mineurs et ne produisent pas de plutonium (rq: ce dernier n’est pas vraiment un déchet, puisqu’il peut etre recyclé en MOx). Cette piste demandera plus de 20 ans pour passer à l’échelle industrielle. (SFEN)

Selon le CEA, il y a plusieurs obstables au développement d’une filière au thorium :

  • Il faudrait développer toute une filière d’extraction, transformation du combustible, de réacteurs et de retraitement des déchets.
  • Le procédé de retraitement des déchets au thorium, procédé thorex, n’a été expérimenté qu’au niveau pré-industriel.

C’est une piste qui, en soi, aurait peu d’intéret, la filière uranium étant déjà très mature. Seule l’Inde pourrait y avoir un intérêt, ayant d’importantes réserves de thorium et ayant eu des difficultés d’approvisionnement en uranium. Ce dernier problème est moindre depuis 2008. Ses perspectives pourraient être plus intéressantes à très long terme, dans le cadre du développement de la 4e génération de réacteurs. Ainsi, le CNRS étudie des réacteurs à sels fondus utilisant du thorium.

L’article de la World Nuclear Association contient de nombreux détails.

III. Les réserves de combustibles: pour combien de temps ?

Les réserves identifiées d’uranium sont suffisantes pour une centaine d’années. Néanmoins, cette estimation n’inclut que les gisements commercialement viables. De plus, le prix de la ressource étant relativement bas, elle est l’objet de peu de recherches.

S’agissant du thorium, il y a 6 355 milliers de tonnes de réserves identifiées, dont une large part (846 000t) en Inde. Il ne me semble pas que le sujet ait été beaucoup creusé, vu qu’il n’y a actuellement pas de débouché.

IV. Le combustible du futur: le cas des réacteurs à neutrons rapides

Les réacteurs actuels n’utilisent qu’une petite partie de l’uranium, parce qu’ils pratiquent la fission à « neutrons lents ». Ils ont donc surtout besoin d’une matière directement fissile (c’est-à-dire pouvant générer une réaction en chaîne). Comme nous l’avons vu, seule une petite partie de l’uranium naturel est fissile (l’uranium 235, représentant 0.7% de l’uranium naturel). Après utilisation, 95% de l’uranium reste …

Les réacteurs à neutron rapides pourraient changer cela. En effet, ils pourraient consommer tout le combustible. Le développement de la surgénération avec les réacteurs à neutrons rapides rendrait les réserves en combustible virtuellement illimitées, multipliant par 100 l’efficience du combustible présent et passé.