Les biocarburants : la biomasse liquide

Les biocarburants, tels que la bioessence et le biodiesel, sont des carburants renouvelables produits à partir de la biomasse, offrant une alternative durable aux carburants fossiles. Ces biocarburants présentent plusieurs avantages en tant que sources d’énergie pour les moteurs à combustion. Tout d’abord, ils sont renouvelables et contribuent à réduire la dépendance aux combustibles fossiles. De plus, ils émettent généralement moins de gaz à effet de serre et de polluants atmosphériques que leurs homologues fossiles, ce qui aide à atténuer les impacts du changement climatique et améliore la qualité de l’air. Cependant, il est crucial de veiller à ce que la production de biocarburants soit durable et n’entraîne pas de problèmes environnementaux ou sociaux, tels que la déforestation ou la concurrence avec les cultures alimentaires

Les différents types de biocarburants

Les bioessences

Les bioessences, également appelées biocarburants à base d’essence, sont des carburants produits à partir de ressources renouvelables et destinés à être utilisés dans les moteurs à essence. Elles sont souvent mélangées avec de l’essence traditionnelle pour réduire les émissions de gaz à effet de serre et la dépendance aux combustibles fossiles. Parmi les bioessences, on trouve principalement le bioéthanol et l’ETBE (éthyl tert-butyl éther).

  • Bioéthanol. Le bioéthanol est un alcool produit par la fermentation de sucres issus de matières végétales riches en glucides, tels que le maïs, la canne à sucre, la betterave ou les céréales. Il peut être mélangé avec de l’essence en différentes proportions pour créer des carburants tels que l’E10 (10 % d’éthanol et 90 % d’essence) ou l’E85 (85 % d’éthanol et 15 % d’essence). L’utilisation de bioéthanol permet de réduire les émissions de CO2, car le carbone libéré lors de la combustion provient de la biomasse végétale, qui a capté ce CO2 lors de sa croissance.
  • L’ETBE (éthyl tert-butyl éther) est un composé chimique utilisé comme additif pour l’essence. Il est produit par la réaction de l’éthanol avec de l’isobutylène, un dérivé du pétrole. L’ETBE a un pouvoir calorifique supérieur à celui du bioéthanol seul et présente une meilleure résistance à l’évaporation, ce qui améliore la performance du carburant et réduit les émissions de composés organiques volatils. L’ETBE peut être mélangé avec de l’essence en différentes proportions, généralement jusqu’à 15 %.

Les biogazoles

Les biogazoles sont des carburants produits à partir de ressources renouvelables et destinés à être utilisés dans les moteurs diesel. Les biogazoles sont souvent mélangés avec du diesel traditionnel pour réduire les émissions de gaz à effet de serre et la dépendance aux combustibles fossiles. Parmi les biogazoles, on trouve principalement le biodiesel (FAME) et le diesel de synthèse (HVO et GTL).

  • Le biodiesel ou FAME (Fatty Acid Methyl Esters) est un biocarburant produit à partir d’huiles végétales, comme l’huile de colza, de soja ou de palme, ou d’huiles animales et de graisses recyclées. Le biodiesel est obtenu par transestérification, une réaction chimique qui transforme les triglycérides présents dans les huiles et les graisses en esters méthyliques d’acides gras. Le biodiesel peut être mélangé avec du diesel traditionnel en différentes proportions, telles que le B5 (5 % de biodiesel et 95 % de diesel) ou le B20 (20 % de biodiesel et 80 % de diesel). L’utilisation de biodiesel contribue à réduire les émissions de CO2 et de particules fines.
  • Diesel de synthèse (HVO et GTL). Le diesel de synthèse est un biocarburant de seconde génération produit à partir de biomasse ou de gaz naturel par des procédés avancés de transformation, comme l’hydrotraitement (HVO – Hydrotreated Vegetable Oil) ou la liquéfaction du gaz (GTL – Gas to Liquid). Le HVO est obtenu en traitant des huiles végétales, des graisses animales ou des huiles usagées avec de l’hydrogène sous haute pression et température, tandis que le GTL est produit par la conversion du gaz naturel en hydrocarbures liquides par le procédé Fischer-Tropsch. Ces carburants ont des propriétés similaires à celles du diesel traditionnel et peuvent être utilisés purs ou mélangés en différentes proportions. Ils offrent une meilleure qualité de combustion et réduisent les émissions de gaz à effet de serre et de polluants atmosphériques.

Biocarburants avancés

Ce qu’on appelle les « biocarburants avancés » sont des biocarburants de seconde et troisième génération. Il y a notamment deux carburants de seconde génération:

  • Le bioéthanol cellulosique est produit à partir de biomasse lignocellulosique, telle que les résidus de culture, les résidus forestiers, et les cultures énergétiques non alimentaires comme le switchgrass. Les polysaccharides contenus dans cette biomasse sont convertis en sucres fermentescibles par hydrolyse enzymatique ou chimique, puis fermentés en éthanol.
  • Le biodiesel avancé est fabriqué à partir de matières premières non alimentaires, telles que les huiles de microalgues, les huiles résiduelles, les graisses animales et les huiles de jatropha. La production de biodiesel avancé utilise généralement la transestérification ou l’hydrotraitement des huiles et graisses.

Il y en a aussi de troisième génération:

  • Les biocarburants à base d’algues sont produits à partir de la culture de microalgues ou macroalgues. Les microalgues sont cultivées en photobioréacteurs ou dans des systèmes ouverts, puis récoltées et transformées en biocarburants tels que le biodiesel, le bioéthanol, le biobutanol et le biogaz. Les algues présentent un rendement énergétique élevé et peuvent être cultivées sur des terres non, ce qui réduit la concurrence avec les cultures alimentaires. De plus, elles ont la capacité d’absorber le CO2 et d’éliminer les nutriments des eaux usées, offrant ainsi des avantages environnementaux supplémentaires.
  • Les biocarburants synthétiques ou « drop-in » sont produits à partir de biomasse ou de gaz de synthèse (syngas) par le biais de processus tels que la gazéification, la pyrolyse ou la fermentation du gaz. Ils sont convertis en hydrocarbures liquides similaires aux carburants fossiles, tels que l’essence, le diesel et le kérosène. Ces biocarburants « drop-in » sont compatibles avec les infrastructures et les moteurs existants, sans nécessiter de modifications. Parmi les technologies de production de biocarburants synthétiques, on trouve le procédé Fischer-Tropsch, la synthèse de l’alcool en oléfines et l’électrochimie.

Les générations de biocarburants et leurs technologies de conception

Les biocarburants sont classés en différentes générations en fonction des matières premières utilisées et des technologies de production employées. Voici un aperçu des différentes générations de biocarburants :

Première génération de biocarburants

La première génération de biocarburants est fabriquée à partir de matières premières issues de cultures alimentaires, telles que le maïs, la canne à sucre, le colza et le soja. Les principaux carburants produits sont l’éthanol (bioessence) et le biodiesel (biogazole). La production de ces biocarburants est généralement réalisée par fermentation et distillation pour l’éthanol, et par transestérification pour le biodiesel. Bien qu’ils contribuent à réduire les émissions de gaz à effet de serre, les biocarburants de première génération sont souvent critiqués en raison de leur impact sur la sécurité alimentaire, l’utilisation des terres et les ressources en eau.

  • Fermentation : La fermentation est le processus de conversion des sucres contenus dans les matières premières (par exemple, la canne à sucre, le maïs) en alcool (éthanol) à l’aide de micro-organismes, généralement des levures. L’éthanol peut ensuite être utilisé comme biocarburant ou mélangé avec de l’essence pour créer des carburants mixtes.
  • Transestérification : La transestérification est une réaction chimique qui convertit les triglycérides présents dans les huiles végétales ou animales en biodiesel (esters méthyliques) et en glycérol. Cette réaction nécessite un alcool (généralement du méthanol) et un catalyseur (souvent un alcali).

Deuxième génération de biocarburants

La deuxième génération de biocarburants est produite à partir de matières premières non alimentaires, comme les résidus de cultures, les déchets forestiers et les plantes à croissance rapide, telles que les herbacées et les arbustes. Ces biocarburants sont conçus pour réduire les impacts environnementaux et sociaux associés à la première génération. Les technologies de production incluent la conversion thermochimique (gazéification, pyrolyse), la conversion biochimique (hydrolyse enzymatique, fermentation) et la synthèse chimique (Fischer-Tropsch). Les principaux carburants produits sont le bioéthanol cellulosique, le biodiesel avancé (HVO) et le biogaz de synthèse.

  • Hydrolyse et fermentation simultanées (SSF) : L’SSF est une technologie qui combine l’hydrolyse des polysaccharides présents dans la biomasse lignocellulosique en sucres simples et la fermentation de ces sucres en éthanol en une seule étape.
  • Pyrolyse et gazéification : La pyrolyse est un processus thermochimique qui décompose la biomasse en biochar, biohuile et gaz combustibles. La gazéification est un processus similaire qui convertit la biomasse en gaz de synthèse (syngas), qui peut ensuite être transformé en biocarburants liquides par des procédés tels que la synthèse de Fischer-Tropsch.

Troisième génération de biocarburants

La troisième génération de biocarburants est principalement basée sur l’utilisation de micro-organismes, tels que les microalgues et les cyanobactéries, pour produire des biocarburants à partir de la photosynthèse. Ces organismes peuvent être cultivés dans des bioréacteurs ou des étangs à ciel ouvert, sans nécessiter de terres arables. Les microalgues et les cyanobactéries produisent des lipides, des glucides et des protéines qui peuvent être convertis en biocarburants, tels que l’éthanol, le biodiesel et le biogaz. Les technologies de production sont encore en développement et font l’objet de recherches pour améliorer leur rendement et leur rentabilité.

  • Culture de microalgues : Les microalgues sont cultivées dans des photobioréacteurs ou des systèmes ouverts pour produire de la biomasse, qui est ensuite récoltée et transformée en biocarburants, tels que le biodiesel, le bioéthanol, le biobutanol et le biogaz.
  • Génie génétique : Des micro-organismes modifiés génétiquement, tels que les bactéries et les levures, sont utilisés pour améliorer la production de biocarburants à partir de substrats spécifiques.

Quatrième génération de biocarburants

La quatrième génération de biocarburants englobe les technologies émergentes visant à produire des biocarburants à partir de sources renouvelables, en utilisant des approches innovantes, telles que la biologie synthétique et la modification génétique des plantes ou des micro-organismes. L’objectif est d’améliorer l’efficacité énergétique, de réduire les émissions de gaz à effet de serre et de minimiser les impacts sur les ressources en terres et en eau. Les biocarburants de quatrième génération incluent les carburants solaires, les biohydrocarbures et les biocarburants électrochimiques. Les technologies de production sont encore à un stade précoce de développement et nécessitent des investissements et des avancées scientifiques pour devenir économiquement viables et compétitives sur le marché.

  • Carburants solaires : Les carburants solaires sont produits en utilisant l’énergie solaire pour convertir le dioxyde de carbone et l’eau en hydrocarbures ou en alcool.
  • Biologie synthétique : La biologie synthétique permet de concevoir et de construire de nouveaux systèmes biologiques pour améliorer la production de biocarburants, par exemple en créant des micro-organismes capables de métaboliser des substrats spécifiques de manière plus efficace.

Avantages et inconvénients des biocarburants

Les biocarburants présentent plusieurs avantages et inconvénients, qui sont énumérés ci-dessous :

Avantages

  1. Réduction des émissions de gaz à effet de serre : Les biocarburants peuvent aider à réduire les émissions de CO2 et d’autres gaz à effet de serre, en comparaison avec les carburants fossiles traditionnels.
  2. Ressources renouvelables : Les biocarburants sont produits à partir de biomasse, qui est une ressource renouvelable et disponible localement dans de nombreux pays, réduisant ainsi la dépendance aux combustibles fossiles importés.
  3. Sécurité énergétique : Les biocarburants peuvent contribuer à la sécurité énergétique en diversifiant les sources d’énergie et en réduisant la dépendance aux importations de pétrole.
  4. Développement rural et emploi : La production de biocarburants peut stimuler l’économie rurale et créer des emplois dans les secteurs agricole et industriel.

Inconvénients

  1. Concurrence avec les cultures alimentaires : La production de biocarburants de première génération peut entrer en concurrence avec les cultures destinées à l’alimentation, ce qui peut provoquer une hausse des prix des denrées alimentaires et une insécurité alimentaire.
  2. Utilisation des terres et déforestation : La production de biocarburants peut entraîner une utilisation non durable des terres et contribuer à la déforestation, en particulier dans les zones tropicales où les cultures énergétiques sont cultivées.
  3. Consommation d’eau : La production de biocarburants peut nécessiter d’importantes quantités d’eau, ce qui peut aggraver la pénurie d’eau dans certaines régions.
  4. Efficacité énergétique : Les biocarburants de première génération ont une efficacité énergétique relativement faible, ce qui signifie que leur production et leur utilisation nécessitent plus d’énergie que ce qu’ils produisent.
  5. Coûts de production : Les coûts de production des biocarburants avancés peuvent être élevés, ce qui les rend moins compétitifs par rapport aux carburants fossiles traditionnels.

L’utilisation des biocarburants

L’utilisation concrète des biocarburants s’étend à divers domaines, principalement en tant que substituts aux carburants fossiles dans les secteurs des transports, de l’industrie et de la production d’énergie. Voici quelques exemples d’applications :

  • Dans le domaine des transports, les biocarburants peuvent être mélangés à de l’essence ou du diesel pour alimenter les véhicules à moteur, réduisant ainsi les émissions de CO2 et améliorant la performance environnementale du secteur. Les biocarburants peuvent également être utilisés pour alimenter les avions et les navires, contribuant ainsi à la réduction des émissions de gaz à effet de serre et à la dépendance au pétrole dans le secteur maritime.
  • Dans l’industrie, les biocarburants solides tels que les granulés de bois et les briquettes peuvent être utilisés pour la production d’énergie thermique dans les chaudières industrielles et les systèmes de chauffage. Les biocarburants peuvent également être utilisés pour alimenter les centrales électriques et les cogénérations, produisant de l’électricité et de la chaleur pour les industries et les communautés locales.
  • Enfin, dans la production d’énergie domestique, les biocarburants solides tels que les briquettes peuvent être utilisés pour chauffer les maisons dans les poêles et les chaudières à biomasse. Le biogaz produit à partir de la méthanisation des déchets organiques peut également être utilisé pour la cuisson domestique, remplaçant ainsi le gaz naturel ou le propane.

Production et consommation de biocarburants

La production et la consommation de biocarburants ont connu une croissance rapide au cours des dernières décennies. Selon les données de l’Agence internationale de l’énergie (AIE), la production mondiale de biocarburants a augmenté de plus de 600 % entre 2000 et 2019, passant de 16 milliards de litres à près de 130 milliards de litres.

Les principaux producteurs de biocarburants sont les États-Unis, le Brésil, l’Allemagne, la France et l’Indonésie, qui représentent ensemble plus de 80 % de la production mondiale. Les biocarburants les plus couramment produits sont le bioéthanol et le biodiesel, qui sont principalement utilisés dans les transports.

En ce qui concerne la consommation de biocarburants, les États-Unis sont le plus grand consommateur mondial, suivis par le Brésil et l’Union européenne. En 2020, la consommation mondiale de biocarburants représentait environ 3,5 % de la consommation totale de carburants liquides.

Les politiques de soutien aux biocarburants, telles que les objectifs de mélange obligatoire et les incitations fiscales, ont stimulé la production et la consommation de biocarburants dans de nombreux pays. Cependant, l’utilisation des biocarburants reste controversée en raison des préoccupations concernant les impacts environnementaux, tels que la compétition pour les terres cultivables et l’utilisation de pesticides et d’engrais pour la production de cultures dédiées à la production de biocarburants.