Pourquoi Volkswagen renonce à la voiture à hydrogène ?

Malgré plusieurs expérimentations, notamment avec la gamme Audi, le PDG de Volkswagen a récemment affirmé que le constructeur allemand ne proposerait pas de voiture à hydrogène.

Il a même affirmé au Financial Times:

« Vous ne verrez aucune utilisation d’hydrogène dans les voitures. Pas même dans 10 ans, parce que la physique derrière tout cela est tellement déraisonnable. Vous ne pouvez monter et démonter la pile à combustible comme un moteur à combustion. Vous avez également besoin d’une autre batterie de 10 kW, d’un moteur électrique et de la pile à combustible. « 

https://www.turbo.fr/actualite-automobile/les-groupes-stellantis-et-volkswagen-ne-croient-pas-lhydrogene-175611

Il a notamment développé son point de vue sur Twitter, affirmant :

« Il est temps pour les politiciens d’accepter la science: l’hydrogène vert est nécessaire pour l’acier, l’industrie chimique, aéro(spatial/nautique?) … et ne devrait pas finir dans des voitures. Trop cher, inefficient, lent et difficile à extraire et à transporter. Au final: pas de voiture à hydrogène en vue. »

Twitter, Février 2021

Je ne suis pas sûr de son avis sur les camions, pour lesquels l’électrique est classiquement considéré comme moins viable.

Rappelons que Mercedes a également récemment renoncé à développer sa voiture à hydrogène, la Mercedes GLC F-Cell.

Un point de vue répandu

Son point de vue est répandu: pourquoi utiliser de l’électricité pour créer de l’hydrogène pour … créer de l’électricité ? Il y a des pertes importantes, le système consomme par nature environ 3 fois plus d’énergie … Le seul intérêt semble être le fait de moins faire pression sur les ressources rares, mais même cet argument est discutable, la pile à combustible demandant de la platine et le stockage de l’hydrogène demandant des équipements très lourds.

https://pbs.twimg.com/media/Et7uZxiXMAc0XPa?format=jpg&name=900x900
Un graphique qui résume assez bien l’enjeu glâné sur Twitter.

C’est par exemple le coeur de la critique de Jancovici contre l’hydrogène. Le rendement est juste trop faible et n’a pas vraiment d’intérêt.

Daniel Breton, lobbyiste nuancé et intéressant

J’ai trouvé des arguments comparables dans la discussion entre guideautoweb.com, qui raconte son test de la Hyundai Nexo et Daniel Breton, un lobbyiste pro-électrique (dirigeant de Mobilité électrique Canada), dont j’ai trouvé l’interview très intéressante.

Il commence par rappeler un peu qu’il y avait déjà eu une période où les constructeurs se lançaient dans l’hydrogène, motivés par de grosses subventions du temps de Bush. Au final, l’effort n’avait pas donné de vraie solution et les véhicules avaient été transformés pour utiliser du propane.

S’il estime qu’il pourrait y avoir un marché pour les véhicules lourds, il n’y croit pas pour les voitures.

Temps de recharge et autonomie

Le principal intérêt de l’hydrogène serait le temps de ravitaillement, mais d’une part on ne pourrait pas le ravitailler partout (il y a peu de stations hydrogène) et les batteries se chargent de plus en plus vite (400km d’autonomie en 15min).

Le prix de l’hydrogène serait problématique: ça coûte plus cher qu’un véhicule à essence. En plus, 95% de l’hydrogène est produit à partir d’énergie fossile. Même l’électrolyse avec de l’énergie renouvelable n’aurait pas vraiment de sens en raison des pertes énergétiques.

« Sauf que le problème est que la perte énergétique dans le processus de production de cette énergie-là fait en sorte que pour faire avancer une voiture à hydrogène il faut autant d’énergie que pour faire avancer 3 voitures électriques. »

7′

Le problème du ravitaillement

Il y aurait aussi le problème des stations de ravitaillement hors de prix (5.2 millions de $ pour l’une d’elles). Le journaliste raconte d’ailleurs que, en testant la Hyundai Nexo, il avait vu des Toyota Mirail garées devant un bâtiment gouvernemental et que l’une des personnes chargées de les conduire lui avait confié qu’elles étaient immobiles depuis 4 mois … (8′)

Perspectives possibles

Pour les véhicules lourds longue distance le gain de l’hydrogène en autonomie et en temps de recharge serait intéressant. Pour les véhicules courts-moyenne distance, l’électrique commencerait même déjà à être mieux. Une autre piste serait les avions ou un système hybride pour les bâteaux.

Je passe sur le reste, qui me semble plus anecdotique.