La CDR (Carbon Dioxyde Removal): une solution au dérèglement climatique ?

La CDR, ou Carbon Dioxide Removal (élimination du dioxyde de carbone), consiste à retirer le dioxyde de carbone (CO2) de l’atmosphère et le stocker de manière durable.


La Terre se réchauffe, dans une large mesure à cause du CO2 émis par l’Humanité. Pour lutter contre cela, il y a plusieurs pistes: diminuer la consommation de services et de biens polluants et décarboner leur production. Néanmoins, il restera encore des procédés qu’on ne pourra pas décarboner. Il faudra alors capturer le carbone et le stocker. Face à ces émissions de CO2 qu’on ne peut pas supprimer, il y a deux choix:

  • Les attraper dès qu’elles sont émises, par exemples à la sortie des cheminées d’usines et de centrales. Cette approche est celle de la CCUS (Carbon Capture Use or Storage) stricto sensu.
  • Récupérer le CO2 déjà émis, dans l’atmosphère, par exemple en plantant des arbres. Cette approche est celle de la CDR ou Carbon Dioxide Removal (élimination du dioxyde de carbone). C’est elle que nous allons voir ici.

Il y a plusieurs technologies prometteuses, qui devront appréhender les limites récurrentes des CDR.

Les principales technologies de CDR (Carbon Dioxyde Removal)

Il y a plusieurs techniques principales de CDR.

  • La première, dans une logique très « technologique »:la capture directe du carbone dans l’air (DAC),
  • La plupart mobilisent néanmoins la croissance naturelle des plantes l’utilisation de biomasse (BECCS), le stockage dans les sols et la foresterie.
  • Enfin, il y a une dernière catégorie assez proche: la géo-ingénierie océanique.

Capture directe de l’air (DAC)

La Capture Directe de l’Air (DAC, Direct Air Capture en anglais) est une technologie qui capture directement le dioxyde de carbone (CO2) de l’atmosphère. Des dispositifs utilisent des filtres chimiques pour extraire le CO2 de l’air. Une fois capturé, le CO2 peut être stocké de manière durable ou utilisé à des fins commerciales, par exemple pour la production de carburants synthétiques. Bien que prometteuse, la DAC est encore à un stade de développement relativement précoce et fait face à des défis tels que l’efficacité énergétique et les coûts de mise en œuvre à grande échelle.

Les technologies agricoles de CDR

Il y a plusieurs technologies relevant de l’agriculture, qui doivent être étudiées ensemble, car elles ont des limites communes, notamment sur la disponibilité des sols et la compétition avec les cultures nourricières.

Utilisation de la biomasse pour la production d’énergie avec capture et stockage du carbone (BECCS)

La BECCS, ou Biomass Energy with Carbon Capture and Storage (Énergie de la Biomasse avec Capture et Stockage du Carbone), consiste à combiner l’utilisation de la biomasse comme source d’énergie avec la capture et le stockage du dioxyde de carbone (CCS). Dans ce processus, la biomasse est brûlée pour produire de l’énergie, le CO2 émis est capturé à la source, puis transporté et stocké de manière sûre, généralement sous terre. En théorie, cette approche peut être « carbone négative » si la biomasse provient de sources qui absorbent le CO2 pendant leur croissance.

Cependant, la mise en œuvre à grande échelle de la BECCS pose des défis en termes de disponibilité de la biomasse, d’impact sur l’utilisation des terres et de coûts.

Stockage du carbone dans les sols

Le stockage du carbone dans les sols est une méthode de séquestration du carbone qui vise à augmenter la quantité de dioxyde de carbone (CO2) stocké dans les sols. Les sols peuvent stocker le carbone sous forme de matière organique, ce qui aide à améliorer la fertilité des sols et la rétention d’eau, tout en réduisant les émissions de gaz à effet de serre. C’est le cœur de pratiques comme l’agriculture de conservation et l’agroforesterie (et plus largement de différentes techniques reprises dans toute l’agriculture). Cependant, la capacité des sols à stocker du carbone peut être limitée et varie en fonction des types de sols et des pratiques de gestion utilisées. La question de la durabilité du stockage peut aussi être problématique.

La foresterie

Les arbres captent naturellement le CO2 et ils sont donc un la technologie de CDR privilégiée, notamment parce qu’elle est très peu chère. On parle de reforestation (reboiser une zone qui ne l’était plus) et l’afforestation (implanter une forêt là où il n’y en a jamais eu). Cette dernière piste est particulièrement intéressante pour valoriser les espaces arides, dévastés, laissés autrement à l’abandon. Plus largement, l’exploitation des forêts permet de capturer du carbone. La difficulté dans ce dernier cas est de trouver suffisamment de débouchés.

Géo-ingénierie océanique ou stockage océanique du carbone

La géo-ingénierie océanique est un ensemble de techniques proposées pour atténuer le changement climatique en augmentant la capacité des océans à séquestrer le dioxyde de carbone (CO2). Cela peut inclure la fertilisation des océans, qui vise à stimuler la croissance du phytoplancton qui absorbe le CO2, et la modification de l’albédo des surfaces océaniques pour augmenter leur réflectivité et réduire le réchauffement. Ces méthodes sont encore largement à l’étape de recherche et soulèvent des préoccupations environnementales et réglementaires importantes.

Les limites en général de la CDR

La CDR en général a plusieurs limites globales ou récurrentes.

L’incitation économique et la réglementation

La mise en œuvre de la CDR soulève des questions de gouvernance, y compris la question de savoir qui devrait être responsable de la mise en œuvre de ces technologies, comment les risques et les avantages devraient être partagés, et comment ces technologies devraient être réglementées. Néanmoins, elles sont très spécifiques et il sera très difficile de définir une réglementation garantissant que leur rétribution est conditionnée à leur bonne exécution. En somme, il ne faut pas payer les gens pour faire n’importe quoi et c’est d’autant plus difficile que le domaine est mal connu.

L’impact sur les écosystèmes

Beaucoup de stratégies impliquent un impact considérable sur les écosystèmes, comme la fertilisation des océans au fer, qui peut influer sur le type de phytoplancton proliférant.

Les moyens nécessaires et leur coût

Retirer suffisamment de CO2 de l’atmosphère est un projet gigantesque, et les CDR demandent, pour avoir un effet significatif, des moyens extraordinaires. C’est par exemple l’obstacle à l’alcalinisation des océans, qui demanderait de trop grandes quantités de matériaux.

L’efficacité et les risques de réversibilité

L’efficacité de beaucoup de procédés de géo-ingénierie n’est pas clairement démontrée, surtout sur le plan de la durabilité du stockage du carbone. Le carbone stocké par certaines méthodes de CDR pourrait être relâché dans l’atmosphère si ces méthodes ne sont pas gérées correctement à long terme. Par exemple, le carbone stocké dans les forêts peut être libéré par la déforestation ou les incendies de forêt.