L’hydrogène d’origine fossile, potentiel technique, économique et environnemental

Lorsqu’on parle d’hydrogène en écologie, c’est toujours en ayant en tête l’hydrogène vert, venant d’une électrolyse alimentée par un énergie bas carbone. Dans cet article, nous vous présenterons néanmoins un livre, dans lequel les auteurs vantent les mérites de l’hydrogène fossile associé à des dispositifs de captation carbone:

Fossil Fuel Hydrogen, Technical, Economic and Environmental Potential, de William J.Nuttall et Adetokunboh T.Bakenne, éditions Springer, 143 pages

Je reprends les points importants à mesure qu’ils sont présentés dans l’ouvrage.

Plusieurs points m’interrogent: ils présentent la CCUS comme une technologie mature, ce qu’elle n’est pas (du tout), ils ne distinguent pas gazéification du charbon (procédé mature bien connu) de la pyrogazéification de biomasse (procédé qui doit encore passer à l’échelle) et les prix annoncés pour chaque procédé me semble assez aberrants (la fourchette haute du SMR avec CCUS est moins élevée que celle du SMS sans …). Le livre n’en reste pas moins intéressant, montrant la perspective du sujet qu’on beaucoup de scientifiques / industriels.

Chapitre 1. Production et utilisation d’hydrogène

Les auteurs ont analysé plusieurs sources publiées entre 2004 et 2013 pourtant sur la production / consommation mondiales et en déduisent, globalement …

[je noterait l’unité, le million de tonnes métriques, MT]

La consommation de dihydrogène

Le principal consommateur est la production d’ammoniaque (27MT), beaucoup utilisée pour les engrais. Viennent ensuite les raffineries, pour l’ « hydrocraquage » (« hydrocracking », 7 MT) et l’ hydrotraitement (« hydrotreating », 10.5 MT).

Plus marginaux on utilise aussi du H2 dans les piles à combustible (2 MT), pour le métal (1 MT), le verre et la céramique (0,5 MT), l’alimentation (0,5 MT), l’électronique (0,5 MT), les plastiques (0,5 MT) et les médicaments (0,5 MT).

Notez qu’il contredit un peu (les ordres de grandeur restent les mêmes) cette répartition dans la figure 1.5 (p.6) :

Fossil Fuel Hydrogen, Technical, Economic and Environmental Potential, p.6

Désulphuriser le pétrole: l’hydrotraitement

Le souffre causant des dégats importants (santé, pluies acides …), le pétrole ne peut pas en contenir beaucoup. Pour le désulfuriser on utilise de grandes quantités d’hydrogène, qui va venir réagir avec le souffre pour former du sulfure d’hydrogène (H2S), qu’on peut aisément séparer du pétrole. C’est ce qu’on appelle l’ « hydrotraitement«  (hydrotreating). (p.1)

Notez que des pistes existent pour remplacer ce procédé par la desulphurisation oxydative ou bien l’utilisation d’eau supercritique. (p.38) Je ne détaille pas.

« Craquer » le pétrole lourd: l’hydrocraquage

La diminution des réserves de pétrole encourage l’extraction de pétroles plus lourds, de plus faible qualité. Il faut les casser en molécules plus petites avant de les utiliser. Pour cela, on emploie de l’hydrogène, c’est lhydrocraquage (hydrocracking)

Pour la production de dihydrogène

La principale source est le gaz naturel (23MT), suivie par la naphte (15MT), le charbon (9.5MT), puis l’électrolyse par vapeur (1.6MT) et l’électrolyse à température ambiante (0.4MT). (p.1)

En pourcentages, cela donnerait 48% pour le gaz, 18% pour le charbon, 30% pour le pétrole et 4% pour l’électrolyse. (p.3)

L’hydrogène fossile: un impératif à court terme

L’hydrogène fossile, et plus précisément le vaporeformage du méthane, domine actuellement largement la production d’hydrogène et le restera nécessairement à court ou moyen terme.

Ce serait, du reste, une première solution viable pour diminuer les émissions du transport. En effet, alors que les moteurs à combustion libèreraient 1250 (gasoil) ou 1300 (diesel) grammes de CO2 par kWh, une pile à combustible alimentée par de l’hydrogène venant de gaz naturel n’en produirait que 800 (200 si l’hydrogène avait été conçu à l’aide d’énergie éolienne). [Rq : Ces chiffres proviennent d’un cabinet de conseil. Je n’ai pas du tout confiance.]

Savoir s’il n’est pas possible de rendre l’hydrogène fossile plus environnementalement responsable serait donc une question extrêmement importante.

Considérations marchandes

Le marché de l’hydrogène représenterait plus de 100 milliards $ et atteindrait le double en 2025. 88% de ce marché serait « captif », réalisé par et pour l’industrie pétrochimique. Parmi les 12% restant, les principales entreprises sont : Air Products and Chemicals Inc. (USA), Air Liquide (France), Linde AG (Germany) incorporating BOC Ltd (UK), and Praxair (USA). Le français était en tête avant 2018, date à laquelle Paxair et Linde auraient fusionné et, leur capitalisation dépassant 90 milliards $, ainsi pris la première place.

Globalement (la réalité étant évidemment plus complexe), l’hydrogène fossile serait 3.7 fois moins cher que l’hydrogène vert. Néanmoins, l’utilisation d’un système de capture du carbone diminue ce chiffre à 1.8.

Chapitre 2. Le futur de l’énergie et de la mobilité

Dans ce chapitre, les auteurs présentent les évolutions et les perspectives de la mobilité hydrogène. La partie est très synthétique et intéressante, mais je vais quand même essayer d’aller vite.

Il présente rapidement les différents types de piles à combustibles (DMFC, PAFC, PEMFC, SOFC … je vous renvoie à mon article sur le sujet).

Toyota, après avoir réussi à capturer 2.3% du marché de l’automobile américain grâce à sa Prius, popularisant la voiture hybride, a été le premier constructeur automobile à vendre au public une voiture à hydrogène : la Toyota Mirai. Sa puissance était de 114kW et le réservoir, pouvant contenir environ 5kg d’hydrogène, lui donnait une portée de 310 miles (=498 km). Le prix était de £65,219 en 2018.

Sécurité

Les principaux risques de l’hydrogène sont liés à sa possibilité d’exploser spontanément dans l’air, lorsqu’il représente 18.3 à 59% du volume. La molécule de dihydrogène étant extrêmement petite, empêcher les fuites est un challenge difficile. Ce gaz étant incolore et inodore, ces dernières sont difficiles à repérer.

Il faut en outre rappeler que l’essence n’est pas sans risque et la possibilité d’explosion en cas d’accident est très importante. Au final, si la sécurité des FCEV est un élément important, il est exagéré dans l’opinion public, notamment à cause de l’explosion du Hindenburg.

Recharge

Les FCEV (Fuel Cell Electric Vehicles) ont un impact environnemental « du réservoir aux roues » très faible et peuvent être rechargés de manière similaire aux véhicules à essence actuels en termes de rapidité.

L’autonomie est la capacité à charger rapidement est un facteur différenciant important comparé aux véhicules électriques à batterie (BEV). En Juin 2016, il y a d’ailleurs eu une voiture alimentée à l’hydrogène, « Green GT H2 », qui participa aux 24h du Mans.

On peut se demander comment les urbains rechargeront leurs BEV. Les gouvernements étant en difficulté financière depuis la crise de 2008 auraient du mal à financer des bornes publiques. Au contraire, les infrastructures de recharge d’hydrogène seraient comparables à celles pour l’essence (en termes de financement / business model par exemple je suppose).

Perspectives

Ce seraient néanmoins les transports de longue distance et les flottes de bus qui seraient les secteurs pouvant le mieux / le plus vite être intéressés par l’hydrogène. Ainsi Hyundai aurait annoncé une vente de 1000 camions à hydrogène ayant une portée de 250 miles pour l’entreprise H2 Energy.

S’agissant des trains à hydrogène, ils pourraient être intéressants pour des tronçons inadaptés pour l’électrification. Un train à hydrogène Alstom opère d’ailleurs sur 100km en Allemagne.

Chapitre 3-4. Méthodes de production d’hydrogène

(Oui la question est répartie sur deux chapitres, c’est un problème de construction assez terrible. Heureusement que vous lisez cette synthèse ^^)

Vaporéformage du méthane (SMR)

Il s’agit ici de faire réagir, en chauffant à plus de 700°C, le méthane et la vapeur d’eau : CH4 + H2O → CO + 3H2. Ensuite, on essaye de faire réagir le monoxyde de carbone avec la vapeur d’eau : CO + H2O → CO2 + H2.

Les émissions de CO2 correspondantes seraient causées à 40% par la combustion nécessaire pour chauffer le dispositif et à 60% par la réaction chimique elle-même.

Le prix de production de l’hydrogène par électroyse utilisant l’énergie éolienne serait entre $2.85 et 7.3 par kg de H2, avec une médiane à 4.8$. Pour le vaporéformage de méthane, sans dispositif de capture de carbone, le prix est beaucoup plus bas : entre 0.55$ et 2.04$ avec une médiane à 1.3$. (p.36)

Pour aller plus loin, vous pouvez lire notre article sur la production d’hydrogène par vaporéformage de méthane.

Gasification par oxidation partielle (POX)

La gasification par oxidation partielle (POX) consiste à chauffer très fortement du charbon (800-1200°C) en présence d’oxygène. Ses coûts variables seraient plus faibles que le vaporéformage de méthane (0.83-1.7$/kgH2), mais le dispositif demanderait des investissements plus importants et seules les centrales à grande échelle ont été prises en compte (ce qui biaise un peu).

3 études ont estimé que la capture de carbone augmente d’environ 10-20% le prix (1998 : $0.93 /kgH2 au lieu de $0.78 ; 2002 : $1.02 au lieu de $0.86 ; 2003 : $1.63 au lieu de $1.34). (p.48)

Pour aller plus loin, vous pouvez consulter notre article sur la production d’hydrogène par gazéification

Gasification de biomasse

Comme ce que nous venons de voir, on chauffe très fort de la biomasse. Le coût dépend beaucoup du matériau utilisé et varie entre 1.44 et 2.83$/kgH2 selon les estimations.

Pour aller plus loin, vous pouvez consulter notre article sur la pyrogazéification ou thermolyse de biomasse.

Electrolyse de l ‘eau

L’électrolyse de l’eau peut se faire par la technologie PEM (proton-exchange membranes) ou SOEC (solid oxide electrolysis cells). Le prix varie beaucoup en fonction de l’énergie utilisée, allant de 10.49$/kgH2 pour le solaire à 4.15 $/kgH2 pour le nucléaire.

Pour aller plus loin, vous pouvez consulter notre article sur la production d’hydrogène par électrolyse de l’eau.

Le prix de l’hydrogène

L’auteur propose plusieurs estimations du prix de l’hydrogène. J’ai un peu de mal à m’y retrouver, mais les ordres de grandeur sont très comparables. Voici quelques extraits :

TechnologiePrix (US$) / GJ d’H2Note
Vaporéformage [de méthane?] (>1000MW)5.25-7.26Dépendant du prix du gaz naturel.
Vaporéformage [de méthane?] (<5MW)11.5-40.4
Gasification du charbon5.4-6.8
Gasification de biomasse7.54-32.61Moyenne : 14.31
Pyrolyse de biomasse6.19-14.98
Electrolyse (>1 MW)11-75
Electrolyse (<1 MW)28-133
Source : Fossil Fuel Hydrogen, Technical, Economic and Environmental Potential, p.46
Se réfère à Ekins, P., S. Hawkins, and N. Hughes. 2010. Hydrogen technologies and costs. In Hydrogen energy—Economic and social challenges, 29–57.
TechnologiePrix (US $)/ kg de H2
Vaporéformage de méthane sans capture de carbone1.3 à 3.01
Vaporéformage de méthane avec capture de carbone1.68 à 2.27
Gasification du charbon sans capture de carbone0.83-1.7
Gasification du charbon avec capture de carbone1.02-2.4
Gasification de biomasse1.06-2.3
Pyrolyse de biomasse1.25-2.2
Electrolyse d’eau (PEM)4.1-5.5
Electrolyse d’eau (SOEC)2.8-5.8
Electrolyse d’eau (énergie solaire)5.78-23.2
Electrolyse d’eau (énergie nucléaire)4.15-7
Source : Fossil Fuel Hydrogen, Technical, Economic and Environmental Potential, p.47
Issu d’une revue de nombreux articles par Castro-Dominguez and
Kazantzis (publié en 2018 ?)

Il conclut en comparant le prix moyen de l’électrolyse SOEC à 4.3$/kg à 2.0$ pour l’hydrogène provenant de vaporéformage de méthane avec capture de carbone. (p.49)

Comment rendre l’hydrogène plus vert ?

L’auteur calcule à partir de ces données qu’il faudrait, pour rendre l’hydrogène vert rentable, il faudrait que la tonne de CO2 soit taxée à 400$/tonne, ce qui semble absurde, celle-ci ne dépassant que rarement les 23$ en Europe. Au contaire, il faudrait seulement élever cette somme à 113$ pour rendre la capture de carbone rentable.

Innovations

Une piste est la production par « plasma processing », mais ils ne détaillent pas.

Pour la production classique, il y a plusieurs pistes d’innovations, comme l’utilisation de nouveaux catalystes () ou bien de nouveaux processus pour chauffer le méthane.

Chapitre 5. Capture de carbone, utilisation et stockage

Le marché des émissions européens (emissions trading system, EU-ETS) couvre environ 45% des émissions de l’UE. Cela représentait en 2014, 1868Mt CO2eq, à 97% des centrales et autres installations industrielles et 3% pour l’aviation. La principale source était la combustion de carburant (1218 Mt CO2–eq). Le raffinage et l’industrie chimique représentait 453 Mt CO2–eq.

Le prix du CO2 a été beaucoup plus faible au début que ce que souhaitait le régulateur. Trop de permis furent accordés au début et la crise financière a encore diminué les émissions de CO2.

En 2019, une « Réserve de stabilité du marché » a été créée, ce qui a permis d’augmenter le prix de la tonne de CO2 à 26€ (maximum depuis plus de 10 ans).

L’importance d’élever le prix du CO2

La capture de carbone aurait besoin d’être davantage incitée. Même avec un prix de 20€/t CO2eq, le charbon serait relativemant plus intéressant sans dispositif de capture de carbone (environ 65€/MWh contre 72€/MWh avec). La capture deviendrait légèrement rentable à partir d’environ 40€ /t CO2eq et très largement plus (80€ contre 110€) si la tonne de CO2 vaut 80€. (p.55, citant The Costs of CO2 Capture, Transport and Storage. European Technology Platform for Zero Emission Fossil Fuel Power Plants, January 4, 2019)

Les modes de capture

Le gaz issu d’une centrale à cycle combiné (utilisant du méthane ?) contiendrait 11% de CO2 (comparé à 0.04% dans l’air « normal »), qui reste donc largement « dilué » dans l’azote (qui représente 78% de l’air « normal »). Pour les séparer et comprimer le CO2 à 150 bar, il faudrait 0.11Mwh/ tonne métrique de CO2. Les auteurs expliquent qu’une stratégie consiste à enrichir pré-combustion l’air utilisée en oxygène pour limiter la concentration d’azote, mais ne précisent pas.

La fumée issue du vaporéformage du méthane (SMR) ou de la gasification par oxidation partielle (POX) est beaucoup plus riche en CO2, ce qui rend la capture de carbone beaucoup plus intéressante.

Il y a d’autres modes de capture :

  • Direct Air Capture (DAC): des filtres / produits pour capturer le CO2.
  • Enhanced Natural Sing (ENS): rendre les puits à carbone naturels plus efficaces.
  • Biomasse: utiliser la photosynthèse pour retirer du CO2 de l’air

Utiliser le carbone

Une fois capturé, le carbone peut être utilisé de nombreuses façons:

  • Carburants synthétiques
  • Produits chimiques
  • Plastiques
  • Ciment
  • Transformation alimentaire

On parle de « Carbon capture and utilisation » (CCU) au lieu de « Carbon capture and stockage » (CCS). Alors que le second est une technologie de gestion des déchets, le premier peut être source de valeur et de profits. Les deux devront évidemment se combiner de toute façon.

C’est une perspective d’autant plus intéressante qu’à très long terme il pourrait y avoir de moins en moins de sources de carbone, à mesure que les ressources fossiles s’épuisent. [Rq: l’argument est très falacieux, on en est très loin je pense; notamment pour le gaz et le charbon]

Chapitre 6. Infrastructure hydrogène

La question du stockage et de la distribution d’hydrogène est particulièrement complexe, notamment si on veut le distribuer aux transports. On se retrouve face à un problème :

  • les consommateurs n’achèteront pas de FCEV s’il n’y a pas de stations pour les ravitailler,
  • les constructeurs n’investiront pas pour des voitures que personnes n’achèteraient et
  • les vendeurs de carburants ne vont pas installer des stations pour des véhicules qui n’existent pas. (p.69)

Air Liquide produit, grâce à environ 50 installations, 0.89 millions de tonnes d’hydrogène. C’est le plus gros producteur en Europe. (p.71)

A température / pression atmosphériques, 1Kg d’hydrogène occupe 11 000 litres. Classiquement on le compresse à 700 bars, pour réduire son volume à 23 litres. Il peut être encore plus condensé en étant transformé en liquide, ce qui suppose de le refroidir à -253°C. Le kg n’occupe alors plus qu’un litre.

La détection de fuite est un vrai problème, surtout pour les pipelines, le gaz étant inodore et sans couleur. Le prix de la surveillance sera sans doute supérieure à celle des pipelines de gaz naturel.

Il y a des pipelines de dihydrogène existants, notamment entre Dunkerque, Liège et Rotterdam; et dans le Golfe du Mexique, entre New Orleans et Clearlake.

Je zappe le chapitre 7 (Proposition de transition du gaz naturel à l’hydrogène au Royaume-Uni) dont je ne comprends pas l’intérêt.

Chapitre 8. Production d’hydrogène à petite échelle

C’était le coeur de la proposition de Jérémy Rifkin dans l’Economie hydrogène : un système de production décentralisé, où tout le monde aurait sa pile à combustible. Voyons ce que proposent les auteurs du présent livre.

Ils voient plusieurs difficultés à une mobilité électrique par batterie :

  • Difficultés à charger pour les habitants d’appartements
  • Prix du déploiement d’une infrastructure de charge par les personnes publiques
  • Les stress causés aux grilles électriques
  • Les voitures électriques ont du mal à chauffer l’habitacle (?)

Ils ne proposent aucun élément. Quels investissements pour les unités à petite échelle ? Quelle perte de rendement ? J’avous être un peu atterré …

Chapitre 9. Cryomagnétique de l’hydrogène, une innovation physique

Ils s’étendent ici sur les attributs de l’hydrogène liquide. Il boue à -253°C et se solidifie à -259°C, ce qui suppose une technologie très précise.

Au delà de cela je ne vois pas l’intérêt de cette partie. Je passe.

Chapitre 10. Décarbonation profonde, le rôle de l’hydrogène

La production d’acier est responsable de 6% des émissions de gaz à effets de serre, notamment en raison du processus chimique impliquant une sorte de charbon, la coke.

Les auteurs proposent d’utiliser de l’hydrogène à la place, ce qui réduirait les émissions de GES de 96%. (p.111) Cela semble très hypothétique et ne cadre pas vraiment avec le sujet, je passe.

Chapitre 11.12 : Conclusion

Les auteurs auraient défendu 3 arguments

  • L’hydrogène fossile avec un procédé de capture de carbone est beaucoup moins cher que l’hydrogène venant d’énergies bas-carbones.
  • L’impact environnemental de l’extraction de gaz naturel peut être équivalent ou même meilleur que celui des énergies renouvelables (Solaire, éolien biomasse), notamment pour le transport et l’occupation au sol.
  • Les capacités techniques et financières des compagnies pétrolière (qui sont aussi des compagnies gazières) rendent crédible l’évolution technologique des procédés.

L’hydrogène vert resterait utile à court terme pour absorber les pics de production d’énergies intermittentes.

Leur réflexion montre que les politiques de rejet radical des investissements dans les industries pétrochimiques serait contre-productif, n’incitant pas à améliorer les pratiques existantes.

Que penser de l’hydrogène fossile ?

L’ouvrage est très intéressant : synthétique, il nous permet de nous plonger en quelque pages au coeur de l’industrie de l’hydrogène (et a beaucoup de sources que j’ai hâte de lire).

Peu de preuves

Néanmoins, il souffre d’une construction très hasardeuse (ex: p.38, il parle d’un processus pour remplacer l’hydrogène dans la désulphurisation pour illustrer l’innovation autour du vaporéformage …) et ne prouve, au final pas grand chose. L’essentiel du livre n’a, en fait, rien à voir avec la question centrale : l’hydrogène fossile peut-il être viable écologiquement ?

De plus, il y a pas mal de choses difficiles à exploiter.

Par exemple, il compare les prix avec ou sans dispositif de capture de carbone. La grande question étant : lesquels ? On ne connait pas leur efficacité, on ne peut pas en déduire grand chose. De même, on ne connait pas les détails de chaque comparaison : quelle production de carbone pour chacun ? Quelle énergie a été utilisée ? Etc.

Enfin, il affirme souvent avoir prouvé des choses, alors qu’en fait .. pas vraiment (Voire pas du tout, je n’ai pas vu de comparaison de l’impact environnemental des différentes énergies).

Un livre restant intéressant

Reste que l’idée est très forte : la production d’hydrogène vert ne va pas être multipliée par 25 (voire >100 si on veut une mobilité hydrogène) du jour au lendemain. Leur conclusion sur le risque d’un désinvestissement dans l’industrie pétrolière aussi : cette pratique aurait, si elle est faite trop radicalement, un effet toxique pour l’environnement.

Bref, ce livre est une très belle source d’information (et surtout de sources <3), mais ne permet absolument pas de se faire une idée sur le sujet traité.

Eléments clairement discutables

Au-delà de ces problèmes, il y a tout de même plusieurs choses qui m’ont fait tiquer.

Point de vocabulaire

Les auteurs préfèrent, plutôt que de parler d’hydrogène brun pour celui issu du gaz et du pétrole, ou bleu pour celui venant du gaz, de parler d’hydrogène « mature ». (p.2) Je ne reprendrai pas cette convention, qui me semble porteuse de jugement (l’électrolyse serait « immature » ?) et peu justifiée.

En effet, son postulat de base me semble faux : on parle d’hydrogène brun pour décrire celui d’origine fossile (pétrole / charbon / gaz) et d’hydrogène bleu pour désigner celui qui, bien que venant d’énergies fossiles, a un impact moindre (ex: parce qu’il y a un dispositif de captation carbone).

Pour plus de clarté, j’ai préféré employer le terme d’hydrogène fossile.

Problème de chiffres ?

Le chiffre de production d’hydrogène par électrolyse de 2 MT (présenté dans le figure 1.1) décrit uniquement celui venant d’énergies renouvelables. Le schéma ne précise pas celui n’étant pas alimenté par des énergies renouvelables (et, l’électrolyse ne supportant, à ma connaissance, pas l’intermittence, c’est vraiment un chiffre bizarre). De plus, ils écrivent plus loin :

« Dans la figure 1.1, la proportion d’électrolyse renouvelable est présentée comme étant de 2%, et la figure 1.2 montre que l’ensemble de l’hydrogène venant d’électrolyse serait de 4%. Clairement, la proportion d’hydrogène vert est actuellement très faible. »

p.3

Or, 2 MT représentent bien 4% du total de production (50 MT) … Bref, une petite coquille … (c’est pour cela que je n’ai pas précisé, en présentant les chiffres de production, comment était alimentée l’électrolyse.)

Des sources discutables

La source :

MarketsandMarkets. Hydrogen generation market by geography, by mode of generation & delivery, applications and technology—Global trends & forecasts to 2019 in Hydrogen Generation Market 2014, 1–156. Washington: MarketsandMarkets Inc.

Un cabinet de conseil. Booon …Dans le même genre, les auteurs annoncent :

« In the USA, the Nikola Motor Company has launched the Nikola One hydrogen-fuelled truck offering a range up to 1000 miles with a 20-minute refuel time. »

p.28-29

Leur source ? Le site internet de Nikola Motor Company … Ils auraient pu se méfier, ce constructeur inconnu prétendant avoir une portée 4 fois plus grande que ceux d’un grand constructeur automobile (Hyundai) … D’autant plus que l’entreprise en question n’a pas vraiment une réputation de sincérité.